«Salut Ching Chong» : après les tags antisémites, HEC théâtre de racisme anti-chinois

La direction d’HEC a ouvert une enquête interne après la sortie raciste d’un élève, visant une étudiante chinoise du campus.

 La communauté d’étudiants chinois est en colère, après un incident raciste antichinois sur le campus d’HEC.
La communauté d’étudiants chinois est en colère, après un incident raciste antichinois sur le campus d’HEC. LP/L.M.

    C'est une nouvelle affaire dont se serait bien passée la prestigieuse école de commerce, moins d'un mois après la découverte, en octobre, de tags antisémites aux murs d'une salle de classe. Tout est parti d'un mail, envoyé le 23 novembre par une étudiante chinoise d'HEC, à l'ensemble des élèves et des professeurs du prestigieux campus de Jouy-en-Josas (Yvelines).

    « J'ai perdu mes AirPods à la bibliothèque », écrit la jeune femme. « Si quelqu'un les as vus, merci de me prévenir ». Un étudiant français lui répond, acerbe : « Salut Ching Chong. Je ne sais pas où sont tes AirPods, par contre j'ai les miens. »

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    S'en suivent d'autres réponses d'étudiants français, tout aussi offensantes, tournant la requête de l'étudiante en dérision. « Ce qu'il faut bien comprendre », explique au Parisien Barry*, un autre étudiant chinois d'HEC, « c'est que le terme ching chong, pour nous, est très insultant. C'est l'équivalent du mot nègre pour les Africains ».

    Vif émoi des étudiants asiatiques d'HEC

    Le lundi suivant, Peter Todd, le directeur d'HEC, décide de taper du poing sur la table. « J'ai entendu dire que ces commentaires étaient perçus comme étant de mauvais goût, mais qu'ils n'étaient en réalité pas racistes. Soyons très clairs, ils sont racistes. Ils visent à dénigrer des personnes en fonction de leur origine ethnique, culturelle ou raciale », recadre-t-il, dans un courrier envoyé le 26 novembre à tout le campus, et révélé par Le Figaro.

    Car l'émoi, au sein de la communauté d'étudiants chinois d'HEC - ils sont environ 200 sur le campus - est très vif. « [C'est] une humiliation pour la communauté chinoise », protestent-ils, dans une lettre ouverte adressée à la direction d'HEC, quelques heures seulement après les faits. « Nous demandons des excuses publiques et des sanctions, pour que de tels actes, indignes du prestige des étudiants d'HEC Paris, ne se reproduisent plus ».

    Selon plusieurs témoignages recueillis par Le Parisien, ce ne serait pas la première fois que de tels incidents racistes se produisent, ces dernières années, derrière les murs de l'école. « C'est encore arrivé il y a un mois à un ami », assure Li*, qui est arrivée en septembre dernier à HEC. « En remontant dans sa chambre, après le déjeuner, il a été alpagué par plusieurs étudiants, qui lui ont lancé Ching Chong ».

    Des incidents loin d'être isolés

    Morty*, lui, a été directement visé. « Après un match de basket, mes amis asiatiques et moi étions en train de boire de l'eau, à l'entrée du gymnase. A ce moment-là, un petit groupe d'individus a traversé la pièce en criant Ching Chang Chong », se rappelle-t-il. Scandalisés, Morty et ses amis décident d'écrire au doyen, qui leur promet, en retour, d'ouvrir une enquête interne. « Mais bien sûr, il n'y a eu aucune suite. Apparemment, parce qu'il n'y aurait aucune preuve », déplore l'étudiant.

    Barry, pour sa part, se dit « triste et en colère ». « Ce genre de remarques racistes est prononcé au moins une à deux fois par an sur le campus. Cela n'est plus acceptable », s'indigne-t-il, regrettant que de tels écarts ne soient que rarement punis. « De plus en plus d'incidents de ce type me sont signalés par des élèves d'HEC », abonde Rui Wang, le cofondateur de l' Association des Jeunes Chinois de France, qui a, lui aussi, écrit à la grande école pour demander des sanctions. « Le problème, c'est que ce sont souvent des blagues orales, donc difficiles à prouver ».

    Rui Wang, qui est également membre du bureau parisien de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), espère bien que cette fois-ci, la direction de la grande école de commerce ne laissera rien passer. « Une mauvaise réponse d'HEC nuirait profondément à son image », prévient-il. Soit on cautionne, soit on sanctionne. La balle est désormais dans le camp d'HEC ».

    Sollicité par Le Parisien, Eric Ponsonnet, le directeur général adjoint d'HEC, a assuré qu'une enquête interne avait été ouverte. « Une procédure disciplinaire sera engagée, avec tenue d'un conseil de discipline, afin de clarifier ce qu'il s'est passé », a-t-il promis, tout en refusant, à ce stade, de se prononcer en faveur d'éventuelles sanctions. « C'est le conseil de discipline qui le dira ».

    *Prénoms d'emprunts