Le 24 janvier 1864 naissait Marguerite Durand, journaliste féministe engagée

En décembre 1897, Marguerite Durand fonde le journal «La Fronde», un journal uniquement rédigé et fabriqué par des femmes: des intellectuelles, des avocates, et des institutrices. © Rue des Archives/Collection Particuliere/PVDE

LES ARCHIVES DU FIGARO - Hommage à cette pionnière du journalisme et grande figure du féminisme. En 1891, Marguerite Durand créa Le Courrier du Figaro, puis le journal La Fronde en 1897.

En partenariat avec RetroNews, le site de presse de la BnF

Marguerite Durand est une personnalité hors du commun de la Belle Époque. Née le 24 janvier 1864, elle a été actrice à la Comédie-Française avant de devenir journaliste et féministe. En 1888, elle épouse l’avocat et député Georges Laguerre. La jeune Marguerite réalise ainsi ses premiers pas de journaliste en devenant co-directrice de La Presse avec son mari. En 1891, séparée de son mari mais ayant conservé de nombreuses relations dans la politique et le journalisme, elle entre au Figaro . Elle y crée la rubrique Le Courrier du Figaro : «J’entrai au Figaro où me fut confiée la direction de l’un des suppléments hebdomadaires de ce journal Le Courrier du Figaro. Mais en plus des questions et des réponses portant sur des sujets nécessitant de longues et difficiles recherches, Le Courrier du Figaro publiait des questions d’actualités sur lesquelles ses lecteurs étaient sollicités de donner leur avis. La tâche fut difficile mais le travail qu’elle nécessitait fut pour mon cerveau une «gymnastique» dont les effets furent salutaires*».

Le courrier du Figaro débute le samedi 31 octobre 1891: «Nous pouvons, dès à présent savoir et dire que tous les sujets seront traités et discutés dans Le Courrier du Figaro. Pour preuve, voici quelques questions prises presque au hasard parmi les premières arrivées:
- Y a-t-il inconvénient ou avantage pour nous Français à ouvrir avec tant de facilité nos caisses aux emprunts étrangers? - L’impératrice Eugénie avait-elle un budget spécial pour ses toilettes? Le chiffre en était-il élevé?... Marguerite Durand se charge donc à l’aide de deux secrétaires de répondre au mieux.
Mais quand en avril 1896, Le Figaro l’envoie couvrir le congrès féministe qui se tient à Paris, elle refuse de répondre à l’attente du journal qui lui demande d’écrire un papier humoristique, voire un peu railleur sur cette rencontre.

La cause féministe

Mais ce congrès est pour elle une véritable révélation: elle prend conscience des revendications féminines et décide de se jeter dans la bataille. Marguerite crée alors La Fronde : «On apprend l’apparition d’un journal qui aura cette piquante originalité d’être exclusivement dirigé, administré, écrit et même composé par des femmes. Il a pour titre La Fronde, et il est placé sous la direction d’une femme remarquable par la distinction de son esprit, Madame Durand. «L’affiche qui annonce ce nouveau journal en définit clairement le programme. Les femmes, y est-il dit, prétendent avoir le droit de donner officiellement leur avis sur toutes les questions intéressant la société et l’humanité. La Fronde sera l’écho fidèle de leurs approbations, de leurs critiques, de leurs justes revendications». (Extrait du Figaro du 9 décembre 1897). Ce journal se veut avant tout un grand quotidien d’information générale. Dirigé uniquement par des femmes, certaines règles établies vont être bousculées. Ainsi, on les voit forcer les portes de la Bourse ou du parlement réservés jusqu’alors aux hommes. Le Figaro s’interroge dès juillet 1899: «Qui sait si l’accession des femmes aux fonctions gouvernementales ne sera pas parmi les conséquences indirectes de l’œuvre de Marguerite Durand? À force de coudoyer dans les couloirs de la Chambre rédactrices et reportresses, leurs maîtres finiront peut-être par trouver naturel qu’elles y puissent siéger comme eux.»

Son engagement politique

Tout en continuant sa carrière de femme journaliste, Marguerite Durand mène de nombreux combats. En 1910, elle se présente aux élections législatives dans le IX eme arrondissement de Paris. Comme le souligne Le Figaro de l’époque «Son programme consiste avant tout dans l’accession de la femme à l’électorat et à l’éligibilité».
Sa candidature est jugée irrecevable par le préfet de la Seine. La question est portée devant le Conseil d’État: il déclare que «Les lois régissant la composition de la chambre des députés sont sans application à l’égard des femmes.» (Le Figaro du 27 janvier 1912).
Lors du rejet du projet de loi sur le vote des femmes au Sénat en novembre 1922, Le Figaro recueille l’opinion de Marguerite Durand: «Ce vote ne me surprend pas le moins du monde. Je m’y attendais et, tout en le déplorant…Il me semble que l’accession des femmes aux fonctions législatives était souhaitable parce qu’elles auraient apporté dans nos méthodes politiques un élément nouveau. Je pense que les femmes pourraient s’occuper utilement des questions d’hygiène, d’assistance publique, de vie chère où l’on veut bien leur reconnaître quelque compétence. En tous cas, nous ne nous laisserons pas abattre par cet insuccès.» (Le Figaro du 22 novembre 1922).

En 1931, elle fait don à la ville de Paris de toute sa documentation collectée depuis la création de La Fronde en 1897. Aujourd’hui, la bibliothèque de Marguerite Durand installée rue Nationale dans le XIIIème arrondissement rassemble un très grand nombre de documents sur l’histoire du féminisme.

* Manuscrit de la Bibliothèque Marguerite Durand, Paris, notes de Marguerite Durand, tome 3, Femmes et journalisme.

Annonce de la création de la rubrique «Le Courrier du Figaro» en octobre 1891 qui trouve sa place dans le supplément littéraire du samedi:

Le 24 janvier 1864 naissait Marguerite Durand, journaliste féministe engagée

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4 commentaires
  • Lacombe Lucien

    le

    un très intéressant article qui montre le chemin parcouru. Qui aurait pensé qu'il faudrait des siècles pour que tous les gens soient reconnus pour ce qu'ils sont et ce qu'ils font, et pas seulement les hommes ?