Financement libyen : rejet définitif du recours de Sarkozy contre Mediapart

Un document publié par le site d’information affirmait que Tripoli avait accepté de financer la campagne de Nicolas Sarkozy à hauteur de 50 millions d’euros.

 Nicolas Sarkozy accusait Mediapart d’avoir produit un « faux grossier ».
Nicolas Sarkozy accusait Mediapart d’avoir produit un « faux grossier ». AFP/Valéry Hache

    La Cour de cassation a rejeté ce mercredi le recours de Nicolas Sarkozy qui accusait Mediapart d'avoir produit un « faux » en 2012, dans l'affaire des accusations de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007 par le régime déchu de Kadhafi.

    Saisie de pourvois de l'ancien chef de l'Etat et de son ancien ministre Brice Hortefeux, la plus haute juridiction judiciaire a définitivement confirmé le non-lieu ordonné en faveur de Mediapart à deux reprises, par les juges d'instruction puis par la cour d'appel.

    Le document contesté par Nicolas Sarkozy avait été publié le 28 avril 2012 par Mediapart, entre les deux tours de l'élection présidentielle. Attribué à Moussa Koussa, l'ex-chef des services de renseignement extérieur de la Libye, aujourd'hui en exil, il affirmait que Tripoli avait accepté de financer pour « 50 millions d'euros » la campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy en 2007. « Un faux grossier », avait immédiatement dénoncé l'ex-chef de l'Etat.

    Une signature authentifiée

    Diligentée après une plainte de Nicolas Sarkozy, l'enquête s'est attachée à déterminer si le document était, ou non, un faux d'un point de vue matériel. « Indépendamment de son contenu », l'enquête n'a pas pu établir de « façon formelle » qu'il s'agissait d'« un support fabriqué par montage » ou « altéré par des falsifications », ont estimé les juges.

    Un collège d'experts a conclu que la signature au bas du document litigieux était de la main de Moussa Koussa, contrairement à ce qu'avait affirmé ce dernier en 2014, lors d'une audition comme témoin au Qatar, dans des propos ambigus : « Le contenu n'est pas faux mais la signature est fausse. »

    Ouverte depuis 2013, une enquête distincte est toujours en cours pour vérifier les accusations de financement libyen, formulées par l'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine et d'anciens dignitaires libyens, tandis que d'autres les ont démenties. Dans ce volet, l'ancien ministre et secrétaire général de l'Elysée Claude Guéant et Nicolas Sarkozy ont été mis en examen pour « corruption passive » et « recel de détournements de fonds publics ».

    Un « torchon falsifié » pour Sarkozy

    Lors de sa mise en examen en mars 2017, l'ancien président avait de nouveau attaqué cette note, la qualifiant de « torchon falsifié ». Dans son interrogatoire, il avait invoqué un rapport de synthèse selon lequel « il existait une forte probabilité pour que le document produit par Mediapart soit un faux ». Le document, porteur de la date du 10 décembre 2006, était adressé à l'ancien argentier du régime Béchir Saleh. Ce dernier en avait lui aussi contesté l'authenticité en septembre 2017 dans une interview à Jeune Afrique, en déplorant une « salade franco-française ».

    D'après cette note, un « accord de principe » portant sur un « soutien » de 50 millions d'euros aurait été scellé lors d'une réunion qui se serait tenue le 6 octobre 2006 en présence, côté français, du futur ministre sarkozyste Brice Hortefeux et de Ziad Takieddine. Ils ont tous les deux démenti avoir été présents ce jour-là et l'enquête s'est aussi attachée à vérifier si une telle réunion pouvait avoir eu lieu.

    Les magistrats instructeurs ont retrouvé plusieurs traces de la présence de Brice Hortefeux en France entre les 5 et 7 octobre, rendant « l'hypothèse de sa participation, hors de France, à la réunion mentionnée […] difficilement envisageable ». Et les juges estimaient peu crédible qu'une telle réunion ait eu lieu dans l'Hexagone car l'un de ses participants libyens supposés, l'ancien chef des services de renseignement Abdallah Senoussi, y faisait l'objet d'un mandat d'arrêt.