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Pourquoi les Français sont-ils si pessimistes ?

Lucien Fauvernier
Publié le 07/02/2019 à 15:13 Modifié le 12/02/2019 à 18:28
Pourquoi les Français sont-ils si pessimistes ?

Lors de sa toute première conférence en France intitulée Hope Circuit, Martin Seligman, fondateur de la psychologie positive, s'est interrogé sur les raisons qui relèguent la France en bas du classement des pays les plus heureux, derrière l'Allemagne ou le Royaume-Uni. Le pessimisme français aurait-il une raison historique ou ne serait-il qu'une posture ? Dans tous les cas, nous gagnerions beaucoup à adopter la positive attitude !

« La France est le pays le plus pessimiste de tous les pays riches. Toutes les études le montrent. Les Français sont encore plus pessimistes que le peuple Palestinien ! Pourquoi ? Un des exemples marquant est le résultat d’une enquête portant sur l’avenir des enfants. 80% des Français pensent que leurs enfants vivront matériellement moins bien qu’eux. C’est le pire chiffre de tous les pays européens. » Lors de sa première conférence en France, Martin Seligman, le fondateur de la psychologie positive, a invité ses auditeurs à réfléchir sur les origines du pessimisme français.

Aux origines du pessimisme français

« Cette façon de voir le verre à moitié vide est héritée d’une longue histoire de protestation et est intimement liée au caractère révolutionnaire de la France, explique Martin Seligman. Elle a été très importante dans la vie politique et intellectuelle française, c’est ce qui a poussé le peuple Français et ses représentants à dire, à dénoncer, ce qui n’allait pas. C’est un réel avantage de savoir identifier ce qui ne va pas pour pouvoir changer, de transformer ce qui ne va pas, en ce qui est juste.

En revanche, l’inconvénient d’une culture qui, quelque part, valorise le pessimisme, la protestation et la plainte, c’est qu’elle aura à subir, et cela est scientifiquement prouvé, une plus forte tendance à la dépression, une moins bonne santé, une moins bonne productivité au travail… On peut d’ores et déjà s’interroger sur le futur d’une civilisation dont le pessimisme est si profondément ancré.

La France est beaucoup plus pessimiste qu’elle ne devrait l’être

Le taux de satisfaction global en France est étonnement bas en comparaison du reste de l’Europe. Et il ne cesse de baisser depuis 2005, alors même que la plupart des statistiques économiques montrent des tendances favorables.

La France se hisse au top 10 des puissances financières mondiales, mais n’est que 23ème au classement de l’ONU des pays les plus heureux. C’est pire que le Royaume-Uni, que les États-Unis… Combien de personnes en France estiment qu’elles ont une vie bonne, voire très bonne ? Faites un sondage et vous obtiendrez un taux de satisfaction bien plus bas qu’au Royaume-Uni alors que les données économiques là-bas sont globalement moins bonnes qu’en France.

De ce point de vue, la France est clairement hors-jeu, le pays est beaucoup plus pessimiste qu’il ne devrait l’être. 

Quelque chose de frappant encore se produit lorsque l’on compare, par exemple, les statistiques du bonheur entre le Danemark et la France. Un danois sans emploi est plus optimiste et heureux qu’un employé français moyen. La question est de savoir : est-ce que ce pessimisme est une posture ? Ou fait-il vraiment partie de l’esprit français ?

Pour aller plus loin

D.R

Martin Seligman lors de sa conférence Hope Circuit à Paris.

Cette conférence organisée par Positran a eu lieu dans le cadre du Festival des énergies positives, qui propose de février à juin 2019 de nombreux événements pour cultiver l’optimisme et le bien-être. 

Et si le gouvernement s’intéressait (enfin) au bonheur ?

Peut-être qu’une des pistes à suivre pour sortir de ce marasme est politique. J’ai tendance à penser que les gens votent pour ou contre leur bonheur. Une étude très parlante a été réalisée lors de l’élection présidentielle américaine entre Donald Trump et Hillary Clinton. Elle s’interrogeait sur le lien entre économie, bonheur et orientation du vote.

Les chercheurs ont découvert que 8% des votants pour Trump le faisaient uniquement en raison de leur bien-être. Ce chiffre augmente nettement si l’on s’intéresse aux inquiétudes concernant l’avenir : 30% des électeurs de Trump pensaient que leur situation se dégraderait dans les 5 ans à venir.

Cet exemple montre clairement comment politique et bien-être de la population sont liés. Chaque dirigeant de chaque pays devrait s’intéresser de très près au bonheur de sa population, et peut-être encore plus en ce qui concerne la France…

3 pistes politiques pour une société plus heureuse

Voici pour terminer quelques pistes qui, selon moi, pourraient être utilisées par un dirigeant politique pour prendre soin du bien-être de sa population.

Les troubles psychiques, et surtout la dépression, sont le premier facteur de pessimisme à grande échelle. Soigner la dépression, et plus globalement avoir un grand plan de santé mentale publique, est quelque chose de crucial. 

Du côté de l’enseignement, le recours à l’éducation positive devrait être quasi-systématique pour donner aux enfants les clés d’accès au bien-être et au bonheur.

Une autre piste pourrait être de redonner de l’estime aux personnes sans emploi, qui ne devraient pas être pointées du doigt et désignées comme des bons à rien qui ne rapportent rien. Chaque être humain est vecteur de richesse, sans que celle-ci soit nécessairement financière… »

Pour aller plus loin

==> Le jour où j’ai décidé d’être heureux/se

Etre heureux se décide et s’apprend, affirment les tenants de la psychologie positive. Mais par où commencer ? Quels sont les premiers pas à faire sur le chemin du bonheur ? Notre journaliste a testé quelques exercices. Elle raconte cette première journée. Et ses effets.