Pour nourrir tout le monde sur Terre, voilà comment modifier nos régimes alimentaires

Publicité

Pour nourrir tout le monde sur Terre, voilà comment modifier nos régimes alimentaires

Des rendements plus élevés des cultures et du bétail pourraient réduire la superficie des terres agricoles et les émissions de gaz à effet de serre en 2050
Des rendements plus élevés des cultures et du bétail pourraient réduire la superficie des terres agricoles et les émissions de gaz à effet de serre en 2050
- World Resources Institute

En ces temps de réchauffement climatique, il est possible de nourrir de manière durable près de 10 milliards de personnes d’ici 2050 mais cela nécessitera une refonte de la façon dont le monde produit et mange des aliments. Il faut changer le contenu des assiettes et avant cela, les productions agricoles mondiales.

Y aura-t-il du steak de champignons au menu des participants de la COP24 ? Montreront-ils l'exemple des grands changements que l'Humanité devrait adopter dans ses campagnes et dans ses assiettes pour continuer de se nourrir ? 

D'ici 2050, près de 10 milliards de personnes vivront sur la planète. Nourrir tout le monde de manière saine et suffisante, sans accentuer la pauvreté, sans accroître la déforestation ni augmenter les émissions de gaz à effet de serre ne sera possible que si l'on met en oeuvre des changements majeurs dans le système alimentaire mondial.

Publicité

L'étude du Rapport sur les ressources mondiales (World Resources Report) propose un panel de solutions. 

Plusieurs années de recherche et de modélisation montrent pourquoi chacun des 22 éléments de ce "menu" sont importants et quantifient jusqu'où chaque solution peut nous mener.

Pas de nourriture de synthèse ni de diète généralisée, ces hypothèses pour l'avenir imaginent des assiettes équilibrées pour tous. 

Le document Créer un avenir alimentaire durable a été produit par le World Resources Institute en partenariat avec la Banque mondiale, l’ONU pour l’environnement, le Programme des Nations Unies pour le développement et les agences françaises de recherche agronomique CIRAD et INRA.

Il rappelle à quel point la production de viande de bœuf a un impact climatique démesuré par rapport aux autres aliments. Il souligne qu'en plus de réduire la croissance de la demande en nourriture et d'accroître la productivité agricole, les politiques doivent également réduire la pauvreté rurale en aidant les petits exploitants.

Au menu, le rapport envisage plusieurs types de solutions :

  • Réduire la croissance de la demande de produits alimentaires et d’autres produits agricoles 
  • Augmenter la production alimentaire sans élargir les terres agricoles
  • Protéger et restaurer les écosystèmes naturels 
  • Limiter les déplacements de terres agricoles
  • Augmenter les ressources en poisson
  • Réduire les émissions de gaz à effet de serre provenant de la production agricole 

Moins de protéines dans les assiettes

La moitié de la population mondiale consomme déjà 50 % de protéines de plus qu'il ne le faut et, contrairement à ce que l'on croit généralement, les protéines végétales peuvent facilement répondre aux besoins en protéines d'un régime équilibré qui contient suffisamment de calories. Les dernières recherches minimisent les risques pour la santé liés au cholestérol et à d'autres graisses saturées, mais elles pointent du doigt les viandes transformées comme cancérogènes et la viande rouge comme probablement cancérigène.

Il faut manger moins de viande pour faire baisser la température terrestre (surtout chez les riches)

Entre 2010 et 2050, la consommation mondiale de viande et de produits laitiers devrait augmenter de près de 70 %, la consommation de bœuf augmentant de plus de 80 %.

Les émissions annuelles de gaz à effet de serre de la production agricole atteignent 9 gigatonnes dans la projection de base à l'horizon 2050.

Limiter l'augmentation de la consommation mondiale de viande - en particulier de bœuf, d'agneau et de chèvre - est essentiel pour enrayer le réchauffement climatique. Les viandes de ruminants ont des besoins en ressources les plus élevés parmi tous les aliments que nous mangeons. La production de viande de bœuf, par exemple, utilise 20 fois plus de terre et émet 20 fois plus d'émissions que la production de fèves, par gramme de protéine. 

