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La carte des péages : comment les sociétés d'autoroutes réalisent des recettes records

Sur 116 tronçons passés à la loupe, l'augmentation du ticket de péage est de près de 12 % depuis 2011. En 2017, les sociétés d'autoroute ont réalisé un chiffre d'affaires record, à 10,1 milliards d'euros.

Devenues des lieux de mobilisations, de nombreuses gares de péages ont été bloqués ou vandalisés par les « gilets jaunes ».
Devenues des lieux de mobilisations, de nombreuses gares de péages ont été bloqués ou vandalisés par les « gilets jaunes ». (Harsin/SIPA)

Par Samir Touzani, Jules Grandin, Florian Maussion

Publié le 4 févr. 2019 à 10:22

Avec les ronds-points, les dizaines de gares de péage bloquées ou vandalisées à travers la France se sont imposées comme des hauts-lieux de la révolte des « gilets jaunes ». A l'image de la gare de péage 34 sur l'autoroute A9, au sud de Narbonne, ravagée par les flammes dans la nuit du 1er au 2 décembre. La hausse des tarifs annoncée mi-novembre sur les 9.158 kilomètres d'autoroutes concédés par l'Etat à des sociétés privées n'a pas manqué d'ajouter de l'huile sur le feu de la colère des automobilistes, née de la flambée des prix de l'essence.

A l'occasion de l'augmentation annuelle du 1er février, nous avons observé 116 trajets d'autoroute sur la période 2011-2018 (là où l'information était disponible, soit les deux tiers du réseau). S'arrêter à la barrière d'un péage sur ces tronçons coûte en moyenne 11.9 % plus cher qu'il y a sept ans. En comparaison, les prix à la pompe, sujets il est vrai à de fortes fluctuations, étaient plus élevés en 2011 qu'en 2018.

Des hausses de plus de 30 %

Sur les 116 tronçons analysés, cette hausse n'est bien sûr qu'une moyenne. Elle ne reflète pas les fortes disparités présentes sur le territoire. Quand le prix d'un ticket de péage n'a augmenté que de 2,8 % pour le trajet Clermont-Ferrand - Saint Etienne, la hausse sur Rouen-Tours dépasse les 34 % en sept ans ! En 2018, le prix du ticket a bondi de 1,30 euro supplémentaire à chaque passage. Sur l'A28 toujours, le prix du Rouen-Angers est passé de 28,20 euros en 2011 à 37,70 euros en 2018 (+33,6 %). L'Ouest est particulièrement touché par les augmentations, comme le parcours entre Bordeaux-Pau, qui a grimpé de 4,70 euros depuis 2011.

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Ces disparités s'expliquent notamment, selon l'Association des sociétés françaises d'autoroutes (Asfa), « par la somme de tarifs appliqués par plusieurs sociétés » comme c'est le cas pour le tronçon Angers-Rouen qui emprunte les réseaux des concessions Cofiroute et Alis. Pour l'Asfa, ces hausses résultent aussi de la répercussion de 70 % de l'inflation via « des formules inscrites dans les contrats qui ont été validés par l'Etat », lequel en reste le « premier bénéficiaire » : sur un ticket de 10 euros, 4,20 euros lui sont reversés. Au total, plus d'une quinzaine de tronçons ont vu leur prix bondir de plus de 15 % depuis 2011.

Un pactole de 10 milliards en 2017

Les recettes de péages représentent 97,5 % du chiffre d'affaires du secteur autoroutier concédé, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 10,1 milliards d'euros en 2017, selon l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer). Un montant record, en hausse de 3,5 % par rapport à l'année précédente, alimentée par l'augmentation du trafic. La réduction des coûts d'exploitation, avec l'automatisation des péages et l'allongement des concessions, a aussi servi à grossir leur marge, selon l'Arafer.

Une « rente autoroutière » déjà épinglée par l'Autorité de la concurrence en 2014 qui avait dénoncé une « rentabilité exceptionnelle » des sociétés d'autoroutes. Avec une proposition : une nouvelle formule de calcul des tarifs avec notamment la prise en compte de « l'évolution du trafic, susceptible de limiter leur hausse, voire de permettre leur baisse. »

Pas de gel des tarifs en 2019

Si cette proposition n'est pas à l'ordre du jour, les concessionnaires et le gouvernement ont trouvé un accord pour les automobilistes réguliers : « Tout conducteur effectuant au moins 10 allers-retours dans le mois sur un même itinéraire pourra bénéficier d'une réduction de 30 % des tarifs des péages sur l'ensemble des trajets ». Une mesure qui devrait concerner un million d'automobilistes.

Face au refus du ministère des Transports d'allonger la durée des concessions en échange d'un gel des tarifs, la hausse moyenne du prix des tickets de péages de 1,8 % aura bien lieu, en raison des dépenses d'investissement et de maintenance des infrastructures, justifient les sociétés d'autoroutes. Au risque de voir d'autres gares de péage prises d'assaut par des « gilets jaunes ».

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