Michel Cymes : « Nos gamins qui ne bougent pas sont les malades de demain »

VIDÉO. Le médecin-animateur estime avoir « rendu la santé plus sympathique aux Français ». Il veut lutter contre l'inactivité des gens et les anti-vaccins.

Propos recueillis par

Temps de lecture : 11 min


Tout ce que touche Michel Cymes se transforme en or : télévision, radio, conférences, livres en librairie, magazines en kiosque… Le médecin, ex-chroniqueur de Télématin et fondateur du Magazine de la santé – qu'il a quitté en fin de saison dernière –, vient d'être consacré une nouvelle fois animateur préféré des Français dans le baromètre de TV Magazine. Sur RTL, sa chronique quotidienne dans la matinale d'Yves Calvi (8 h 15) et son émission hebdomadaire Ça va beaucoup mieux : l'hebdo le dimanche (9 h 15) cartonnent avec des audiences à faire pâlir d'envie les stations concurrentes*.

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À la télé, Michel Cymes enchaîne les émissions – Les Incroyables Pouvoirs du corps humain avec Adriana Karembeu, et Ça ne sortira pas d'ici, dont les deux premiers épisodes ont bien marché – et il joue même à l'acteur, là encore avec succès. Le téléfilm Meurtres en pays d'Oléron, où il incarnait un médecin légiste, a séduit 5,2 millions de Français, permettant à France 3 de talonner TF1 un soir de mars 2018. Il donne aussi des conférences et a lancé il y a plus d'un an une revue à son effigie : Dr. Good, le lancement le plus réussi dans la presse écrite depuis 10 ans avec plus de 200 000 exemplaires vendus par numéro. Last but not least, Michel Cymes est toujours médecin spécialiste dans un hôpital parisien. Le Point lui a demandé une consultation pour parler santé et médias.

Le Point : Que représente le fait d'être l'animateur préféré des Français ?

Michel Cymes : La première fois, j'ai pensé que les gens avaient dû se gourer, que je n'étais pas animateur mais médecin, ce que d'ailleurs mon ami Nagui s'est chargé de rappeler. L'enfoiré (rires) ! Plus sérieusement, plus je suis élu animateur préféré des Français, plus je sens l'importance de ce que je dis en matière de santé publique. C'est un extraordinaire tremplin pour faire passer des messages de santé publique. Je viens de rentrer au conseil d'administration de Paris 2024 pour être une sorte « d'ambassadeur santé » des JO, je travaille avec un comité d'experts. Le fait d'avoir l'oreille des Français va me permettre de tenter de les faire sortir de la sédentarité et de les rendre plus actifs.

Lire aussi Michel Cymes animateur préféré des Français, Hanouna dernier de la classe

Quelles causes pensez-vous avoir fait avancer en matière de santé publique ?

Je pense avoir réussi à détendre le propos, à rendre le discours plus digeste. J'ai rendu la santé un peu plus sympathique aux Français, notamment à ceux qui étaient un peu hypocondriaques ou hyper angoissés, la santé étant un domaine compliqué qui inquiète. J'ai vulgarisé la santé de façon souriante pour que les Français puissent comprendre les enjeux. Le manque de vulgarisation dans tous les domaines est un énorme problème, notamment en politique et en économie. Si vous ne vulgarisez pas dans tous les domaines, les Français ne comprennent pas les enjeux. Et aujourd'hui, en politique, le discours est difficilement compréhensible et donc difficilement acceptable.

Sur quels sujets évaluez-vous votre apport ?

Il y a d'abord la vaccination, je suis en première ligne face aux snipers anti-vaccins.

La bataille est-elle gagnée ?

