C'est une première mondiale : les médecins de l'Institut Coeur Poumon du CHU de Lille ont réussi à remplacer une valve mitrale (valve cardiaque) en passant par la veine fémorale ! Cette opération a permis de soigner une patiente fin 2018 sans lui ouvrir ni le thorax ni le cœur.
"Nous sommes probablement à l'aube d'une nouvelle révolution", s'enthousiasment auprès de Sciences et Avenir le Pr Eric Van Belle, cardiologue interventionnel et chef du Pôle Cardiovasculaire et Pulmonaire de Lille et le Dr Thomas Modine, chirurgien cardiaque, à l’Institut Cœur Poumon. C'est en effet la première fois au monde qu'un patient – en l'occurrence, une patiente – bénéficie d'un remplacement complet de sa valve mitrale sans ouverture du thorax ni du cœur. Seule conséquence : une petite cicatrice au niveau de la jambe, où la valve bioprothétique (prothèse en partie biologique) de remplacement a été introduite à l'aide d'un cathéter. Depuis la veine fémorale, elle a ensuite été guidée jusqu'au centre du cœur. C'est là, entre deux cavités appelées l'oreillette gauche et le ventricule gauche, que la valve mitrale officie.
Illustration de la valve mitrale (en rose). Crédits : SEBASTIAN KAULITZKI / SCIENCE PHOT / SKX / SCIENCE PHOTO LIBRARY / AFP
INSUFFISANCE MITRALE. Le rôle de la valve mitrale est essentiel : en s’ouvrant et se fermant à chaque battement de cœur, elle permet au sang de passer de l'oreillette au ventricule tout en empêchant son reflux. Ainsi, la contraction du ventricule gauche envoie le maximum de volume sanguin dans l'aorte, sur laquelle il débouche. L'insuffisance mitrale vient justement d'une "fuite" de cette valve mitrale, lorsque les deux feuillets qui en permettent la fermeture ne sont plus correctement alignés. Non traitée, cette maladie sévère et fréquente conduit à une insuffisance cardiaque. Les symptômes : un essoufflement au moindre effort très invalidant, et l’apparition d’œdèmes dans les jambes.
C'est une première mondiale : les médecins de l'Institut Coeur Poumon du CHU de Lille ont réussi à remplacer une valve mitrale (valve cardiaque) en passant par la veine fémorale ! Cette opération a permis de soigner une patiente fin 2018 sans lui ouvrir ni le thorax ni le cœur.
"Nous sommes probablement à l'aube d'une nouvelle révolution", s'enthousiasment auprès de Sciences et Avenir le Pr Eric Van Belle, cardiologue interventionnel et chef du Pôle Cardiovasculaire et Pulmonaire de Lille et le Dr Thomas Modine, chirurgien cardiaque, à l’Institut Cœur Poumon. C'est en effet la première fois au monde qu'un patient – en l'occurrence, une patiente – bénéficie d'un remplacement complet de sa valve mitrale sans ouverture du thorax ni du cœur. Seule conséquence : une petite cicatrice au niveau de la jambe, où la valve bioprothétique (prothèse en partie biologique) de remplacement a été introduite à l'aide d'un cathéter. Depuis la veine fémorale, elle a ensuite été guidée jusqu'au centre du cœur. C'est là, entre deux cavités appelées l'oreillette gauche et le ventricule gauche, que la valve mitrale officie.
Illustration de la valve mitrale (en rose). Crédits : SEBASTIAN KAULITZKI / SCIENCE PHOT / SKX / SCIENCE PHOTO LIBRARY / AFP
INSUFFISANCE MITRALE. Le rôle de la valve mitrale est essentiel : en s’ouvrant et se fermant à chaque battement de cœur, elle permet au sang de passer de l'oreillette au ventricule tout en empêchant son reflux. Ainsi, la contraction du ventricule gauche envoie le maximum de volume sanguin dans l'aorte, sur laquelle il débouche. L'insuffisance mitrale vient justement d'une "fuite" de cette valve mitrale, lorsque les deux feuillets qui en permettent la fermeture ne sont plus correctement alignés. Non traitée, cette maladie sévère et fréquente conduit à une insuffisance cardiaque. Les symptômes : un essoufflement au moindre effort très invalidant, et l’apparition d’œdèmes dans les jambes.
