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« Elle a dû mettre le feu pour se venger » : un habitant accuse une voisine après l’incendie mortel à Paris

Le feu s’est déclenché dans la nuit dans un immeuble du 16e arrondissement, tuant au moins 10 personnes et en blessant une trentaine d’autres.

Par  et

Publié le 05 février 2019 à 04h16, modifié le 05 février 2019 à 16h43

Temps de Lecture 7 min.

Un immeuble qui s’enflamme en quelques minutes. De nombreux morts. Des dizaines de blessés. Des centaines de pompiers mobilisés. Les incendies très violents de ce type surviennent le plus souvent dans des bâtiments vétustes de quartiers pauvres. Mardi 5 février, au milieu de la nuit, c’est au contraire un immeuble moderne du très chic 16e arrondissement de Paris qui a été le théâtre d’un tel drame. Au 17 bis, rue Erlanger, à deux pas de la porte d’Auteuil, le feu a provoqué la mort d’au moins dix personnes, et en a blessé 33, dont 8 pompiers, selon les informations disponibles mardi en fin de matinée.

« Paris est en deuil ce matin », « le bilan est terrible », a réagi immédiatement Anne Hidalgo, la maire de Paris. Arrivée sur place en tout début de matinée, elle a remercié les pompiers, auxquels elle avait déjà rendu hommage la veille pour leur mobilisation lors de l’explosion meurtrière de la rue de Trévise, le 12 janvier. « Aujourd’hui encore ils ont été là, ils ont sauvé des vies, je veux leur dire un immense merci et la gratitude des Parisiens », a-t-elle déclaré.

Cette fois-ci, l’incendie semble d’origine criminelle, selon les premiers éléments recueillis sur place. Une enquête pour « destruction volontaire par incendie ayant entraîné la mort » a été ouverte par le parquet de Paris, et confiée à la police judiciaire. « Elle fera toute la lumière sur les circonstances de ce drame », a promis le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz.

Garde à vue levée pour l’habitante admise en psychiatrie

Interpellée durant la nuit, non loin de l’incendie, une habitante de l’immeuble qui avait été placée en garde à vue, a été admise, à l’issue d’un examen médical et d’un examen de comportement, à l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police. Sa garde à vue a été levée, a annoncé en fin de journée le parquet de Paris.

Elle essayait apparemment de mettre le feu à une voiture et une poubelle, selon des sources policières. Agée de 40 ans, elle « présente des antécédents psychiatriques », a précisé Rémy Heitz. « Elle a, semble-t-il, eu une querelle avec ses voisins, et cela a mal tourné, elle a mis le feu à l’immeuble », rapporte un homme au fait des investigations. Le parquet de Paris n’a pas voulu, à ce stade, confirmer le scénario.

Selon un bilan encore provisoire, dix personnes sont mortes et trente-sept personnes ont été blessées, dont six pompiers.

En conflit récurrent avec son voisin pompier, cette habitante de l’immeuble s’était disputée avec lui dans la soirée. La police s’était déplacée ce soir-là pour un trouble de voisinage, a expliqué une autre source policière. Le Parisien a recueilli le témoignage du voisin :

« Nous étions dérangés par ma voisine qui avait mis la musique très fort chez elle. […] Hier soir [lundi soir] ma compagne est allée frapper à sa porte, et elle s’est fait insulter. Je suis pompier professionnel à la BSPP [Brigade des sapeurs-pompiers de Paris] et c’est pour ça que j’ai appelé le 17, vers 23 h 50. J’ai attendu quarante minutes pour m’entendre dire que ce n’était pas une situation d’urgence. […] Les policiers m’ont dit de partir. Je suis sorti avec ma compagne, je voulais passer la nuit ailleurs. J’ai cru que les policiers l’avaient embarquée donc nous sommes revenus. Mais je suis tombée nez à nez avec ma voisine dans les escaliers. Les policiers étaient repartis. Après leur départ, ma voisine a essayé de défoncer ma fenêtre et ma porte pour se venger. Un voisin m’a expliqué qu’il y avait du papier devant ma porte avec du bois. Elle a dû mettre le feu chez moi pour se venger. Quand je l’ai croisée, elle m’a souhaité bon courage en me disant que j’étais pompier, et que j’aimais bien les flammes. Là, je sens l’odeur de brûlé. »