Non, rien n'est réglé, il y a toujours des fake news et de la désinformation. C'est un peu de notre faute à nous, aux médecins et aux autorités. Comme les politiques qui n'ont pas vu arriver les Gilets jaunes, nous n'avons pas vu arriver les anti-vaccins. On a cru que cela était un épiphénomène qui allait passer. Il fallait contrer toutes les fausses infos plus tôt et expliquer pourquoi on était obligés de rendre 11 vaccins obligatoires (coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C., diphtérie, tétanos, poliomyélite, NDLR). C'est ce qu'a désormais fait la ministre de la Santé Agnès Buzyn. On a vu avec les épidémies de rougeole que les vaccins ne sont pas suffisamment faits. Prenez la grippe. Peu de personnel soignant est vacciné alors qu'on côtoie toute la journée des personnes malades, donc fragiles. À un moment, quand les gens ne comprennent pas, il faut rendre la vaccination obligatoire. Cela fera gueuler tout le monde, mais c'est nécessaire.

Vous souhaitez aussi lutter contre l'inactivité des Français...

Oui, la sédentarité des Français est une catastrophe aujourd'hui. Les enfants d'aujourd'hui seront les malades de demain. Il y a des enfants qui développent des maladies d'adulte comme le surpoids, le diabète, les problèmes cardiovasculaires qui, normalement, arrivent chez les adultes vers 50 ans. Les gamins ont une capacité cardiovasculaire réduite par rapport à celle des années 70. Ils ne bougent pas. La faute aux tablettes, aux parents qui ne sont plus des modèles et à l'école où il n'y a pas assez de sport. Nous allons essayer de casser les courbes d'inactivité d'ici à 2024. Il ne faut pas seulement dire « il faut bouger », mais aussi « cela va vous permettre d'augmenter votre espérance de vie, de retarder une maladie comme Alzheimer ou encore les risques d'avoir un cancer ».

Vous parlez aussi souvent alimentation...

Oui, car il y a un mot que les gens doivent faire entrer dans leur cerveau, c'est le mot « équilibre », plutôt que le mot régime. Il faut équilibrer notre alimentation. On peut faire des excès, j'en fais d'ailleurs, mais le lendemain il faut faire gaffe. Si je mange un soir une côte de bœuf sauce béarnaise avec des frites, ensuite soit je fais plus de sport, soit je ne bois pas pendant deux jours.

Quid des effets du réchauffement climatique sur la santé  ?

Les effets du réchauffement climatique ne sont pas avérés sur notre organisme lui-même, car les variations de température ne sont pas si importantes pour que notre thermostat perde la boule. Ce sont nos enfants qui vont souffrir du réchauffement climatique plus que nous. Les effets concrets aujourd'hui sont l'arrivée de maladies et de moustiques, notamment tigres, dans le sud de la France. Nous assistons à une remontée vers le nord de maladies qui touchaient surtout les pays africains et du Sud. Il y a aussi une pollution augmentée l'été et une agressivité des pollens presque toute l'année.

Vous sentez-vous investi d'une mission de service public ?

(Rires) Euh, non, cela fait un peu « messie », même si c'est vrai que c'est mon nom à l'envers : Cymes-MesCy (rires). Non, je ne suis qu'un élément important des messages de santé publique. Les gens me font confiance et m'écoutent.

Cela oblige à faire très attention à ce que vous dites...

Oui, très. J'essaie de ne pas me prononcer sur tout ou n'importe quoi. Je ne dis rien sans vérifier.

Vous avez une vie professionnelle très chargée, ne risquez-vous pas le « burn-out » ?

J'ai déjà frôlé le burn-out il y a quelques années. J'avais un crabe de stress qui me bouffait le ventre. Je suis allé voir une amie psychologue qui m'a aidé. Aujourd'hui, j'ai freiné, je limite notamment les interviews. Je travaille sur beaucoup de supports, mais c'est monothématique : la santé. Et étant médecin, j'ai déjà les connaissances, que j'entretiens. Je n'ai pas l'impression de bosser comme un dingue. J'ai une vie normale et je coupe les soirs et les week-ends.

