Les bénévoles de GSF organisent des maraudes pour aller à la rencontre des femmes. Crédit : Capture d'écran du compte Facebook Gynécologie sans frontières
Les bénévoles de GSF organisent des maraudes pour aller à la rencontre des femmes. Crédit : Capture d'écran du compte Facebook Gynécologie sans frontières

L’association Gynécologie sans frontières s’est donné une mission : "prendre soin" des femmes migrantes présentes dans le nord de la France, à Calais et à Grande-Synthe. À l'aide de leur "ambulance", les sages-femmes bénévoles sillonnent la région, les centres d'accueil, à la rencontre des exilées.

Maryam** pousse la porte du petit bureau transformé pour la journée en cabinet médical. Cette femme d’une trentaine d’années d’origine afghane vient voir les bénévoles de Gynécologie sans frontières (GSF) présents cet après-midi dans un centre d’accueil pour migrants du nord de la France*. Chaque semaine, les équipes de GSF organisent des permanences dans plusieurs lieux d'hébergement de la région, des CAES, des CAO...

Ce jour-là, l’échange avec la patiente est compliqué, la barrière de la langue ne facilite pas la consultation médicale. Avec des gestes, l’équipe de GSF comprend que Maryam a un retard de règles. Camille, l’une des sages-femmes, l’accompagne aux toilettes pour qu’elle fasse un test de grossesse. Quelques minutes plus tard, le résultat tombe : la jeune femme, qui vit depuis plusieurs années sur la route de l’exil, est enceinte de son 3ème enfant. Elle est folle de joie. 

Pendant trois heures, ce jour-là, les visites s’enchaînent. Face à leurs patientes, les sages-femmes réalisent souvent un premier diagnostic. Elles les orientent ensuite les femmes vers des hôpitaux ou des spécialistes de la région pour des consultations plus poussées.

Face aux migrantes, le travail de ces sages-femmes s'arrête rarement aux soins médicaux. De nombreuses femmes viennent les voir pour parler, trouver une écoute attentive. "Nous sommes la seule association qu’elles voient dans ce centre donc on joue plusieurs rôles", explique Justine, bénévole de GSF. "Notre mission n’est pas uniquement de traiter des pathologies, mais véritablement de prendre soin des femmes", précise-t-elle encore.

400 interventions chaque mois

Plusieurs résidentes du centre se plaignent à GSF de leurs conditions de vie plus davantage que de leurs problèmes intimes. À l’instar de Zara**, une mère de famille kurde irakienne qui souffre de troubles psychologiques. "Je ne dors pas, je pleure tout le temps", dit-elle aux bénévoles les yeux remplis de larmes. "On est venus en France pour avoir une vie meilleure mais c’est encore pire", sanglote-t-elle, en ne cessant de se frotter les mains. Comme elle, plusieurs patientes craquent lorsqu’elles évoquent leur vie. "J’ai des accès de colère, je ne suis pas bien ici. Je suis très triste", se plaint Lina**, une autre mère de famille kurde irakienne, des sanglots dans la voix.

Les bénévoles savent qu'elles sont impuissantes. "Elles ont besoin d’un suivi psychologique car ce qu’elles ont vécu sur la route était très dur mais c’est très compliqué d’obtenir un rendez-vous psychologique pour des migrants. Nous, on fait ce qu’on peut mais ce n’est pas suffisant", juge Justine.

Hormis les permanences dans les centres, les équipes de GSF organisent des maraudes dans les camps de Calais et de Grande-Synthe. Les bénévoles sillonnent les campements à bord de leur "ambulance".

Chaque mois, GSF procède à un peu plus de 400 interventions dans la région. "Cela comprend des actes médicaux, des avortements, mais aussi des ateliers de prévention, des ateliers d’aides aux victimes…", expliquait en 2017 à InfoMigrants Richard Matis, vice-président de GSF.

L’année dernière, l’association a également ouvert un "refuge de mise à l’abri d’urgence" de six places. Les femmes sont hébergées dans un appartement pour deux ou trois jours, le temps de trouver une solution pérenne. GSF prévoit d’ouvrir un deuxième "refuge" l’an prochain pour héberger des exilées en attente de l’examen de leur demande d’asile.

*Le nom du centre a été volontairement caché à la demande des intervenantes

**Les prénoms ont été modifiés

 

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