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Billet de blog 24 janvier 2019

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En Iran, pendant que le pouvoir s’embourbe, les manifestations se multiplient

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Illustration 1
Manifestation à Paris contre la venue de Rohani en France en janvier 2016 © http://javaddabiran.blogspot.com/

 Il y a l’image bien lisse dans la presse internationale d’un régime indéboulonnable en Iran qui connait des hauts et des bas, avec ses manifestations, mais qui conserve un aspect somme toute fréquentable.  Et puis il y a la face cachée de la planète intégriste, avec un lourd bilan en matière de violations de droits humains, de guerre et de terrorisme.

En termes de guerre et d’ingérences, Téhéran a semé l’effroi dans ce qu’il appelle l’arc chiite qui est en fait un arc d’extrémisme fanatique visant à installer durablement un califat mondial sur le monde musulman. L’arc a tiré ses flèches en Syrie, au Liban, en Irak, au Yémen, à Gaza et en Afghanistan.

A chaque avancée, les Occidentaux ont réagi mollement ou pas du tout. La politique de complaisance a boosté les gardiens de la révolution.  

Les milliards de dollars déversés dans cette politique de la terre brûlée ont durement appauvri la population en Iran. La manne financière de la levée des sanctions n’a profité ni aux Iraniens, ni à l’infrastructure industrielle et économique. Elle a simplement alourdit des poches déjà bien remplies des cercles dirigeants et financé l’expansionnisme islamiste. Depuis plus d’un an, « Laissez tomber la Syrie, occupez-vous de nous » ou « Ni Gaza, ni Liban, je donne ma vie pour l’Iran », rythment les manifestations contre le pouvoir religieux.

La guerre a nourri la misère

La guerre coute très cher. Les gardiens de la révolution, les pasdaran, qui détiennent plus de la moitié de l’économie iranienne entre leurs mains, n’ont pas hésité à vider les comptes des banques qui leur sont liées. Cela fait plus d’un an que les épargnants spoliés manifestent tous les jours en Iran pour réclamer d’être indemnisés. Les manifestations se déroulent devant les banques, le parlement des mollahs, les gouvernorats. Ils font preuve d’une grande pugnacité. Ils ont tout perdu. « A bas ce gouvernement trompeur » et « une fraude de moins et on pourra régler notre problème », scandent-ils régulièrement.

La misère est telle que les salaires ne sont plus payés depuis belle lurette. Les prix se sont envolés, le panier de la ménagère est vide et bien des corporations en colère étalent de longs sofreh ou nappes vides à même le sol pour dire que les gens ont faim désormais en Iran.  Les grands mouvements de grève et de manifestation de 2018, des ouvriers du sucre, des métallurgistes, des enseignants, des commerçants du bazar, des routiers, des infirmières, des cadres hospitaliers, des agriculteurs et des diverses branches du monde du travail réclament des salaires impayés depuis des mois, voire une année, ou comme les enseignants, un salaire aligné sur ... le seuil de pauvreté. Les slogans sont les mêmes, partout : « l’ennemi est juste ici, ils mentent en disant que c’est l’Amérique », « A bas la dictature », « non à autant d’injustice ».

Côté terrorisme, la dernière vague d’attentats des services de Renseignement ou Vevak, heureusement déjoués, contre les opposants iraniens, notamment les Moudjahidine du peuple d’Iran à Tirana et à Villepinte près de Paris, ont décimé les rangs du Vevak en Europe, d’où nombre de « diplomates » ont été expulsés et l’un d’entre eux a été incarcéré en Belgique.

Le message des manifestations

Reste enfin les droits humains. Au 24 janvier, les mollahs affichaient déjà 31 exécutions pour 2019 dont six en public. Les prisons sont toujours aussi pleines à craquer de condamnés à mort, renferment toujours des syndicalistes, des ouvriers, des enseignants, des membres de minorités ethniques et religieuses, des femmes, des avocats et des opposants politiques, dont le seul crime est d’être ce qu’ils sont.

Toutes ces manifestations sont porteuses d’un message : la détermination de changer de régime. La diaspora iranienne qui reflète parfaitement le désir ardent des Iraniens de l’intérieur, manifestera le 8 février à 14h à Paris (place Denfert-Rochereau) pour dénoncer la répression, la guerre et le terrorisme. Mais les Iraniens veulent surtout faire savoir qu’ils ont une alternative à la dictature religieuse.

Le Conseil national de la résistance iranienne, qui existe depuis 38 ans, est doté d’un parlement en exil en majorité féminin, d’un programme qui appelle à la séparation de la religion et de l’Etat, à l’égalité des femmes et à l’autonomie du Kurdistan. La présidente élue, Maryam Radjavi a constitué un vaste mouvement anti-intégriste dans le monde qui a le soutien de très nombreux dignitaires des cinq continents et défend un programme en dix points qui n’a rien à envier aux grandes démocraties.

Les 13 et 14 février le monde se réunira à Varsovie, 40 ans après le sommet de la Guadeloupe, pour deviser sur le sort de l’Iran. La sagesse voudrait que tous ces pays écoutent attentivement l’appel du peuple iranien à vivre libre et lui reconnaissent le droit légitime de résister à une dictature religieuse qui menace la sécurité du monde.

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