«  Les réseaux sociaux sont le cancer de la société de demain »


RTL Ca va beaucoup mieux l'Hebdo F BUKAJLO 30 08 18 © Frederic BUKAJLO/SIPA PRESS/RTL

L'émission Ca va beaucoup mieux l'hebdo le dimanche à 9h15 cartonne sur RTL.

© Frederic BUKAJLO/SIPA PRESS/RTL

En radio, vous êtes passé par Franceinfo, Europe 1, et vous avez choisi RTL depuis 2016. Pourquoi ?

Car c'est un grand honneur de travailler dans la matinale d'Yves Calvi. J'aime son humilité, sa modestie. Et Jacques Esnous, le directeur de l'information sur RTL, est un très bon ami. Cette station m'a proposé une case pour faire une émission hebdomadaire santé, il y avait longtemps que j'avais envie de faire une émission avec une bande de potes sur le feelgood tout en se marrant. Mon but n'est pas de travailler plus, mais de travailler en m'amusant.

Vous avez quitté Twitter en 2017. Allez-vous y revenir  ?

Quand vous avez un compte sur un réseau social, vous ouvrez la porte de chez vous. Vous laissez entrer des gens et beaucoup d'entre eux cassent la vaisselle. Les réseaux sociaux sont le cancer de la société de demain. On l'a vu avec le complotisme et les fausses informations chez les Gilets jaunes. Il peut y avoir une révolution et une guerre à cause des réseaux. Il y a aussi un effet silo, les algorithmes font que vous n'avez de contact et de réactions qu'avec des gens qui pensent la même chose que vous. J'aimais parler sur les réseaux sociaux, notamment évoquer sur le PSG dont je suis supporteur. J'avais 250 000 followers et 99 % d'entre eux étaient sympas. Mais quand vous commencez à recevoir des tweets de fachos, des menaces, les anti-vaccins qui vous accusent de parler d'un vaccin, car vous êtes payé par un labo..., cela vous mine. Et c'est chronophage. Mes enfants m'ont ouvert un compte Instagram, mais je ne m'en sers pas. Je suis plus serein depuis que j'ai arrêté les réseaux sociaux.

Votre magazine Dr Good marche très bien. Comment l'expliquez-vous ?

Le succès de Dr Good vient du fait qu'il fait plutôt dans la prévention de manière souriante. Le dernier numéro s'est vendu à 240 000 exemplaires. Quand j'ai commencé en 1990 sur France info, il n'y avait pas autant d'articles sur la santé. Aujourd'hui, les gens demandent à comprendre et à apprendre car ils ont compris qu'il fallait se prendre en charge. C'est ce que j'essaie de faire avec mon nouveau talk-show Ça ne sortira pas d'ici sur France 2, avec qui je négocie pour continuer.

Pourquoi avoir arrêté la présentation du Magazine de la santé, qui a contribué à votre réputation ?

Cela faisait deux ans que je voulais arrêter, j'en avais marre tout simplement.

Avez-vous pris goût à jouer la comédie ?

Cela m'a tellement plu. Cela faisait vingt ans que j'avais envie d'essayer. J'ai ici le scénario d'un téléfilm pour le service public en cours de négociation. Pour le théâtre, je me suis bloqué une semaine, car j'ai commencé à écrire avec des potes une pièce et j'espère bien la terminer et la jouer un jour.

Et vous avez encore le temps d'être médecin !

Oui, je suis médecin spécialiste dans un hôpital parisien deux matinées par semaine. Et je serai à la retraite dans 4 ans (rires) !

Vous sentez-vous le représentant des médecins ?

Non. J'ai une bonne cote avec le corps médical, car j'évite de raconter des bêtises. Mais je ne représente rien. En revanche, si on me parle d'obligation d'installation des médecins dans des zones désertiques, je suis contre : on ne peut pas obliger un étudiant en médecine à s'installer au fin fond de la campagne.

Et sur la question actuelle du remboursement de certains traitements homéopathiques ?

