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«Antisémitisme», «sionisme»... le sens et le poids des mots

Des portraits dessinés de Simone Veil sur deux boîtes aux lettres, couverts de croix gammées, dans le XIIIe arrondissement de Paris. BENOIT TESSIER/REUTERS

Voilà plusieurs semaines que les actes et les paroles antisémites envahissent l'espace public. «Sioniste», «juif», «sémite»: ces mots ont un sens précis et leur utilisation nous rappelle leur poids dans l'Histoire. Le Figaro revient sur leur définition parfois détournée.

Le portrait de Simone Veil couvert de croix gammées, l'inscription «Juden» sur la vitrine d'un magasin, les insultes proférées à l'encontre de l'Académicien Alain Finkielkraut en marge de la manifestation des «gilets jaunes»... Les actes antisémites ont augmenté de 74% en France en 2018. «Sioniste», «juif», «antisémite»: ces mots ont un sens précis et leur utilisation nous rappelle leur poids dans l'Histoire. Une histoire et un sens. Le Figaro revient sur leur définition parfois détournée.

● Sémite

Le terme s'emploie généralement sous sa forme négative. Mais qu'en est-il du terme «sémite» lui-même? Attesté dans le dictionnaire depuis 1845, le mot «sémite» né du latin Sem et de l'hébreu Shem dérive à l'origine du nom de «Sem», un des trois fils de Noé, à qui «la tradition attribue les racines des peuples sémitiques», note le CNRTL. Le Sémite est donc relatif aux juifs et s'emploie pour désigner «les différents peuples provenant d'un groupe ethnique originaire d'Asie occidentale». Le Petit Robert donne comme exemple: «Les Arabes, les Éthiopiens, les Juifs sont des Sémites.»

Son opposé, «antisémite», est pour la première fois attesté en 1890 dans les pages du dictionnaire. Il qualifie des individus «hostiles à la race, à l'ethnie et/ou à l'origine juive». Précisons que son emploi est impropre s'il se veut exclusivement réservé aux Juifs. Comme vu ci-dessus, le terme «sémite» désigne à la fois la communauté juive mais aussi les Arabes.

● Juif

Le mot «juif» a connu depuis son apparition en 980, de profonds changements typographiques et sémantiques. Pour comprendre l'étymologie et la signification de son nom, il est nécessaire de se replonger un instant dans la Bible. Car le mot «juif» est en réalité issu de Juda. À ne pas confondre avec Judas, l'homme qui trahit Jésus.

Du latin Judaeus, «de la tribu de Juda», emprunté au grec ioudaios et lui-même dérivé de l'hébreu Yehuda, le terme juif provient du nom du «personnage biblique, fils de Jacob et de Léa, qui fut le chef d'une des douze tribus d'Israël». Juda fut donné par extension sémantique aux Hébreux qui faisaient partie de sa tribu et qui occupèrent le territoire de l'ancien royaume de Juda, après l'épisode de l'Exil, au VIe siècle avant J.-C..

D'abord écrit judeu au Xe siècle, le mot voit progressivement sa graphie évoluer pour Juef et Juiu au XIIe siècle, avant de prendre la forme qu'on lui connaît au XIIIe siècle. Le mot «juif» désigne de nos jours «celui ou celle qui appartient au peuple issu d'Abraham et dont l'histoire est relatée dans la Bible». Le terme donne également naissance à un large lexique.

● Sionisme, séfarade, ashkénaze

Notons ainsi le terme «séfarade», issu de l'hébreu sefarad, «Espagne», signifiant «Juif d'Espagne et du Portugal, au Moyen Âge ; le mot «ashkénaze», cité dans la Bible puis appliqué durant l'ère médiévale et lors de la diaspora d'Allemagne, faisant référence «à l'individu qui appartient à la branche allemande du peuple juif, c'est-à-dire, le judaïsme septentrional».

Le terme «sionisme», né du Sion, montagne de Jérusalem, qui désigne un «mouvement politique et religieux ayant pour objet de reconstituer une nation juive en Palestine», note le dictionnaire de l'Académie française. Pour rappel: Si le mot juif n'est pas fixé par l'usage, il est toutefois entendu que le terme s'écrit avec une minuscule lorsque ce dernier désigne un croyant (comme les chrétiens et musulmans) mais avec une majuscule quand «Juif» caractérise par synecdoque «le peuple».

● Israélien, israélite

Les deux mots peuvent parfois se retrouver employés comme synonymes. À tort. Le mot «Israélien», créé à la suite de la fondation de l'État d'Israël en 1948, possède par essence une signification géopolitique. Il désigne «celui qui vit en Israël» et ce «qui concerne, qui appartient à l'État d'Israël, à ses habitants». Le terme «israélite», quant à lui, écrit sans majuscule, porte davantage en ses racines une consonance religieuse.

Attesté dès le XVe siècle, note le Petit Robert, le terme israélite qualifie un «descendant d'Israël, l'autre nom de Jacob dans la Bible». Il peut également désigner dans un usage vieilli «une personne appartenant à la communauté, religion juive». Prudence toutefois sur cette dernière définition! Le thésaurus nous rappelle que le mot «israélite», pris dans ce sens, «peut avoir des connotations antisémites chez ceux qui évitent l'emploi du mot juif».

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«Antisémitisme», «sionisme»... le sens et le poids des mots

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5 commentaires
  • Heliostwa283

    le

    Je suis Français Catholique de Père et mère catholique eux mêmes , mon père et ma mère ont eu des parents Français catholiques des deux côtés qui eux ont eu des parents Français catholique , j'ai 60 ans,je suis en retraite, si je critique la colonisation israélienne, suis je considéré comme un antisémite? Puisque je suis contre le sionisme qui a pour but de coloniser toute la Palestine.Est ce une bonne question ou est ce que je me trompe sur la définition du sionisme?.

  • Heliostwa283

    le

    Je suis Français Catholique de Père et mère catholique eux mêmes , mon père et ma mère ont eu des parents Français catholiques des deux côtés qui eux ont eu des parents Français catholique , j'ai 60 ans,je suis en retraite, si je critique la colonisation israélienne, suis je considéré comme un antisémite? Puisque je suis contre le sionisme qui a pour but de coloniser toute la Palestine.Est ce une bonne question ou est ce que je me trompe sur la définition du sionisme?.

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