Le 19 janvier, date des derniers rassemblements de grande ampleur, une vingtaine de villes se sont mobilisées contre la réforme, érodant légèrement la popularité toujours élevée de Viktor Orban. Champion du camp eurosceptique animé par le groupe de Visegrad (Hongrie, République tchèque, Pologne, Slovaquie), le patron du parti Fidesz a perdu trois points en décembre-janvier, mais continue d’écraser les sondages et reste en position de force à un peu plus de trois mois des élections européennes.
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«Misérable petite prolétaire»
Dans l’allocution qui l’a rendue célèbre et l’a transformée en symbole d’une certaine jeunesse excédée par la dérive autoritaire de Viktor Orban, Blanka Nagy a qualifié le parti au pouvoir d’«épidémie perfide et contagieuse», tout en invitant le président Janos Ader, traité de «bite à moustache», et les députés de la majorité à «aller se faire foutre». Blanka assume son coup d’éclat et dit garder la tête froide malgré l’essaim de critiques et d’insultes émanant des défenseurs de l’exécutif.
«Quand Zsolt Bayer [un polémiste réputé, ndlr] me traite de «misérable petite prolétaire» dans son show télévisé, ce n’est pas moi qu’il insulte mais l’ensemble de la classe ouvrière qui cravache pour faire tourner ce pays confisqué par Orban et ses compères», rétorque l’étudiante remontée dont la mère et le beau-père pointent à l’usine Mercedes de Kecskemet. «Je ne regrette en rien la teneur de mes propos et dirais la même chose au mot près si je devais revivre la situation de fin décembre», précise Blanka.
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Plusieurs dénonciations
Ancienne militante lycéenne, la jeune femme dénonce la faiblesse du système local de santé publique où les bakchichs sont rois, s’indigne des salaires largement inférieurs aux standards ouest-européens (qui ont conduit 600 000 Hongrois à s’exiler ces dix dernières années) et fustige l’hégémonie tenace du patriarcat au sein d’une société fermée aux idées féministes.
Son tout premier vote national est allé à la tête de liste centriste-verte du parti LMP, Bernadett Szel, la seule candidate de poids au poste de premier ministre lors des législatives d’avril 2018. Une manière pour Blanka d’affirmer son désir d’une Hongrie où les femmes ne serviraient pas qu’à pouponner, alors que le gouvernement Orban, qui compte dix hommes sur dix ministres de plein exercice, favorise financièrement les naissances et les familles nombreuses afin de réveiller une démographie assoupie.
«Les trolls ne m’affectent pas»
«Le gouvernement veut me discréditer et diffuse de fausses informations sur mon compte car j’ose critiquer le pouvoir et le mettre face à ses responsabilités», souligne Blanka en démentant le penchant pour l’école buissonnière et les résultats scolaires médiocres que lui prêtent les médias pro-Fidesz. «Mes parents étaient contrariés au début, puis ils ont vu que j’affrontais cela calmement et me soutiennent, poursuit-elle. Je reçois souvent des messages haineux sur Facebook, mais les trolls ne m’affectent pas.»
Aînée de six frères et sœurs, Blanka s’est inscrite dans une université de théâtre qu’elle espère intégrer en septembre. D’ici là, un autre défi l’attend: séduire l’auditoire qui l’écoutera dimanche en marge de la manifestation anti-Orban et anti-loi travail prévue dans la capitale magyare.