A Saint-Etienne, des oreilles intelligentes à l'affût des bruits suspects

A Saint-Etienne, des oreilles intelligentes à l'affût des bruits suspects La ville va expérimenter le déploiement de micros capables de détecter des sons associés à des événements dangereux, puis d'alerter automatiquement la police.

Dans le quartier Tarentaize-Beaubrun-Couriot, Saint-Etienne aura bientôt des oreilles partout. Cette partie populaire de l'ouest de la ville accueillera à parti de mars la première expérimentation de Saint-Etienne observatoire des fréquences du territoire (S.O.F.T), un projet visant à expérimenter l'utilisation de capteurs pour accélérer l'information puis l'intervention des services municipaux (police, pompiers, voirie). Pour ce premier cas d'usage, une cinquantaine de micros seront répartis de manière à couvrir toute la zone. "Notre objectif est d'identifier automatiquement des bruits anormaux, comme des collisions entre voitures, des bris de vitres, des cris ou encore des fuites d'eau", détaille Sébastien Valla, DSI de la ville et de la métropole stéphanoise.

Des algorithmes de détection et de catégorisation des bruits analyseront en temps réel l'environnement sonore capté par les micros. Lorsqu'un son associé à un éventuel danger sera détecté, une alerte détaillant le type d'incident sera envoyée aux forces de l'ordre. Dans un premier temps, un opérateur humain vérifiera qu'il y a bien matière à alerter la police, mais l'objectif est d'automatiser le procédé afin de prévenir le plus vite possible les autorités. Cette utilisation automatisée des micros est fréquente aux Etats-Unis, notamment pour détecter des coups de feu, et s'intègre à des plateformes de surveillance des villes en complément des caméras. Les exemples de ce type sont beaucoup plus rares en France.

Cadre juridique flou

Une nouveauté qui nécessite de déminer le terrain. "Les capteurs ne seront pas assez performants pour aller chercher des sons de basse intensité comme des conversations", assure Sébastien Valla. Il précise également que ni les opérateurs humains ni la police ne passeront la journée branchés sur le flux audio, comme le font ceux qui observent les images de vidéosurveillance. "Ils ont uniquement le droit d'écouter les remontées d'alertes." D'ailleurs, seuls ces extraits évoquant un danger potentiel seront enregistrés. C'est l'autre intérêt d'utiliser l'audio : contrairement à la vidéosurveillance, dont l'usage est très encadré en France, une bande audio peut-être réécoutée sans limites, grâce à un cadre juridique flou. L'expérimentation comporte aussi un important volet réglementaire pour fixer les limites de cette pratique, suivi par le DPO de Saint-Etienne.

Ce test d'une durée de six mois est le fruit d'un contrat de R&D d'un an entre Saint-Etienne et Serenicity, une filiale du fabricant d'armes stéphanois Verney-Carron spécialisée dans les technologies de surveillance. Son budget de 150 000 euros est financé majoritairement par l'Etat, le reste provenant de la collectivité. L'expérimentation doit permettre de prouver que la solution peut-être automatisée à grande échelle. Un aspect crucial pour une collectivité de la taille de Saint-Etienne, qui ne disposera pas des ressources techniques pour assurer un suivi humain permanent au-delà de l'expérimentation, en particulier si une telle solution devait être étendue à tout le territoire. Avec la reconnaissance sonore, ce sont les algorithmes qui appellent à l'aide.