La chirurgie classique nécessite d'ouvrir le thorax et d'arrêter cœur et poumons
Pour remplacer la valve mitrale, la technique classique consiste à ouvrir le thorax du patient, puis arrêter le cœur. Ce dernier est remplacé par une machine branchée à la circulation sanguine, selon un procédé que l'on appelle la circulation extra-corporelle. Le chirurgien remplace alors la valve mitrale, puis rebranche les organes et referme le tout. "Cette technique reste utilisée en première intention", explique le Dr Modine, "car elle est bien maîtrisée et permet d'implanter à la fois des valves bioprothétiques et mécaniques". 100% synthétiques, les valves mécaniques sont préférées pour les patients jeunes, en raison de leur plus grande durée de vie. Revers de la médaille, elles nécessitent ensuite la prise d'anticoagulants au long cours, pour éviter que des caillots de sang ne s'y agglomèrent.
Pour diminuer les risques opératoires, l'idéal est de remplacer la valve sans avoir à ouvrir le thorax du patient et arrêter les organes. En vérité, cette technique existe depuis 2002… pour remplacer la valve aortique, plus accessible que la valve mitrale. Il s'agit de la technique d’implantation d'une valve aortique par voie percutanée, ou TAVI en anglais. La voie percutanée consiste à passer par la veine, en l'occurrence la fémorale située dans la jambe, qu'on suit jusqu'au cœur. Mais pour accéder facilement à la valve mitrale il faut passer par la veine de la jambe... Pour arriver à destination sans rien abimer, la valve de remplacement doit donc être très petite.
Chirurgie de remplacement d'une valve aortique par voie fémorale. Crédits : Burger/Phanie/AFP
Une bioprothèse assez flexible pour passer de quelques mm à 3cm de diamètre
Cette problématique de taille de la prothèse est essentiellement technique : un souci "d'ingénierie et de miniaturisation", d'après le Dr Modine, que le CHRU de Lille a résolu fin 2018 en utilisant une toute nouvelle bioprothèse conçue avec la société Céphéa. Contenue dans un minuscule grillage destiné à maintenir le vaisseau sanguin ouvert, appelé "stent", elle reste repliée sur elle-même jusqu'à ce qu'elle ait atteint le bon emplacement : à ce moment-là, elle se déplie et passe de quelques millimètres à 3 centimètres de diamètre ! Le tout en seulement 2 heures d'une opération "relativement facile", d'après le Pr Van Belle, puisqu'elle reprend le principe d'une technique déjà couramment utilisée : la pose de clip sur la valve mitrale (Mitraclip). Il s'agit d'une petite pince visant à réaligner les feuillets de la valve mitrale, et que les médecins savent depuis longtemps amener à l'endroit adéquat par la fémorale. Mais cette nouvelle version de la technique permet de remplacer, et pas seulement réparer, la valve mitrale, ce qui constitue un progrès inouï.
UN PREMIER PAS A PARIS EN 2017. Jusque-là, la seule tentative approchant avait été réalisée quelques mois plus tôt à Paris. Mais si les médecins avaient alors réussi à remplacer la valve mitrale par une bioprothèse, cette dernière était trop grosse pour pouvoir passer par la jambe. Un petit trou avait donc été perforé dans le thorax, ainsi qu'à la pointe du cœur pour y insérer la nouvelle valve. Bien que toujours moins invasive que la chirurgie classique puisqu'elle ne nécessite ni d'ouvrir ni d'arrêter cœur et poumons, cette technique a tout de même l'inconvénient d'endommager le muscle cardiaque. La zone de suture de 2 centimètre devient alors "non fonctionnelle, et le cœur perd une petite partie de sa capacité à pomper", explique le Dr Modine. Or, les patients subissant ce type d'opération ont généralement déjà un cœur moins performant à la base.
Un traitement d'avenir
Ces traitements peu invasifs de la valve mitrale (TMVR en anglais), avec les clips ou la nouvelle technique lilloise, sont aujourd'hui utilisés lorsque la chirurgie classique est contre-indiquée en raison de la fragilité du patient. La technique de pose du clip étant mieux maîtrisée, elle est encore préférée à celle que vient de développer le CHRU de Lille. "Nous sommes tous convaincus que c'est l'avenir, et que ce traitement sera la référence dans 10 ans", affirme cependant le Pr Van Belle. Seul inconvénient de la technique : nécessitant une valve que l'on peut replier, elle interdit de faire usage des valves mécaniques, potentiellement plus durables. Cette incertitude est "le principal frein à l'usage des bioprothèses chez le sujet jeune", d'après le Dr Modine. "L'objectif de durée de vie d'une bioprothèse est de minimum 10 ans, mais des recherches sont en cours pour pouvoir l'améliorer", assure-t-il.
Deux mois après son opération, la patiente opérée à Lille "va très bien", précisent le Dr Modine et le Pr Van Belle. Avec leurs confrères, ils préparent un essai clinique sur une petite dizaine de patients pour vérifier la faisabilité de la procédure, avec de premiers résultats courant 2019.