Cornelius Castoriadis : un titan dans le labyrinthe (1922-1997)

Portrait de Cornelius Castoriadis le 28 septembre 1990 à Paris ©Getty - Ulf Andersen
Portrait de Cornelius Castoriadis le 28 septembre 1990 à Paris ©Getty - Ulf Andersen
Portrait de Cornelius Castoriadis le 28 septembre 1990 à Paris ©Getty - Ulf Andersen
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Penseur total et obstiné révolutionnaire, Cornelius Castoriadis a traversé loin de tout dogme les crises du 20ème siècle. Pour cet « Aristote en chaleur », ainsi nommé par Edgar Morin, précurseur sur bien des plans, un maître-mot : l’autonomie, pour chacun et pour tous.

Avec
  • Zoé Castoriadis
  • Sparta Castoriadis Pyschanalyste
  • Myrto Gondicas Traductrice du grec
  • Edgar Morin Philosophe et sociologue
  • Enrique Escobar Éditeur
  • Manuel Cervera-Marzal Sociologue et chercheur à l'Université de Liège et chercheur associé à l'EHESS
  • Florence Giust-Desprairies Psychosociologue clinicienne
  • Olivier Fressard Conservateur d'Etat des bibliothèques

Cornelius Castoriadis gagne actuellement une reconnaissance qu'il n'a pas eu de son vivant. C'était un personnage hors classe, Il était tout à la fois. il n'a jamais eu la reconnaissance des historiens, des philosophes, des économistes. C'était un intellectuel global, il veut penser l'ensemble du pensable. Il n'avait pas de frontières. Manuel Cervera Marzal

Corneille, Chaulieu, Cardan, Barjot, Delvaux, Marc Noiraud, Coudray… derrière ces pseudos, une œuvre kaléidoscopique, et une signature dans laquelle on se perd, Cornelius Castoriadis. Si la poésie de son nom demeure, son œuvre est moins connue, souvent dans l’ombre de ses contemporains, Guy Debord, Gilles Deleuze et autres Michel Foucault.

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La révolution, une phase révolutionnaire, c'est toujours la constitution d'organes autonomes des masses.  Cornelius Castoriadis

Né à Constantinople en 1922, mort à Paris en 1997, ce grec en marge plus qu'en exil, a traversé le vingtième siècle en prenant des chemins de traverse. Une pensée qui n’adhère pas à un parcours académique classique, une carrière tout en rebondissements : résistant trotskiste en Grèce jusqu’en 1946, fondateur du groupe révolutionnaire Socialisme ou Barbarie en 1948, économiste à l’OCDE jusqu’en 1970, philosophe, directeur d’études à l’EHESS en 1980, psychanalyste, mélomane par sa mère pianiste. Marxiste avec ou contre Marx, longtemps son engagement fut suspecté de contradiction voire d’échec ; il fallut du temps pour qu’apparaisse la cohérence d’une trajectoire qui se sédimente brique par brique.

Ce que j'estimais beaucoup dans l'action de Cornelius Castoriadis dans son groupe « Socialisme ou Barbarie », c'est qu'il était extrêmement lucide dans sa critique de l'Union Soviétique, une pensée qui allait beaucoup plus loin que celle de Trostki. Pour lui et Claude Lefort, c'était un Etat qui n'avait rien de socialiste, qu'ils appelaient alors bureaucratie. On était tout à fait en dehors des courants dominants dans le monde intellectuel de l'époque, ce qui a renforcé notre fraternité. Edgar Morin

N’appartenant à aucune discipline, ou plutôt à toute, il cherchait à penser l’ensemble du pensable, dans la filiation antique des penseurs grecs qui lui étaient chers. Un éclectisme qui lui valut cette reconnaissance difficile mais qui aujourd’hui nous interpelle plus que jamais, dans une période d’aspiration à la transdisciplinarité, où l’hyperspécialisation des savoirs reste très forte. Sa manière d'articuler individu et société, révolution et liberté, reste brûlante d’actualité.

Cornelius Castoriadis essaie de comprendre l’institution de la société à partir de l'homme. Indirectement il a contribué à ce que la question sociale soit beaucoup plus au cœur de la psyché dans le domaine de la psychanalyse. Florence Giust-Desprairies

Accomplissant lui-même l'autonomie qu'il souhaitait pour tous, ce démocrate plaça sa vie sous le signe de l’engagement, son œuvre sous le signe de la création. Dévorant la vie avec appétit, il ne fut pas qu’une pensée, et ses textes, sous la forme de fragments partant toujours de l’expérience et de l’actualité, révèlent encore aujourd’hui, à ceux qui le découvrent, le caractère malicieux, résolu, charismatique, de cet éternel bâtisseur de ponts.

Archive INA : Cornelius Castoriadis évoque un des souvenirs les plus heureux de sa vie, lié à la musique, après avoir écouté Michaël Levinas jouer le premier Prélude de Chopin au piano

Cornelius Castoriadis dans Le Bon Plaisir, de Katharina Bulow le 20 avril 1996 sur France Culture

3 min

Pour aller plus loin

Site de l’Association Cornelius Castoriadis, créée afin de contribuer à l’étude et à la diffusion de son oeuvre et de sa pensée. Présidée par Pierre Vidal-Naquet jusqu’à sa mort (juillet 2006), son actuel président est Vincent Descombes.

Fiche du fond Cornelius Castoriadis sur le site des archives de l'IMEC.

Abécédaire de Cornélius Castoraiadis de A comme autonomie à Z comme zapping, concocté par la revue Ballast.

La pensée politique de Cornélius Castoriadis : brochure mise en ligne sur le site Socialisme libertaire.

Le réveil des peuples et la fin du capitalisme : conférence de Castoriadis donnée à Buenos Aires en 1993 et à voir sur La chaîne qui libère, sur YouTube.

Retrouvez les livres de Cornelius Catsoriadis édités par les éditions du Sandre sur leur site officiel.

  • Avec : Zoé Castoriadis, son épouse et Sparta Castoriadis, fille de Castoriadis et psychanalyste ; Edgar Morin, ami, coauteur de Mai 68, la Brèche avec Claude Lefort en 1968, il surnomma Castoriadis « Titan de l’esprit » dans son épitaphe ; Enrique Escobar, éditeur de Castoriadis et ancien membre de Socialisme ou Barbarie ; Manuel Cervera Marzal, chercheur en sciences politiques, il a codirigé l’ouvrage Autonomie ou barbarie (éditions du passager clandestin), Myrto Gondicas, traductrice, Florence Giust-Desprairies, psychosociologue clinicienne et Olivier Fressard, philosophe.
  • Un documentaire de Clémence Mary, réalisé par Delphine Lemer. Lecture de Didier Brice. Prise de son : Yann Fressi et Georges Tho, mixage : Claire Levasseur. Recherches INA : Ani Lauzanna, ressources internet : Annelise Signoret de la Bibliothèque de Radio France.
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