Les entreprises du CAC 40 ont fait plus de bénéfices mais ont payé moins d’impôts

Un rapport de l’association altermondialiste Attac pointe « l’impact désastreux pour la société et la planète » de ces grandes entreprises.

 Un patron du CAC 40 gagne en moyenne 119 fois plus qu’un des ses employés (illustration).
Un patron du CAC 40 gagne en moyenne 119 fois plus qu’un des ses employés (illustration). LP/Olivier Corsan

    La priorité est donnée aux actionnaires. Dans un rapport diffusé ce dimanche et qui analyse les chiffres des entreprises cotées au CAC 40, Attac (l'Association pour la taxation des transactions financières et pour l'action citoyenne) ainsi que l'Observatoire des multinationales dressent un sombre bilan de la période 2010-2017.

    Durant ces années, en prenant en compte la totalité de ces entreprises, les bénéfices sont en hausse de 9,3 %. Les sommes versées aux actionnaires ont augmenté de 44 % alors que le montant des impôts payés a reculé de 6,4 %. Les emplois en France ont, eux, reculé de 20 %. Attac juge « désastreux pour la société et la planète » l'impact des sociétés du CAC 40.

    60 % des bénéfices pour les actionnaires. Dans ces entreprises qui représentent 1 300 milliards d'euros de chiffre d'affaires, soit environ la moitié du produit intérieur brut de la France, 2018 a été une année record pour les actionnaires. Ils ont perçu un total de 57,4 milliards d'euros. Plus de 60 % des profits des entreprises du CAC 40 leur reviennent donc.

    Cette orientation des bénéfices se fait au détriment de l'emploi, des salaires et de l'investissement, d'après Attac. Cela ne peut que compromettre « les capacités de l'économie française à financer la transition écologique et sociale ».

    De 2010 à 2017, « les dividendes des sociétés du CAC 40 ont augmenté de 44 % […] Les effectifs mondiaux n'ont augmenté que de 2,4 %… pendant que les effectifs en France baissaient, eux, de 20 % », détaille Attac.

    Des écarts de salaires de 1 à 119 en moyenne et des inégalités hommes-femmes. Un patron du CAC 40 gagne en moyenne 4,68 millions d'euros par an. Cela correspond à 257 fois le Smic brut, ou 325 fois le Smic net. Ce niveau de rémunération correspond en outre à 119 fois celui du salarié moyen de ces entreprises. Les écarts sont encore plus importants avec les employés des filiales étrangères, les fournisseurs et les sous-traitants.

    Par ailleurs, les entreprises du CAC 40 entretiennent une autre forme d'inégalité : celle entre les hommes et les femmes. Les rémunérations de ces dernières, à fonction identique, sont inférieures de 18,6 % à celles des hommes. Cette inégalité se retrouve dans la composition des organes de direction de ces entreprises : 13 n'ont aucune femme et parmi les 57 PDG, directeurs généraux et président de conseil d'administration ne se trouvent que deux femmes.

    Des grandes entreprises moins imposées que les PME. En 2014 le taux d'imposition brut des grandes entreprises était de 26 % contre 32 % pour les PME. Les multinationales jouent de la concurrence entre Etats et domicilient leurs revenus dans les zones fiscalement les plus favorables. Total a par exemple déclaré pendant plusieurs années des résultats négatifs en France pour un bénéfice global de 4,2 milliards d'euros. En 2017, le groupe d'immobilier commercial Unibail n'a été imposé qu'à 2,7 %.

    La même année, les entreprises du CAC 40 avaient 2 500 filiales déclarées dans des paradis fiscaux. La présence de l'Etat au capital n'est pas une garantie contre cette pratique. Engie déclare ainsi 327 filiales dans des paradis fiscaux. 235 d'entre elles se trouvent même… dans l'Union européenne : aux Pays-Bas, au Luxembourg et en Belgique.

    L'hypocrisie autour de l'écologie. Attac rappelle qu'une note interne de BusinesEurope, l'équivalent européen du Medef (Mouvement des entreprises de France), montre que le soutien des grandes entreprises à la transition écologique n'est que de façade. Dans ce texte qui ne devait pas être rendu public, il est écrit qu'il s'agit de « rester plutôt positif tant qu'on en reste au niveau des déclarations politiques, sans implications législatives ». Il faut « s'opposer à toute ambition accrue, en utilisant l'argument habituel de la distorsion de compétitivité face à nos concurrents ».

    En 2017, les émissions de gaz à effet de serre ont ainsi augmenté pour 22 entreprises du CAC 40. Certaines, en terme de communication, mettent du coup en avant des données partielles. BNP Paribas parle des émissions de ses seuls salariés, pas de l'ensemble de ses activités. Carrefour parle des économies d'énergie de ses magasins, mais pas des « coûts environnementaux de la production ni du transport des produits vendus ».

    Des solutions comme le plafonnement des écarts de salaires. Face à cette situation, Attac émet plusieurs propositions. L'association suggère notamment de limiter de 1 à 10 les écarts de salaires, y compris avec les dirigeants, « afin de tirer vers le haut la rémunération du travail ». Concernant l'écologie, elle suggère « une fiscalité carbone réellement dissuasive sur les sites industriels polluants. Pour les impôts, Attac préconise que tous les avoirs, y compris ceux détenus dans des paradis fiscaux, soient taxés selon les règles françaises.