Il y a « du feu partout »

Il est environ minuit et demi lorsque les pompiers sont appelés sur place, tout près du boulevard Exelmans. Il y a « du feu partout », relatent les témoins. Des flammes jaillissent de toutes les fenêtres. En particulier aux septième et huitième étages, là d’où l’incendie pourrait être parti. L’immeuble sur cour s’est transformé en brasier à une vitesse prodigieuse. Les habitants tentent de fuir. Ils crient au secours. Certains se juchent sur le rebord des fenêtres, avec 20 mètres de vide au-dessous d’eux. Une dizaine d’autres se réfugient sur le toit, au-dessus du huitième étage.

Après plus de cinq heures d’intervention, les pompiers ont finalement réussi, peu après 6 heures du matin, à maîtriser le feu qui a ravagé un immeuble du 16e arrondissement de Paris situé rue Erlanger.

Les quelque 200 pompiers mobilisés, eux, ont de grandes difficultés à accéder aux lieux. « Il faut traverser l’immeuble sur la rue, et on arrive sur une courette desservant le bâtiment qui s’est embrasé, explique le capitaine Clément Cognon, porte-parole des pompiers. C’est pourquoi nous n’avons pas pu déployer nos échelles automotrices, les échelles automatiques, les véhicules. » A la place, les pompiers doivent prendre les échelles à main, traverser le premier immeuble, passer dans le corridor, et, une fois dans la cour, utiliser leurs équipements. Objectif : éteindre le feu, et sauver les personnes menacées.

Les pompiers commencent alors l’ascension de la façade, et parviennent à mettre hors de danger une cinquantaine de personnes qui étaient sur le toit, les corniches et les bords de fenêtres. Certaines descendent par les échelles, d’autres en rappel, accrochées à une corde.

Deux immeubles adjacents sont évacués, par mesure de sécurité. Une soixantaine de personnes se retrouvent ainsi à la rue. Une vingtaine d’entre elles sont abritées dans la mairie du 16e arrondissement, où sont installés des lits de fortune. Les autres trouvent refuge chez des voisins, des amis. Tout le quartier a vécu « une nuit de cauchemar », a témoigné Danièle Giazzi, la maire (Les Républicains) du 16e arrondissement, devant le conseil de Paris.

Fin de l’intervention des pompiers au petit matin du 5 février. La thèse criminelle est privilégiée.

Et ce n’est qu’après 6 h 30 du matin, à l’issue de plus de cinq heures d’intervention, que les pompiers finissent par maîtriser le feu. A 10 heures, mardi, ils étaient toujours sur place pour éviter une reprise de l’incendie, et tenter d’empêcher que le huitième étage ne s’effondre sur le septième.

Minute de silence

« La France se réveille dans l’émotion », a tweeté le président de la République, Emmanuel Macron. De son côté, le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, a salué, sur les lieux du sinistre, « l’immense mobilisation des sapeurs-pompiers » : « Près de deux cent cinquante personnes sont immédiatement intervenues et, au fil de la nuit, ont sauvé plus de cinquante personnes dans des conditions réellement exceptionnelles. Etage par étage, ils ont gravi les huit étages de cet immeuble. »

Le Conseil de Paris s’est ouvert mardi après-midi par une minute de silence en hommage aux victimes. Une cellule d’urgence a été mise en place à la mairie d’arrondissement pour accueillir les victimes, les informer, leur fournir un soutien psychologique et les aider à se reloger. « La mairie du 16e sera le lieu pour les familles, les personnes qui voudront chercher de l’aide, a assuré Anne Hidalgo. La mairie sera là pour les accompagner dans ce qui est un drame et qui nous touche tous ici dans le 16e et partout dans Paris. » La préfecture de police a aussi activé une cellule d’information téléphonique au 0805-200-450.

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C’est le troisième incendie meurtrier survenu en région parisienne en quelques semaines. A la fin de décembre, deux femmes et deux fillettes avaient été asphyxiées dans une tour HLM de la cité Paul-Eluard à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Le 12 janvier, l’explosion d’une poche de gaz rue de Trévise à Paris (9e arrondissement), a fait quatre morts, dont deux pompiers.

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