Le nucléaire continue d’être un sujet clivant en France. Si cette énergie est vantée pour ses faibles émissions de CO2, les critiques sont de plus en plus vives concernant la gestion des déchets. La France a dépassé les 1,5 million de mètres cubes de déchets radioactifs en 2016. Pour les moins radioactifs d’entre eux, ils sont stockés en surface. Les autres sont en attente d’une solution viable.

Ça déborde ! Selon le dernier inventaire publié par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) en juillet dernier (1), la France a dépassé les 1,5 million de mètres cube de déchets radioactifs, toutes filières confondues, en 2016, soit l’équivalent de 400 piscines olympiques. Dans l’usine de La Hague, dans la Manche, des quantités considérables de combustible usé, représentant l’équivalent de plus de 110 cœurs de réacteurs en volume, attendent d’être stockés ailleurs. La marge d’espace disponible y est inférieure à 7,4 %, selon les estimations d’EDF et Orano  (ex-Areva).
La presqu’île du Cotentin est ainsi devenue l’une des régions les plus nucléarisées de la planète, s’inquiète Greenpeace. “Il n’existe pas de solutions sûres pour gérer les déchets nucléaires, en particulier les plus radioactifs, de façon définitive, alerte Yannick Rousselet, chargé de campagne nucléaire à Greenpeace France. Un nucléaire sans solution pour ses déchets c’est comme un avion sans piste d’atterrissage”. De son côté, Orano qui gère l’usine de la Hague, on se veut rassurant. “Il n’y a pas de risque de saturation des piscines avant 2030”, explique un porte-parole.
Au terme du fonctionnement et du démantèlement des 58 réacteurs du parc nucléaire français, le volume de déchets radioactifs aura été multiplié par trois ou par quatre. Or, dans l’Hexagone comme partout dans le monde, les sites d’entreposage et de stockage arrivent à saturation, souligne un récent rapport de l’ONG (2). L’Andra dispose actuellement de trois sites de stockage, dont un est en cours de fermeture, pour les déchets de très faible activité, et de faible et moyenne activité à vie courte. Ils représentent 90 % du volume de déchets. Pour les 10 % restants qui sont aussi les plus radioactifs, un stockage géologique en profondeur est envisagé.
Les déchets radioactifs en france
Il s’agit du site de stockage de Bure, aux confins de la Meuse et la Moselle. Cigéo y teste depuis le début des années 2000 l’enfouissement de déchets nucléaires de haute activité et à vie longue, dits “ultimes” à 500 mètres de profondeur et s’apprête à déposer cette année sa demande d’autorisation de création. Mais sur le terrain, la situation est de plus en plus tendue depuis l’arrivée en 2015 d’une nouvelle génération de militants anti-nucléaires qui s’opposent à l’enfouissement.
Pour apaiser les tensions, le gouvernement a annoncé un nouveau débat public – national cette fois – dans le cadre de la cinquième édition du Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR). Une première ! Censé débuter en janvier, il a été repoussé au printemps. Trois expertises préalables ont néanmoins été lancées sur la possibilité d’un entreposage à sec, sur l’état des lieux du stockage géologique profond au niveau mondial et sur les intérêts économiques du nucléaire en France.
La vérité c’est que nous arrivons à une situation critique liée à la saturation des piscines de stockage. Pour autant, opter pour l’enfouissement profond serait une erreur grave car on ne pourrait pas revenir en arrière, ajoute Yannick Rousselet. Ce n’est pas l’avis d’Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État à la transition écologique. Lors d’une visite sur site fin janvier, elle déclarait : “Le stockage géologique en couche profonde est la meilleure solution pour faire face à des déchets qu’il faut stocker, de façon satisfaisante sur une longue période“.
Concepcion Alvarez, @conce1
(1) Voir le dernier inventaire de l’Andra (juillet 2018) 
(2) Voir l’étude de Greenpeace sur “La crise mondiale des déchets nucléaires”

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