“Le monde est plus grand que l’empire américain et ses gouvernements satellites. Voici ce monde”, a déclaré jeudi 10 janvier Nicolás Maduro devant le Tribunal suprême du Venezuela lors de sa prise de fonctions pour un second mandat. Arrivé au pouvoir à la mort d’Hugo Chávez, en 2013, il a été réinvesti pour six ans à la tête d’un pays plombé par une profonde crise économique, sociale et institutionnelle, jusqu’en 2025.

Considéré comme illégitime par Washington, l’Union européenne (UE) et nombre de dirigeants étrangers, le président est apparu bien seul durant cette cérémonie. Seuls quatre de ses dix-neuf homologues latino-américains avaient fait le déplacement jusqu’à Caracas : les présidents cubain Miguel Díaz-Canel, bolivien Evo Morales, nicaraguayen Daniel Ortega et salvadorien Salvador Sánchez Cerén, relève le quotidien vénézuélien El Nacional. Était également présent le leader de l’Ossétie du Sud, une république prorusse non reconnue par l’ONU. La Turquie et le Suriname ont envoyé leurs vice-présidents. D’autres pays, comme le Mexique, l’Uruguay ou encore la Chine ont envoyé des fonctionnaires de second rang.

“Illégitime”

L’UE, par le truchement de la porte-parole de son service diplomatique, Maja Kocijancic, a une nouvelle fois appelé à de nouvelles élections. “Nous regrettons qu’en dépit des appels répétés de la communauté internationale, y compris de l’UE, aucune nouvelle élection n’ait eu lieu conformément aux normes internationales. Dans ce contexte, l’UE et les États membres ne participeront pas aujourd’hui à la séance d’investiture présidentielle”, a-t-elle confirmé.

Jeudi toujours, le Paraguay a rompu ses relations diplomatiques avec le Venezuela, ordonnant la fermeture de son ambassade à Caracas, rapporte un autre journal vénézuélien, Últimas Noticias. Les pays de l’Organisation des États américains (OEA) – notamment avec les votes de l’Argentine, des États-Unis, de la Colombie, du Chili, de l’Équateur et du Canada – se sont prononcés contre la reconnaissance de la légitimité du mandat de Nicolás Maduro. Et le gouvernement brésilien de Jair Bolsonaro a réitéré, via un communiqué de son ministère des Affaires étrangères cité par l’AFP, son soutien à l’Assemblée nationale vénézuélienne, contrôlée par l’opposition.

“Maduro contrôle toujours les armes et l’argent”

“Maduro, habitué à présenter Pékin et Moscou comme ses grands champions internationaux, était accompagné lors de sa prestation de serment par le vice-président du Conseil de la Fédération de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie, Ilyas Umakhanov, et le ministre chinois de l’Agriculture, Han Changfu. De nombreux observateurs ont attiré l’attention sur les modestes représentations de ces deux puissances alliées”, souligne pour sa part la BBC Mundo. Le site titre d’ailleurs : “Comment l’investiture de Maduro témoigne de son isolement international.”

“Quelles conséquences ?” poursuit l’article. Plusieurs experts interrogés par cette filiale en espagnol de la radio britannique insistent sur les répercussions économiques d’une mise au ban d’un pays exportateur de pétrole comme le Venezuela, et notamment celles des sanctions internationales imposées au pays. Ces dernières ont-elles des chances de faire fléchir le chef de l’État vénézuélien ? David Smilde, chercheur au Bureau de Washington sur l’Amérique latine (Wola), n’a pas caché son scepticisme : “Maduro contrôle toujours les armes et l’argent, donc il ne semble pas que les choses changent beaucoup à court terme.”