Je n'ai plus d'opposition tranchée sur les médecines complémentaires. Quand j'étais plus jeune médecin, j'avais des boutons quand un patient me disait qu'il avait pris des granules ou qu'il allait voir des personnes de la « médecine parallèle », comme on l'appelait. Aujourd'hui, je les encourage à y aller quand ils trouvent un soulagement avec ces médecines. Le problème du remboursement de l'homéopathie est tellement complexe que je n'aimerais pas être à la place du gouvernement. Cela peut faire faire des économies à la Sécurité sociale si les personnes qui prennent des granules au lieu de médicaments plus chers remboursés par la Sécu sont raisonnables. Le problème de l'homéopathie, comme de toutes les médecines complémentaires, ce sont les ayatollahs. J'ai vu des gens qui soignaient leurs gamins avec de l'homéopathie alors qu'il fallait les mettre sous antibiotiques. Il peut y avoir des conséquences catastrophiques à faire cela. L'homéopathie, l'acuponcture, l'hypnose ou l'ostéopathie en tant que médecine complémentaire, c'est possible. Mais je dis bien « complémentaire », qui se complète, pas en « parallèle » de la médecine, car les parallèles ne se touchent pas.

Lire aussi Homéopathie, anti-vaccins..., le coup de gueule d'un médecin contre « le charlatanisme »

Santé, alimentation... Notre société n'est-elle pas devenue obsessionnelle sur ces sujets ?

Il y a une frontière pas toujours évidente entre la prévention et l'intérêt pour la santé d'un côté, et l'obsession pour la santé de l'autre. On risque de basculer dans une hypocondrie ambiante qui est malsaine. S'intéresser beaucoup plus à la santé qu'avant, cela permet de prolonger son espérance de vie.

Un dernier mot sur la célébrité. A-t-elle plus d'avantages que d'inconvénients ?

Quand je fais des courses tranquillement avec mes enfants, les gens veulent faire des photos. Mes enfants ont pris l'habitude : ils s'éloignent. En général, on dit « Bonjour docteur », cela met une distance respectueuse. L'inconvénient principal est de ne pas avoir de sas de décompression dans sa vie privée. Je refuse d'exposer ma vie privée ou encore d'être suivi à l'hôpital, j'ai toujours dit non à Paris Match ou Gala. La seule exception, cela a été pour mon livre Hippocrate aux enfers, les médecins des camps de la mort (éd. Stock). Quant aux avantages, la célébrité m'a permis de rencontrer mes idoles comme Michel Polnareff, dont j'ai vu tous les concerts. Ou encore Thierry Lhermitte ou Christian Clavier. Et dire qu'en 1977, le spectacle du Splendid Amours, coquillages et crustacés fut ma seule sortie durant mon année de médecine ! Avec la célébrité, on me laisse aussi entrer dans des boîtes de nuit desquelles j'étais refoulé quand j'étais plus jeune (rires) !

* Selon Médiamétrie et RTL, l'émission du dimanche « Ça va beaucoup mieux, l'hebdo » est leader, avec 1 952 000 auditeurs en contact avec la station (soit + 292 000 auditeurs et + 18 % sur un an). Elle affiche 17,4 % de part d'audience (soit + 4 % sur un an).

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Commentaires (87)

  • Christine Robert

    Interdire les RS, couper Internet... Mais alors, que faites-vous ici ?

  • Christine Robert

    Je ne sais pourquoi ce type me fait l'effet d'un gourou, avec ses certitudes bien assenées, pas toujours justifiées.

    Il est parfaitement dans la mouvance "Je vais vous dire ce qu'il faut en penser", ces nouveaux gourous, spécialistes, experts, voire journalistes, ayant la prétention d'éduquer le bas peuple, voire de le formater.

    Je ne sais pourquoi, ça me fait un effet vaguement soviétique.

  • Le Maréchal

    Il a tout dit.
    interdire lérézososio et couper toute cette merde de Internet.
    ca se mérite.