Le nouveau rapport Euro-Péristat coordonné par l’Inserm*, publié fin novembre 2018, n’est pas très glorieux pour la France. Avec 2,4 décès au cours du 1er mois pour mille naissance, elle n’occupe en effet que la 23ème place en terme de mortalité néonatale sur les 31 pays européens dont les statistiques ont été analysées. Ce chiffre est resté stable depuis 2005 dans l’Hexagone, alors qu’une tendance à la baisse est observée dans les autres pays. Le taux d’enfants mort-nés (mortinatalité) atteint également un niveau élevé : 3 pour mille naissances, après exclusion des interruptions médicales de grossesse, ce qui nous place au 21ème rang.

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Pourquoi la situation est-elle si peu brillante alors qu’il n’y a pas davantage de prématurés ? Certes les patientes sont plus âgées aujourd’hui qu’auparavant (20,6% de femmes de plus de 35 ans), mais il en est de même dans toute l’Europe. Et la consommation de tabac pendant la grossesse n’a pas reculé en France contrairement à celle des autres États, mais elle ne s’est pas accrue non plus. 

Un manque évident de personnel

Il suffit d’écouter les professionnels de santé sur le terrain pour se rendre compte de leur épuisement et de leur désarroi. "Nous manquons tous de forces vives lorsqu’on accueille les femmes pour des activités non-programmées : urgence, pré-travail, accouchements, bloc opératoire pour les césariennes imprévues et réanimation néonatale", déplore le Pr François Goffinet, chef du service maternité de l’hôpital Port-Royal et directeur du département "Risques et grossesse" de l’université Paris Descartes. La fermeture de nombreuses "petites maternités" –environ 200 - ne s’est pas accompagnée du transfert des effectifs soignants, alors que les femmes se sont reportées sur les maternités restantes.

En 20 ans, l’obstétrique a ainsi perdu 40% de son personnel. "Aucune autre discipline médicale n’a connu une telle hémorragie, constate François Goffinet. La fusion des maternités de Saint-Vincent de Paul et de Port Royal s‘est par exemple soldée par une chute de 30 à 40% du personnel, alors que nous réalisons le même nombre d’accouchement que les deux maternités réunies."

Résultat : les femmes ne sont pas toujours accompagnées comme elles le devraient et la qualité des soins n’est pas tous les jours optimale. Certains ont le sentiment de mettre parfois les mères et les bébés en danger, et de passer pas loin de la catastrophe. Si les hommes accouchaient aussi, on ne serait certainement jamais arrivés à un tel point critique.

Des maternités qui ferment, une spécialité qui n'attire plus

Une maternité qui réalise entre 3000 et 4500 accouchements par an devrait disposer au minimum pour ses activités non-programmées de 5 à 7 sages-femmes, "alors qu’elle tourne généralement avec une ou deux de moins aujourd’hui", observe le CNGOF. Certaines doivent gérer trois accouchements en même temps les jours de forte affluence. Ces grosses maternités devraient aussi compter un gynécologue-obstétricien d’astreinte en plus de celui de garde pendant 24 heures, "dans la mesure où il arrive qu’il faille procéder à deux césariennes en même temps".

Augmenter la taille des maternités a été une façon de faire des économies, mais on arrive à un degré de saturation qui met en danger la santé des femmes et de leurs bébés. Il est temps de réagir, surtout que d’autres fermetures de maternités sont prévues. Compte-tenu de la charge actuelle de travail, l’obstétrique attire en outre de moins en moins les jeunes médecins, d’où une aggravation de la qualité des soins encore en perspective.

Quelle maternité choisir ?

Pour s’y retrouver dans la jungle des maternités, un label de qualité est en cours de création à l’initiative du CNOGF. Une application mobile, en test dès le premier trimestre 2019, permettra aux femmes d’évaluer la bienveillance du personnel et la qualité des soins reçus. Des critères objectifs seront aussi pris en compte, comme la possibilité de mettre en place un projet de naissance démédicalisé lorsque la grossesse ne présente aucun risque particulier et l’assurance de pouvoir obtenir une péridurale 24h/24 7j/7.

Ce label est différent de l’IHAB (Initiative Hôpital Ami des Bébés), soutenu par l’OMS et l’Unicef, qui garantit un accompagnement individualisé en plaçant les besoins et les rythmes du nouveau-né et de sa mère au cœur du système de soin. Dans les maternités labellisées IHAB, le planning n’est pas établi en fonction des contraintes du service mais du bien-être des patients.

Les établissements qui cumuleront les deux labels seront ceux à choisir en priorité.

*Institut national de la santé et de la recherche médicale