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Sophia Aram : "Je suis transparente : de gauche, féministe, engagée"

Sophia Aram
Sophia Aram © François Berthier
Interview Gilles Medioni

La chroniqueuse et humoriste engagée revient sur scène avec « A nos amours », un spectacle où Sophia Aram règle son compte au sexisme. Corrosif.

Paris Match. Après l’école, les religions, la montée des extrêmes, vous parlez aujourd’hui du féminisme, quinze mois après l’affaire Weinstein . Vos spectacles ne sont pas de purs divertissements ?
Sophia Aram. Je pense qu’on peut rire de tout et spécialement des drames. Il y a davantage d’humour dans le tragique que dans le futile. “A nos amours” est un questionnement sur les archaïsmes sexistes entretenus par les religions, l’éducation, les contes de fées, la conversation badine à la française… C’est un problème de femmes et d’hommes, le sexisme n’étant pas réservé aux hommes. L’humour permet d’aller plus loin et de faire rire avec des thèmes qui restent toujours tabous, y compris chez les humoristes. Je parle des règles, du clitoris, du désir, du plaisir.

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A propos des violences conjugales, vous lancez : “Ivre, il poignarde sa femme en croyant ouvrir une boîte de pizza.”
Hélas, ce n’est pas une blague. Tout ce que je cite dans ce passage est vrai et tiré du Tumblr de Sophie Gourion, “Les mots tuent”, qui relève comment certains médias relatent ces drames avec des mots qui les banalisent. Ce ne sera pas un mari violent, mais un amoureux éconduit. On minimise encore aujourd’hui le crime passionnel, l’agression sexuelle. Nier le viol conjugal dans une émission de très grande écoute comme “Touche pas à mon poste” est problématique. Rien n’est réglé, d’où la nécessité d’écrire ce spectacle.

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Les chroniqueurs de France Inter ont brouillé les codes de l’humour en s’attaquant à la politique. Vous sentez-vous une “journaliste de complément”, comme disent les observateurs ?
J’ai trop de respect pour les journalistes. Moi, je fais un billet d’humeur avec des faits et des blagues, et j’emploie toujours le “je’’. Je ne crois pas à la neutralité. Je suis transparente : de gauche, féministe, engagée. Le prix à payer, c’est de déranger.

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Un peu comme certains religieux, une partie des gilets jaunes a du mal à accepter l’humour et la critique

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Vous avez reçu récemment insultes et menaces après votre billet du 24 décembre où vous déclariez : “Le gilet jaune est magique, il peut transformer n’importe quelle endive en Che Guevara des ronds-points”…
Un papier à la radio dure trois minutes et chaque mot sur les gilets jaunes était pesé. Le danger reste le raccourci, le Tweet, le titre. Je soutiens tout combat allant vers plus de justice sociale et je dénonce le racisme, l’antisémitisme, le sexisme que l’on a vus poindre dans ce mouvement. On me reproche d’être aux ordres de la Macronie. Il suffit de réécouter mes billets pour s’assurer du contraire. Je lis les critiques. Par contre, pour les Tweet d’insultes, et j’en reçois depuis un moment, libre à moi ensuite de les masquer ou de bloquer l’expéditeur. Ma tête et mes oreilles ne sont pas des poubelles. Un peu comme certains religieux, une partie des gilets jaunes a du mal à accepter l’humour et la critique. C’est leur problème, pas le mien.

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D’où vient votre sens critique ?
Mes grandes sœurs m’ont beaucoup structurée politiquement, artistiquement. Et aussi mes professeurs, à Trappes, où j’ai grandi. Ils organisaient des assemblées pour que les élèves ne restent pas passifs face à l’actualité. Je me souviens de l’injonction d’une prof de français : “Je vous interdis de devenir la génération Grand Bleu, des poissons bouche ouverte.” Au lycée, j’ai intégré une ligue d’improvisation théâtrale. Avec ma tête de première de la classe, mes grosses lunettes, ma silhouette frêle, j’ai compris que je pouvais surprendre en abordant des thèmes d’actualité frontalement. C’est devenu un réflexe : je n’ai pas changé. 

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