La scène se déroule in vitro, dans un laboratoire de l'Institut Cochin à Paris : une cellule infectée par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) est mise en contact avec une cellule saine. Quand tout à coup, la première "tire" sur la seconde... C'est la première fois que des chercheurs filment en direct la transmission du virus du Sida d'une cellule à une autre. Et si les grandes lignes des mécanismes d'infection du virus découvert en 1983 sont connues, ces travaux publiés dans la revue Cell le 8 mai 2018 apportent toutefois un éclairage inédit.
Comme un tir de "pistolet blaster"
Concrètement, l'équipe de Morgane Bomsel a utilisé un type de cellule courant dans la transmission du Sida qu'on trouve notamment dans les sécrétions vaginales, le sperme ou encore le lait maternel. Infectée par le VIH, la cellule visible dans les vidéos a été marquée en vert fluo pour être facilement repérée. Les chercheurs l'ont ensuite lâchée sur une muqueuse d'urètre masculin reconstruite en laboratoire, un tissu en première ligne des infections par voie sexuelle. Plus précisément, ce sont les cellules épithéliales (en bleu dans les vidéos) qui vont être prises pour cible ; ces cellules recouvrent la surface externe ou interne de nombreux organes.
À l'approche d'une autre cellule, celle déjà infectée par le VIH crée une synapse virologique, une sorte de pont qui unit les deux et dont la formation va stimuler la production de particules virales prètes à se jeter sur la cellule saine. Les particules sont alors éjectées vers les cellules épithéliales "comme le rayon vert fluo d’un pistolet blaster dans un vieux film de science-fiction" décrit Morgane Bomsel à nos confrères du Parisien.
Mais au lieu de se fixer aux cellules épithéliales, le VIH ne fait que les traverser. Attendant que les sentinelles du système immunitaire, les macrophages, soient alertées. Une fois sur place pour phagocyter le corps étranger détecté par l'organisme, celles-ci sont prises au piège du VIH dont la particularité est justement de s'attaquer aux cellules immunitaires. C'est cette dernière étape qui constitue la vraie découverte de ces travaux.