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A Lille, la Citadelle assiégée des identitaires

Un mois après la diffusion d'un documentaire d'Al-Jezira montrant propos et agression racistes venant de membres de la mouvance, le patron du bar identitaire la Citadelle s'est défendu... en pointant du doigt la presse.
par Sheerazad Chekaik-Chaila, correspondance à Lille. Photo Franck Crusiaux pour Libération
publié le 17 janvier 2019 à 17h37

Ce jeudi matin, Aurélien Verhassel, 34 ans, patron du bar identitaire la Citadelle, organisait une conférence de presse, un mois après la diffusion de Generation Hate un documentaire sans filtre d'Al-Jezira sur cette fraction de l'extrême droite, bien implantée dans le Nord. Le reportage, tourné en caméra cachée, montre l'infiltration d'une source de la chaîne, pendant six mois, dans le milieu identitaire lillois.

Enquête préliminaire

Un homme qui fait un salut nazi. Un autre qui crie «dehors les Arabes». Un homme qui frappe une jeune Maghrébine au visage puis s'en félicite car «meuf ou pas meuf, c'est des rebeus». Le même homme qui s'imagine foncer «à fond de cinquième» sur la foule du marché de Wazemmes, le plus fréquenté et cosmopolite de la ville. Plusieurs séquences ont poussé Martine Aubry, la maire de Lille, et Michel Lalande, le préfet du Nord, à saisir le procureur de la République. Depuis mi-décembre, une enquête préliminaire est ouverte. «A ma connaissance, aucune personne de la Citadelle n'a été entendue», a indiqué Aurélien Verhassel.

Depuis la diffusion de Generation Hate, la défense de Verhassel n'a pas dévié. «Je dénonce les propos sans équivoque, je réprouve. Ils ne sont rien la ligne philosophique et notre vision du monde. On ne peut pas faire porter sur les épaules de 1 200 membres les idioties de trois ivrognes à 3 heures du matin.» Depuis, deux de «ces gens de passage», Rémi F. et Charles T., ont été exclus de l'organisation d'extrême droite. Pendant que la justice enquête, le patron de la Citadelle tente donc de redorer l'image de sa communauté, d'où cette conférence de presse surréaliste.

«Montages trompeurs»

Pour l'occasion, ce fin communicant, militant politique depuis l'âge de 14 ans, s'est entouré d'une équipe de jeunes photographes et vidéastes. Un live tweet de la conférence est lancé. Aurélien Verhassel veut tout capter des échanges pour les diffuser à ses propres réseaux et s'assurer que ses propos ne seront pas déformés. Il demande à voir les cartes de presse et en photographie certaines. «Vous acceptez qu'on diffuse votre image ?» Non, général. «OK, on floutera vos visages», s'engage le patron de la Citadelle.

Il dénonce des «montages trompeurs et fallacieux», pointe des erreurs de traduction. «Est-ce que vous, journalistes, vous dénoncez les méthodes d'Al-Jezira ?» demande-t-il. Tous refusent de commenter les choix éditoriaux de la chaîne qatarie. Alors, il attaque les présents. Il donne des noms de journalistes dont le travail ne lui plaît pas, nomme des médias régionaux et nationaux à qui il reproche de ne pas avoir diffusé l'intégralité de son communiqué de presse, publié suite à la diffusion de Generation Hate.

«Tout comme vous avez tenté de criminaliser le mouvement des gilets jaunes, vous tentez de criminaliser la Citadelle», se victimise le patron de la Citadelle. Vous, c'est qui ? «Les médias peu sérieux, je ne vise personne en particulier.»

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