Partager
Société

A Baltimore, la police rachète les armes pour endiguer la violence

réagir
Un homme montre quatre fusils à pompe qu'il compte revendre, le 17 décembre 2018 à Baltimore (Maryland)
Un homme montre quatre fusils à pompe qu'il compte revendre, le 17 décembre 2018 à Baltimore (Maryland)
AFP - Jim WATSON

"Pour moi, c'est Noël avant l'heure cette année", sourit Stanley, qui va revendre ses vieux revolvers à la police de Baltimore, une ville de la côte est des Etats-Unis gangrénée par la violence et le trafic de drogue.

Annoncée la semaine dernière par la maire Catherine Pugh, l'opération "rachat" vise à récupérer un maximum d'armes dans une des villes les plus violentes du pays avec près d'un homicide chaque jour, selon le quotidien Baltimore Sun.

Le chiffre de 300 meurtres devrait être atteint en 2018, pour la quatrième année consécutive. En 2015, cette ville de 600.000 habitants --dont 63% de Noirs-- avait connu de violentes émeutes après la mort de Freddie Gray, un jeune homme noir, dans un fourgon policier.

Le record date de 2017, avec 342 morts dont 299 par balle.

La collecte était organisée lundi dans un centre sportif d'Upton, un quartier défavorisé où les immeubles décrépis côtoient des logements sociaux et où au moins huit personnes ont été tuées par balle cette année.

Les Etats-Unis, premiers détenteurs d'armes à feu de petit calibre dans le monde en 2017 (AFP/Archives - Gal ROMA)
Les Etats-Unis, premiers détenteurs d'armes à feu de petit calibre dans le monde en 2017 (AFP/Archives - Gal ROMA)

La police a promis l'anonymat aux vendeurs, qui doivent être des habitants de Baltimore. Ils recevront 25 dollars pour un chargeur de grande capacité, 100 dollars pour une arme de poing ou un fusil, 200 dollars pour un fusil semi-automatique, et 500 pour un fusil automatique. Le vente se fait rapidement, et en liquide.

Stanley, venu de la banlieue de Washington en espérant que sa cargaison soit quand même acceptée, a apporté quatre chargeurs d'AR-15, un semi-automatique régulièrement utilisé dans les fusillades aux Etats-Unis, et quatre armes de poing dont une hors d'âge. Toutes ses armes sont inutilisables.

- "Ils n'auront pas celle-là" -

Un homme porte deux gros sacs contenant des fusils qu'il compte revendre, le 17 décembre 2018 à Baltimore (AFP/Archives - Jim WATSON)
Un homme porte deux gros sacs contenant des fusils qu'il compte revendre, le 17 décembre 2018 à Baltimore (AFP/Archives - Jim WATSON)

"J'espère en tirer au moins 700 dollars, pour acheter des cadeaux de Noël à mes trois enfants", explique-t-il à l'AFP, en attendant son tour. Il est très content du prix proposé pour les chargeurs, qu'il a achetés environ cinq dollars pièce.

Robert, un homme âgé au sourire édenté, apporte le seul fusil qu'il possède: un calibre .22 en état de marche enveloppé dans un sac poubelle. "J'ai été cambriolé et les voleurs m'ont pris une arme. La prochaine fois, ils n'auront pas celle-là", explique-t-il, ajoutant qu"il compte "faire du shopping" avec l'argent reçu.

Alors que les vendeurs se présentent de plus en plus nombreux, un trentenaire sort de son coffre un sac contenant plusieurs fusils semblant être en bon état.

L'homme, qui ne veut pas être identifié, affirme qu'il ne se sert plus de ses armes, entreposées dans sa cave. Il a choisi de les faire reprendre car il refuse de les vendre "à n'importe qui". Il espère en tirer un millier de dollars, qui serviront à rembourser sa voiture.

Le port d'armes est protégé par la Constitution des Etats-Unis et un tiers des foyers américains possède au moins une arme à feu. En 2017, près de 40.000 sont morts par balle dans le pays, un chiffre qui intègre les suicides, selon les autorités sanitaires.

La dernière opération de ce genre, en 2012, avait permis de récolter environ 250 armes, selon la police de Baltimore. "En fin de compte, ce sont les armes qui tuent les gens et nous voulons que nos rues en soient débarrassées", a assuré Gary Tuggle, chef de la police de Baltimore, la semaine dernière.

- Un succès -

La mairie de Baltimore a lancé une opération de rachat des armes à feu (AFP/Archives - Jim WATSON)
La mairie de Baltimore a lancé une opération de rachat des armes à feu (AFP/Archives - Jim WATSON)

A Upton, les opinions sont partagées. Robert, assure que "c'est bon pour la communauté, c'est bien qu'il y ait moins d'armes dans les rues".

Un jeune noir, qui souhaite lui aussi rester anonyme, estime au contraire que "ça ne va rien changer. Ce ne sont pas les criminels qui revendent leurs armes".

Stanley est du même avis: "Je ne vois pas de membre de gang dans le coin, la police va juste récolter les armes de citoyens qui obéissent aux lois et qui veulent se faire un peu d'argent".

"Toute cette opération, c'est du gaspillage", ajoute-t-il, estimant que la police "donne de l'argent à ceux qui n'en ont pas vraiment besoin".

Pour faire baisser la criminalité, la municipalité devrait se concentrer sur le développement économique, l'éducation, augmenter les forces de police et accroître la répression des criminels dangereux, pense-t-il.

Pour la police, l'opération qui doit durer jusqu'à vendredi est toutefois un succès: 580 armes ont été récupérées en une seule journée.

Commenter Commenter

Centre de préférence
de vos alertes infos

Vos préférences ont bien été enregistrées.

Si vous souhaitez modifier vos centres d'intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.

Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?

Je souhaite TOUT savoir de l’actualité et je veux recevoir chaque alerte

Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

Entreprise
Politique
Économie
Automobile
Monde
Je ne souhaite plus recevoir de notifications