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Animaux marins

La reprise de la chasse à la baleine par le Japon pourrait être une bonne chose selon des ONG

Plusieurs associations se sont exprimées après le retrait du Japon de la Commission Baleinière Internationale et l'annonce de son intention de reprendre la chasse à la baleine. Selon elles, cette décision pourrait avoir des conséquences positives pour la protection des baleines.

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Le navire Bob Barker de Sea Shepherd intervient auprès d'un baleinier japonais, le 25 février 2013.

Le navire Bob Barker de Sea Shepherd intervient auprès d'un baleinier japonais, le 25 février 2013.

© Institute of Cetacean Research / AFP

Le Japon, comme il menaçait de le faire depuis des années, a annoncé le 26 décembre 2018 son retrait de la Commission baleinière internationale (CBI) dans le but de reprendre la chasse commerciale, mais cette décision pourrait paradoxalement apaiser les tensions sur le sujet. Considérant la chasse à la baleine comme un héritage culturel, le Japon ne l'a jamais tout à fait abandonnée : il utilise en effet une faille du moratoire mis en place en 1986 par la CBI, qui autorise la pratique pour des recherches scientifiques. Une provocation aux yeux de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, indignées par les expéditions nippones annuelles dans l'Antarctique dont les eaux constituent pour ces deux pays et pour les défenseurs des animaux un sanctuaire pour cétacés.

Une décision accueillie favorablement par les associations de protection de la nature

En charge de la conservation du milieu marin au sein du Fonds international pour la protection des animaux (IFAW), Patrick Ramage voit dans l'annonce du 26 décembre 2018 (le retrait du Japon de la Commission Baleinière Internationale ou CBI), qui peut être perçue au premier abord comme un acte de défiance, une "solution élégamment japonaise" à cette hypocrisie. "Cela offre une porte de sortie acceptable à la chasse à la baleine en haute mer", estime-t-il. "Il est difficile d'y voir autre chose qu'une bonne nouvelle pour les baleines et la commission établie pour les suivre et les protéger". Tokyo a assuré qu'il s'abstiendrait d'aller chasser "dans les eaux de l'Antarctique ou dans l'hémisphère Sud", limitant sa pêche "aux eaux territoriales et à la zone économique exclusive", en accord avec les quotas de la CBI, "afin de ne pas épuiser les ressources". Pour M. Ramage, la Commission - au sein de laquelle le Japon n'aura plus qu'un statut d'observateur - pourra ainsi "aller au-delà d'un débat disproportionné et déformé sur la chasse à la baleine" et mieux se concentrer sur d'autres menaces, comme le changement climatique, la pollution plastique des océans ou les collisions avec les bateaux. L'ONG Sea Shepherd, habituée à traquer les baleiniers, a elle aussi crié victoire après l'annonce japonaise, "ravie de voir la chasse prendre fin dans le sanctuaire baleinier antarctique".

 

 

"L'astuce consistant à se faire passer pour des chercheurs va désormais être abandonnée et cela signifie qu'il n'y aura plus aucune justification pour chasser les baleines dans un sanctuaire baleinier international. Nous assistons à la dernière campagne de chasse japonaise dans en Antarctique", explique l'ONG dans un communiqué. "L'objectif de Sea Shepherd de mettre un terme à la chasse dans le sanctuaire baleinier antarctique a été atteint", s'enthousiasme-t-elle. Elle espère également que le retrait du Japon permettra à la CBI de voter une motion pour établir un sanctuaire dans l'Atlantique Sud protégeant ainsi tout l'hémisphère sud.

La chasse à la baleine : un chemin pavé d'embûches pour le Japon

La chasse à la baleine constitue pour Tokyo un rare point de contentieux avec ses habituels alliés occidentaux. Bien que la viande de baleine soit très peu consommée de nos jours dans le pays, le Japon y voit une question de principe pour la puissante industrie de la pêche et les villes portuaires comme Shimonoseki, d'où vient le Premier ministre conservateur Shinzo Abe. Mais les baleiniers nippons doivent faire face, en plus de ceux posés par la CBI, à de sérieux obstacles. Le Nisshin Maru, seul navire-usine baleinier encore en activité dans le monde, a 31 ans et doit être remplacé. Le Japon a perdu en 2014 devant la Cour internationale de justice un procès intenté par l'Australie, qui rejette le caractère scientifique de ses expéditions. Et la Convention internationale sur le commerce d'espèces sauvages menacées d'extinction (Cites) lui a adressé en octobre 2018 un avertissement pour ses cargaisons de rorquals boréals, attrapés en haute mer. En ne chassant plus qu'au large de ses côtes à partir de juillet 2019, le pays du Soleil levant devrait privilégier les petites baleines de Minke, parmi les rares cétacés à ne pas être considérés en danger d'extinction.

La principale menace pour les baleines n'est pas la chasse

Basée à Cambridge (Royaume-Uni), la CBI a vu le jour au lendemain de la Seconde Guerre mondiale afin d'assurer un approvisionnement en nourriture à un Japon affamé, et, avec moins de succès, de contenir la prolifique et dévastatrice chasse à la baleine menée par l'Union soviétique. A la suite du vote du moratoire de 1986 interdisant la pratique, Tokyo a tenté de s'entourer d'alliés au sein de la Commission --souvent des petits pays en voie de développement sans tradition baleinière-- mais a constamment échoué à fédérer la majorité des deux-tiers dont il avait besoin. Enseignant à l'Institut universitaire technologique de l'Ontario, Peter Stoett a écrit un livre sur la CBI, l'un des premiers exemples de diplomatie environnementale internationale. Le retrait du Japon marque inévitablement, selon lui, un coup d'arrêt pour l'organisation - au sein de laquelle siègent toujours la Norvège et l'Islande, autres pays baleiniers -, mais il considère qu'il pourrait lui permettre de réorienter ses priorités. "Aussi triste que cela puisse sembler, la principale menace posée aujourd'hui aux cétacés ne vient pas des harpons", souligne-t-il. "Leur extinction pourrait se produire, mais parce que les océans seront trop chauds pour maintenir l'écosystème dont ils ont besoin".

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