Alors que les embûches se multiplient sur le chemin du « grand débat » qui doit être lancé la semaine prochaine, Edouard Philippe se veut confiant. « Nous serons prêts, nous croyons à ce débat », a-t-il lancé, mercredi 9 janvier, à la sortie du séminaire gouvernemental qui se tenait à l’Elysée. Pourtant, le premier ministre n’était pas un fervent défenseur de l’idée d’une consultation générale, quand celle-ci a germé, fin novembre. « Il a fallu forcer la main de Matignon », confirme un élu de la majorité.
Un temps, l’ancien maire du Havre a d’ailleurs tenté de circonscrire ce débat d’un genre inédit aux seuls sujets de transition écologique, arguant que la contestation des « gilets jaunes » était née de la hausse de la taxe carbone. C’est ce qu’il avait annoncé le 4 décembre. Mais face à une colère qu’il juge plus profonde, Emmanuel Macron a décidé d’élargir les échanges à trois autres thématiques : la fiscalité, la réforme de l’Etat, et aussi la démocratie et la citoyenneté.
Le président de la République est convaincu qu’après l’été et l’automne calamiteux qu’il a traversés, la libération de la parole citoyenne lui permettra de renouer avec le souffle de la « grande marche » qui avait en partie fait le succès de sa campagne en 2017. « Le débat est une volonté du président, et on peut dire que tous autour de lui ne sont pas totalement alignés sur cette décision », juge un proche d’Emmanuel Macron.
Edouard Philippe n’est pas le seul au sein de l’exécutif à se montrer sceptique face à cet objet politique mal identifié. « Tous les ministres n’ont pas la même évaluation des bénéfices et des risques que génère ce débat », constate l’un d’entre eux. En l’occurrence, ceux qui viennent de la droite voient plus ce qu’il y a à perdre qu’à gagner dans l’aventure. « Ils pensent souvent que la Ve République est un monument indépassable et craignent tout élément de modernité », ajoute un macroniste de la première heure.
Gérald Darmanin, ministre des comptes publics, redoute de devoir reprendre, à l’issue du débat, le budget 2019 qui vient d’être voté et que les dix milliards d’euros qu’Emmanuel Macron a accordés aux « gilets jaunes » ont déjà déséquilibré. A l’économie et aux finances, Bruno Le Maire appréhende tout autant les conséquences de l’exercice, alors qu’il s’évertue à convaincre Bruxelles de la crédibilité de la France. « A Bercy, ils sont convaincus qu’on ne peut pas sortir du “grand débat” sans sortir le carnet de chèques », résume un proche du pouvoir.
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