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Par Virginie Mayet
Publié le 03 janvier 2019 à 15h11
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Fin décembre, Caroline Courtaud, représentante des parents délèves à la Souterraine, s'est empressée d'écrire une lettre au Père-Noël, en se mettant dans la peau de la petite Gabrielle, qui est scolarisée à l'école Fossé des canards avec son fils et risque d'être expulsée dans les jours à venir avec sa famille congolaise.
« Ils sont tellement bien intégrés que je ne connaissais pas leur situation, raconte Caroline Courtaud qui s’empresse, dès qu’elle l’apprend, de rencontrer la famille qui est hébergée par Traces de pas, à La Souterraine. Elle a l'idée de rédiger une lettre qui raconte leur histoire.
La lettre a également touché le maire de La Souterraine qui les a reçus mercredi et leur a promis de la faire suivre à la Préfète de la Creuse, Magali Debatte. Cette lettre résume l'histoire de cette famille qui souhaite rester vivre en Creuse. Est-ce que les mots suffiront à changer la situation ?
V. Mayet
Cher Père-Noël,
Je m’appelle Gabrielle et j’ai deux ans passés de quelques mois. Je suis à l’école Fossé des Canards à La Souterraine depuis la rentrée de septembre et Maîtresse Pascale dit que je suis très mignonne et toujours souriante.
Mais toute la journée, pendant que je m’épanouis avec mes camarades, ma Maman, elle, pleure. En effet, toute notre petite famille a reçu une Obligation de Quitter le Territoire Français.
Mon papa est très courageux ; il a quitté son pays, la République Démocratique du Congo le 4 juin 2012. Le contexte politique là-bas était devenu trop dangereux pour lui. Lui et ma grand-mère ont été torturés et la seule solution, c’était de fuir. Il a donc pris un avion vers un inconnu qui ne pouvait être que meilleur. Arrivé à Paris, mon papa est tombé en dépression, le déracinement ajouté à toutes les violences subies ne pouvait avoir qu’un effet néfaste, même sur la plus courageuse des personnes. Sa demande d’asile effectuée en 2013 a été déboutée en 2015 ; il a reçu sa première Obligation de Quitter le Territoire Français.
C’est à ce moment-là qu’il a rencontré ma Maman qui est aussi congolaise. Sa demande d’asile à elle a aussi été déboutée. Malgré tous ces événements, la vie a triomphé et je suis née à Paris, France. Mais je ne suis pas française. Maman et moi avons été recueillies dans un foyer à Guéret car elle a des soucis de santé et Papa venait dès qu’il le pouvait nous rendre visite. Il a réussi à être hébergé grâce à l’Eglise Catholique de Guéret, mais aussi grâce au 115.
En 2018, ma propre demande d’asile a aussi été refusée. Mes parents sont très inquiets car l’excision est une pratique très courante dans notre pays d’origine. Je ne comprends pas ce mot, mais je peux voir l’effroi dans le regard de mes parents lorsqu’ils l’évoquent.
Mon petit frère Jophiel Raphaël est né il y a deux mois à Guéret et nous vivons à Traces de Pas à La Souterraine. Grâce au soutien de cette association, du maire de notre ville Jean-François Muguay, et du curé de l’église catholique, nous nous sentons un peu entourés.
Mes parents m’apprennent le sourire et le respect des autres, ils font partie de l’association des parents d’élèves de l’école et Maman a préparé des beignets de bananes pour notre marché d’automne. Je joue à la coiffeuse et à la dînette avec mes camarades de classe.
Père-Noël, crois-tu que j’aurais la chance de rester avec eux ? Aurais-je le bonheur d’avoir une instruction due à tout enfant en France ? Peux-tu effacer les larmes de Maman ? Peux-tu permettre à Papa d’avoir une situation en règle afin d’avoir enfin droit à une vie normale, avec un foyer, un travail et une vie sociale sereine ?
Je compte sur toi, merci beaucoup.
Gabrielle
PS : Père-Noël, les représentants des parents d’élèves de mon école me soufflent qu’ils ont les mêmes souhaits que moi…
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