Policiers pris à partie sur les Champs-Elysées : ce qu’il s’est vraiment passé

Le journaliste qui a filmé l’intégralité de la scène nous raconte l’affrontement. Une enquête a été ouverte pour violences volontaires.

    C'est la scène qui tourne en boucle sur les chaînes d'infos et les réseaux sociaux depuis samedi, en fin d'après-midi. Des policiers très violemment pris à partie par des Gilets jaunes, au point même que l'un d'entre eux a dû sortir son arme de poing. Echappant de peu au lynchage, les fonctionnaires ont porté plainte, et une enquête a été ouverte, a confié au Parisien le parquet de Paris, confirmant une information de RTL.

    Comment a été filmée et diffusée la scène en question ?

    L'affrontement a eu lieu vers 17h20, à l'angle de l'avenue George V et des Champs-Elysées. Il a été filmé par plusieurs caméras et diffusée sur plusieurs canaux. Les premières séquences ont été diffusées rapidement sur Twitter, par Stéphanie Roy, collaboratrice de l'agence Line Press, et Clément Lanot, journaliste indépendant, puis, quelques minutes plus tard, sur BFMTV. Les séquences ne démarrent pas toutes à la même seconde.

    C'est la vidéo de BFMTV qui démarre le plus tôt (à voir ici ) : on voit d'abord un motard de la police nationale, frappé par un manifestant, tomber de sa moto. Ses collègues descendent de la leur et écartent les perturbateurs à coups de pied et de lacrymo. Des projectiles, dont des trottinettes, volent dans la direction des policiers.

    C'est là que s'ouvrent, à quelques secondes d'écart, les séquences diffusées très rapidement par Stéphanie Roy (à voir ci-dessous) et Clément Lanot (à voir ici ) : pendant que son collègue tente de relever sa moto, l'un des fonctionnaires sort brièvement son arme de poing pour le couvrir. Le troisième policier, qui venait d'enfourcher sa moto, est à ce moment-là jeté à terre lui aussi. Il finit par l'abandonner et monte sur celle de son collègue, les deux parvenant à quitter les lieux au moment où une pluie de projectiles s'abat sur eux.

    Stéphanie Roy a diffusé dans la foulée la vidéo des policiers venant, quelques minutes plus tard, récupérer la moto abandonnée. La préfecture a depuis précisé que cette dernière était endommagée.

    Que s'est-il passé juste avant cette scène ?

    Il faudra attendre que Clément Lanot publie vers 21h30 une version longue de la scène, pour le savoir : quelques secondes avant d'être pris à partie, l'un des policiers lance une grenade, a priori assourdissante, contre le cortège qui défile devant lui sur les Champs-Elysées.

    Ce dimanche, à 14 heures, Stéphanie Roy a elle aussi publié sur Twitter une version longue de son reportage, dans laquelle on voit les policiers, au nombre de quatre, jeter au moins trois grenades.

    Ces tirs de grenade étaient-ils justifiés ?

    La question se pose alors que sur les deux versions longues, la foule n'a pas l'air totalement hostile au moment où les policiers prennent cette décision. Interrogé par Le Parisien, Clément Lanot explique que la situation était pourtant déjà « très tendue » à cet endroit. « Il y avait eu des tirs des lacrymos juste avant, c'est pour ça que je me suis dirigé dans cette direction. J'ai alors vu ces motards prendre position au bout de l'avenue Georges V, comme pour bloquer d'éventuels manifestants qui désireraient sortir du cortège, c'était un peu ridicule vu leur nombre, j'ai senti que ça allait mal se passer », dit-il. « Ça ne se voit pas à l'image, mais il n'y avait pas que des Gilets jaunes, derrière moi, il y avait des individus cagoulés, vêtus de noir ». « Après, je suis bien incapable de dire si les tirs de grenade étaient justifiés », ajoute-t-il.

    Pourquoi avoir attendu avant de publier la version complète ?

    L'explication est simple, et tient tout simplement de la réalité du terrain. « Je filmais avec ma caméra, mais quand la situation a vraiment dégénéré, j'ai également sorti mon portable pour filmer l'affrontement dans le but de pouvoir la diffuser rapidement. Le réseau était pourri mais j'ai pu poster cette première version, qui démarre juste avant que l'un des policiers ne sorte son arme, moins de dix minutes après la scène. Ensuite, je suis resté encore un peu sur les Champs, puis je suis rentré chez moi pour dérusher mes images caméras, ce que je ne pouvais pas faire directement sur le terrain. »

    Voilà pourquoi la version longue n'a été publiée qu'à 21h30, n'en déplaise à tous ceux qui crient depuis samedi soir au complot, affirmant que la séquence incomplète a été volontairement coupée au montage.

    Ci-dessous, notre montage de l'intégralité de la scène.

    Policiers pris à partie sur les Champs : ce qu'il s'est passé

    L'enquête, confiée au premier DPJ de Paris, a été ouverte pour violences volontaires avec armes commises en réunion sur personnes dépositaires de l'autorité publique, et dégradation de biens publics. Samedi soir, la préfecture indiquait toutefois qu'aucune interpellation n'avait eu lieu dans la foulée de l'accrochage.