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Recrutement : le cerveau des candidats bientôt passé au scanner ?

Cette méthode encore à l'état d'expérience ne concernerait que les métiers manuels qui nécessitent une certaine habileté gestuelle: artisans, cuisiniers ou artistes. 152548778/freshidea - stock.adobe.com

Des chercheurs ont mis au point un système d'analyse cérébrale pour connaître le niveau d'expérience des chirurgiens. Ce test scientifique pourrait bousculer les méthodes de recrutement, déjà en proie aux évolutions technologiques.

«Le corps ne ment pas» entend-on souvent à propos du sport. Cet adage, un groupe de chercheur américain a choisi de l'appliquer à un domaine fortement éloigné: le niveau d'expérience, et par ricochet au recrutement. Quoi de mieux pour éradiquer tout mensonge que de s'en remettre à la biologie? Bienvenue dans le monde de la transparence totale... Les scientifiques à l'origine de ces travaux publiés dans la revue Science Advances , ont mis un point un système permettant de savoir le degré d'expertise d'un chirurgien, simplement en analysant son cerveau. Coiffé d'un casque rempli de capteurs, le cobaye se voit ainsi passé au scanner.

Plus concrètement, l'idée de l'expérience est de mesurer l'activité cérébrale d'une personne, ici de chirurgiens, durant une activité manuelle de précision. Or, selon le degré d'expérience de ces derniers, différentes zones du cerveau ont été développées. Les plus expérimentés possèdent une «image cérébrale» divergente de leurs confrères novices, que le casque est capable de détecter. Cette méthode encore à l'état d'expérience ne concernerait que les métiers manuels qui nécessitent une certaine habileté gestuelle: artisans, cuisiniers ou artistes. Pas de risque donc, pour le moment, de la voir décliner à des professions davantage intellectuelles (commercial, manager ou consultant...). Interrogés par Bloomberg , les scientifiques à l'origine de l'étude ont d'ailleurs déclaré qu'ils ne cherchaient pas à créer une «police du cerveau» pour choisir ou non un chirurgien, mais plutôt à aider la formation et l'évaluation de ces professionnels de la santé.

Le langage non-verbal déjà passé sous scanner aujourd'hui

Nombreuses sont les innovations de cette nature qui font peu à peu évoluer les méthodes de recrutement. Après les malheureuses tentatives d'expérimentation de robots recruteurs chez l'Oréal, Ikea ou Pepsico, mais aussi Amazon (qui préférait les hommes aux femmes), les entretiens en vidéo différée ont su quant à eux se faire une place pérenne dans de nombreuses entreprises, y compris Françaises (Sodexo, Air Liquide, Carrefour, SNCF...). Spécialisée dans ce domaine, la start-up Easyrecrue planche ainsi depuis deux ans sur le développement d'un «algorithme prédictif» basé sur l'intelligence artificielle qui analyse et note la communication non-verbale des candidats: geste, intonation, silence, volume... Pas tout à fait un scanner pour cerveau, mais le but recherché est là aussi de sonder le candidat au-delà des mots, dans ce qui est plus difficilement maîtrisable: les aptitudes professionnelles et l'expérience.

« Ce qui n'est pas accepté aujourd'hui par notre société, pourrait l'être demain »

«C'est une erreur de croire que tous les cerveaux sont identiques. Certaines zones du cerveau sont différentes selon les individus, les images cérébrales seraient donc faussées», fait valoir pour sa part Jérémy Lamri, co-fondateur du Lab RH, interrogé par Cadremploi suite à la publication des travaux dans la revue Science Advances, en octobre dernier. Et d'ajouter: «il y a une ligne rouge a ne pas franchir et l'imagerie cérébrale en est une aujourd'hui. Cela étant l'éthique est un concept mouvant. Ce qui n'est pas accepté aujourd'hui par notre société, pourrait l'être demain». L'entretien vidéo en est un exemple. Qui aurait accepté de recruter ou non un candidat sans le rencontrer physiquement il y a cinquante ans, tout en se reposant sur les conseils d'un algorithme?

Plus loin de nous, en Chine, où les barrières éthiques et légales sont presque inexistantes en matière de libertés individuelles, le processus d'imagerie cérébral a déjà trouvé sa déclinaison professionnelle. Le journal South China Morning Post révélait en mai dernier qu'une douzaine d'entreprises du pays avaient recours à des casques munis de capteurs pour surveiller l'activité émotionnelle de leurs salariés. Le tout avec le soutien du gouvernement soucieux de préserver «la stabilité sociale». Notamment utilisé dans les compagnies ferroviaires du pays, le dispositif permettrait par exemple de maintenir l'attention des conducteurs de trains pour éviter l'assoupissement. Et plus globalement de booster la productivité des salariés en maîtrisant le facteur émotionnel. Bref, à l'heure ou l'open-space domine, l'ère de «l'open brain» n'est peut-être pas si loin.

Recrutement : le cerveau des candidats bientôt passé au scanner ?

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23 commentaires
  • Dantzen

    le

    La quintessence du béni oui-oui, conforme au delà de toutes les espérances. Chien fidèle sans l'amour du maitre. Pauvres psychologues et autres scientifiques dévoyés. Une élite de plus à la dérive. On va finir par haïr toutes ces élites formées avec notre argent et qui nous trahissent pour quelques deniers. Nous entrons dans l'ère des camps de soumission. Cela rejoint parfaitement les propos de l'auteur du "Cygne noir": la modernité ne désire que des bons élèves. Elle a tout faux.

  • MADELEINE LE ROUX

    le

    On demande où la technologie médicale va se nicher!!!
    Un chirurgien ne doit pas avoir la maladie de Parkinson, ni s'endormir sur le patient lors d'une opération trop longue, on peut le comprendre dans ces cas...
    Avant que nos parlementaires soient élus on devrait aussi en faire de même, certains font leurs nuits dans l'hémicycle.