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Pologne: une vidéo de vaches malades et de viande viciée dans un abattoir fait polémique

Des vaches malades traînées dans un abattoir polonais, dans un reportage de la télévision TVN24.

Des vaches malades traînées dans un abattoir polonais, dans un reportage de la télévision TVN24. - Capture TVN24

Un journaliste a travaillé pendant près de trois semaines dans un abattoir polonais, dans lequel des vaches manifestement malades étaient abattues et la viande apparaissait comme impropre à la consommation.

Des bovins traînés la corde au cou jusqu'à l'abattoir, visiblement mal en point, des vaches tremblantes serrées dans un camion en attendant leur sort, alors qu'un vent chargé de neige souffle dehors, des corps entassés avant la découpe et des quartiers de viande viciés, présentant parfois des tumeurs: ce sont les images répugnantes dévoilées samedi soir par l'émission d'investigation Superwizjer de la télévision polonaise TVN 24.

Elles ont été tournées dans un abattoir de la région de Mazovie, en Pologne, qui est un gros pays exportateur de viande de boeuf au sein de l'Union européenne. Pendant près de trois semaines, un journaliste de l'émission a infiltré l'établissement et filmé certaines scènes en caméra cachée.

"J'avais l'ordre de rendre la viande plus présentable"

"J'avais l'ordre d'enregistrer la viande comme saine, et en gros de la rendre plus présentable. C'était horrible, croyez-moi. L'odeur de la viande pourrie vous fait vomir. Je devais la rendre 'plus jolie' en la raclant avec un couteau", explique Patryk Szczepaniak, dans des propos traduits et rapportés par le Guardian. Les ouvriers devaient ainsi enlever des tumeurs et des escarres pour arranger la viande.

A cette étape, pas de trace de vétérinaire selon le reporter, contrairement à la procédure réglementaire.

"Les vétérinaires sont censés être là, avant, pendant et après l'abattage, mais en presque trois semaines, je n'ai vu le vétérinaire que le matin pendant qu'il s'occupait de l'administratif et examinait brièvement la tête des vaches", poursuit Patryk Szczepaniak.

"Sur le papier, tout allait bien. En réalité, c'était un carnage", constate le journaliste, qui a compté en trois shifts de nuit 28 vaches trop malades pour se tenir debout. Une équipe de l'émission est retournée sur place ensuite et a remarqué le même manège pendant cinq nuits consécutives.

Un procédé très lucratif

Interrogés face caméra, le propriétaire de l'abattoir et le vétérinaire ont nié tout vice de forme. Et pour cause, le business est rentable: en n'abattant que des vaches saines, avec environ 20 vaches par jour, cela rapporterait plus de 80.000 euros par an; en exécutant des animaux malades, le chiffre grimpe à plus de 580.000 euros.

"C'est absolument inacceptable de tuer des animaux dans cet état et de les intégrer à la chaîne alimentaire", réagit dans les colonnes du Guardian le vétérinaire Paul Roger, responsable d'Awselva, une association britannique traitant du bien-être animal. "Il n'y a aucun moyen de savoir ce qui ne va pas chez ses animaux sans une autopsie complète", souligne-t-il.

De plus, la manipulation des carcasses, traînées au sol avant d'être découpées, présente aussi des risques sanitaires, ajoute le vétérinaire, "comme la salmonellose, E coli" ou d'autres infections pouvant se transmettre de l'animal à l'homme.

Le responsable de l'inspection vétérinaire de la région a assuré dans l'émission que le vétérinaire responsable de l'abattoir, ainsi que son supérieur, avaient été licenciés et qu'une enquête était en cours. Ce qui ne convainc pas l'équipe de l'émission, qui craint que la police classe ça comme un incident isolé et que ces agissements se poursuivent.

En décembre dernier, rappelle le Guardian, le propriétaire d'un abattoir a été condamné à de la prison pour des faits similaires, et une enquête est en cours dans l'est du pays.

L'affaire n'est pas sans rappeler le scandale de la viande de cheval: en 2013, il était révélé que la société de transformation des viandes Spanghero avait vendu de la viande d'équidé pour du boeuf. Leur procès se déroule actuellement à Paris.

Liv Audigane