Blanquer : «Oui, beaucoup d’enfants juifs ont quitté l’école publique»

Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Education nationale, reconnaît le phénomène évoqué il y a quelques jours par le député LR Éric Ciotti. Mais il assure ne pas avoir connaissance de rapports sur le sujet.

 « Le phénomène existe bel et bien, et pas depuis hier matin », confie Jean-Michel Blanquer.
« Le phénomène existe bel et bien, et pas depuis hier matin », confie Jean-Michel Blanquer. LP/Jean-Baptiste Quentin

    « Est ce qu'il y a encore un enfant juif dans une école publique de Seine-Saint-Denis? » questionnait le 13 février, à l'antenne de France info, le député (LR) Éric Ciotti, évoquant « des rapports » documentant une fuite des élèves de confession juives « chassés » par l'antisémitisme.

    Qu'en est-il ? De rapports, « il n'y en a pas ou en tout cas je ne vois pas à quoi il fait référence, recadre le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer. Pour autant, « le phénomène existe bel et bien, et pas depuis hier matin, confie-t-il au Parisien. Il a abouti à ce que beaucoup d'enfants juifs ont quitté l'école publique. »

    Sur le terrain, le constat est partagé par les enseignants que nous avons interrogés, affectés de longue date en banlieue parisienne, au collège ou au lycée. « Les collègues ont constaté que depuis le début des années 2000, beaucoup de familles de confession juives ont inscrit leur enfant dans le privé », abonde Christine Guimonet, professeur de lycée à Pontoise (Val-d'Oise) et porte-parole de l'association des professeurs d'histoire-géographie.

    Des raisons religieuses et aussi de sécurité

    « Certains font ce choix pour transmettre à leurs enfants des valeurs culturelles ou religieuses, mais d'autres qui auraient préféré le public ont pris cette décision clairement pour mettre leurs enfants à l'abri », précise-t-elle.

    « Il ne faut pas nier la réalité. Il arrive que j'entende des propos relayant des préjugés sur les Juifs, comme sur les homosexuels et sur les Roms, et oui il y a semble-t-il très peu d'élèves juifs dans mon établissement, mais il serait compliqué d'en tirer un quelconque lien de cause à effet… » réfléchit cette enseignante de la banlieue nord de Paris.

    Voilà des années qu'elle travaille avec ses élèves à déconstruire les thèses complotistes et les préjugés, notamment antisémites. Elle n'est pas la seule. « C'est un travail de fond, qui prend énormément de temps mais qui fonctionne », assure Christine Guimonet. « Il ne s'agit pas de faire des leçons de morale aux élèves, mais un vrai travail d'histoire, documenté. C'est le seul moyen de combattre de façon durable l'antisémitisme. »