La Petite Philo
4 min

Les chercheurs ont montré que même en tenant compte des améliorations futures de l'agriculture et de la réduction du gaspillage alimentaire, il est essentiel de réorienter les régimes des consommateurs à revenu élevé vers des aliments à base de plantes pour atteindre les objectifs climatiques.

Pour ce qui est de la production de lait, la situation est moins tendue car une production de lait modernisée et plus productive réduira considérablement les émissions de gaz à effet de serre.

Le hamburger aux champignons

La tendance visant à aider les consommateurs à adopter un régime alimentaire plus riche en légumes est une bonne nouvelle aux yeux des chercheurs. C'est par là que l'on pourra s'en sortir. 

Des grands chefs adoptent de nouvelles recettes ou bien des innovations techniques permettent de composer des substituts de viandes à base d’éléments végétaux. 

L'une des initiatives les plus récentes est le Cool Food Pledge. Cette nouvelle plateforme mondiale aidera les entreprises, restaurants, universités, hôpitaux et autres établissements à offrir de nouveaux types de nourriture tout en réduisant les émissions liées à l'alimentation. 25 % d'ici 2030 - un niveau conforme aux objectifs de limitation de l'élévation de la température à 1,5-2 ° C.

La Sodexo, entreprise française qui est l'un des plus gros fournisseur de restauration collective, est un membre du Cool Food Pledge. La société vient de lancer 200 nouvelles recettes à base végétale, y compris des plats comme un hamburger au madras préparé à partir d'un mélange de bœuf à 75 % et de champignons à 25 %, ou bien l'osso buco de carotte. 

On n'oublie pas le poisson 

Selon la FAO, 33 % des stocks de poissons en mer ont été surexploités en 2015 et une étude de la Banque mondiale a montré que l’effort de pêche mondial devait baisser de 5 % par an sur une période de 10 ans, afin de permettre aux stocks de poissons de se reconstituer. 

On le sait, la lutte contre la surpêche est incessante. Mais la mer et les océans sont des lieux de grands déséquilibres et de rapport de force puisque les flottes de pays riches sont souvent en mesure d'obtenir des accords pour pêcher dans les eaux de pays plus pauvres, sans compter des subventions estimées à 35 milliards de dollars par an qui n'aident pas à la réduction de la pêche. 

Donc, comme il est difficile de réduire la surpêche, les rapporteurs préconisent une réduction de 10% des captures de poisson sauvage entre 2010 et 2050 dans leur scénario de base.

En revanche le rapport fait un scénario audacieux de développement de l'aquaculture. L’aquaculture doit devenir plus économe en ressources, en particulier parce que les terres disponibles sont limitées en Asie, où se trouvent près de 90 pour cent de la production aquacole. Il faudra des étangs plus profonds pour ne pars utiliser trop de surface de terres. 

L'aquaculture doit s'étendre sur les eaux marines, prévoir de nouveaux substituts alimentaires pour les poissons.

Plus de productivité et moins de gaspillage

Les gains de rendement en viande et en lait de ruminants nécessitent une augmentation massive de la production par hectare de pâturages.

"Nous estimons que cela est parfaitement réalisable, mais les changements culturels et comportementaux nécessaires seront difficiles" expliquent les rapporteurs. 

D'après l'étude Créer un avenir alimentaire durable il faut réduire de 50 % les pertes et les gaspillages alimentaires. Mais les scientifiques estiment que c'est un objectif très difficile à atteindre car le gaspillage va avec le développement. 

Le Rapport sur les ressources mondiales estime qu'il existe déjà de puissantes initiatives visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre liées aux aliments. Mais le changement doit être généralisé sur des milliards de repas - et le niveau d'ambition doit être en adéquation avec l'ampleur du défi climatique. Tout le monde, des consommateurs aux chefs en passant par les chefs d'entreprise et les décideurs, a un rôle à jouer dans l'évolution des régimes pour un avenir alimentaire durable.

> ECOUTER LES PODCASTS DE RADIO FRANCE : Agir pour ma planète

A l'occasion de la COP24, retrouvez toutes les émissions et les chroniques sur le changement climatique , par les antennes de Radio France. Quel est l'impact du réchauffement climatique sur l'environnement ? Quels dangers, quelles solutions ? A retrouver sur iTunes, sur Deezer ou en fil RSS .

pixel