C’est assez rare pour être signalé : la dissolution volontaire et la liquidation d’un fonds commun de placement, le FCP Stock-Picking France, avec un agrément de l’Autorité des marchés financiers (AMF) obtenu fin octobre. Peu connu du grand public, ce fonds existait depuis avril 1991. La société de gestion Jousse-Morillon (les deux fondateurs), moins médiatiques que les Carmignac et autres Financière de l’Echiquier ou Richelieu Finance lancés à la même époque, avait elle aussi fait de la gestion de conviction spécialisée dans les petites et moyennes valeurs françaises un mantra. Mais en revendiquant un modèle de véritables « artisans de la gestion », qui privilégient les performances et non la progression des encours : aucune publicité, pas d’interviews des gérants dans la presse.
Grâce à ses performances remarquables (le fonds affiche une rentabilité annuelle moyenne de plus de 11% depuis 1991, contre 7,35% pour l’indice Cac All-Tradable net), l’encours a atteint les 250 millions d’euros. Début 2017, le fonds avait été fermé aux nouvelles souscriptions, car faute de nouvelles idées pour investir, il disposait de trop de liquidités. Les gérants ont donc décidé cette année de terminer une aventure commencée il y a 27 ans et de passer à autre chose.
Indépendants jusqu’au bout
Là encore, le processus a été plutôt inhabituel : plutôt que de vendre leur fonds à une autre société de gestion pour encaisser un pactole au passage, les fondateurs ont opté pour une fermeture pure et simple : « En l'absence de solution alternative totalement satisfaisante, la dissolution du Fonds est apparue comme la meilleure façon de préserver les intérêts de tous les porteurs et leur égalité de traitement », explique sobrement la société dans une lettre à ses clients. En clair, les actifs du fonds sont gelés jusqu’au 30 avril 2019, le temps de liquider le portefeuille jusqu’après la publication des résultats des entreprises, une période pendant laquelle la liquidité des petites capitalisations est traditionnellement plus forte.
Et comme c’était le seul fonds géré par Jousse-Morillon, la société fermera ensuite ses portes. Si cette procédure est très rare en France, elle est plus fréquente dans le monde anglo-saxon, où les gérants stars remboursent leurs clients quand ils prennent leur retraite ou changent de vie. Les clients de Stock-Picking , principalement des investisseurs institutionnels et de grandes fortunes, devront donc réinvestir tout seuls les sommes rendues par leur société de gestion. Bonne nouvelle pour eux, les petites sociétés de gestion françaises ne manquent pas, mais parmi les 600 acteurs (dont 2/3 d’indépendants), il faudra trouver celles qui parviendront à leur donner d’aussi bons résultats.