Le nous est un abus de langage : épisode • 1/5 du podcast Consistance du nous

Graffitis antisémites sur des portraits de Simone Veil à Paris.  ©AFP - JACQUES DEMARTHON / AFP
Graffitis antisémites sur des portraits de Simone Veil à Paris. ©AFP - JACQUES DEMARTHON / AFP
Graffitis antisémites sur des portraits de Simone Veil à Paris. ©AFP - JACQUES DEMARTHON / AFP
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Si je dis « nous », y êtes-vous ? En étant au plus près de l’histoire et des histoires, du langage et des textes, de la poétique et de la politique, nous tenterons, durant toute la semaine, de réfléchir à ce qui nous fait tenir ensemble, malgré tout. Ce soir, avec Delphine Horvilleur.

Avec

On aurait tant aimé que le dernier livre de Delphine Horvilleur, Réflexions sur la question antisémite, ne soit pas d’une brûlante actualité. Mais il l’est. Et s’il brûle d’une grave inquiétude, c’est aussi au feu joyeux de cet art de lire qui est, en lui-même, une réponse à la méchanceté des temps : commenter les textes sacrés, la littérature rabbinique et les légendes juives à la recherche de la figure antisémite, c’est trouver cette béance identitaire qui menace toujours la robustesse du nous. 

J'étais persuadée que ma génération n'aurait pas à vivre cela [antisémitisme] [...] Je me disais que la Shoah était si proche que le monde avait compris, que nous allions vivre une forme d'"immunité", que l'antisémitisme reviendrait sans doute, mais que ma génération aurait la chance d'être née en cette parenthèse particulière qui allait nous permettre d'être sereins. 

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Nous n'en voulons pas aux Juifs pour ce qu'ils font, nous n'en voulons pas aux Juifs pour ce qu'ils ont, contrairement à ce que l'on entend parfois. Nous n'en voulons pas aux Juifs pour ce qu'ils sont, puisque même lorsqu'ils ne sont plus on continue à leur en vouloir. C'est en cela qu'il s'agit d'une haine à nulle autre pareille, dans la mesure où l'on continue à en vouloir aux Juifs même quand ils sont morts.

On a accusé les Juifs et les femmes de la même chose : hystériques, lascifs, vénales [...] Crise de virilité et antisémitisme marchent souvent main dans la main [...] Au Moyen- Âge les gens étaient persuadés que les hommes juifs avaient leurs menstruations car leurs corps ne pouvaient pas être complets, ils incarnaient la porosité et la défaillance, comme les femmes.

Il n'existe pas une façon monolithique d'être juif.

En France nous sommes coincés dans des questions d'un conservatisme religieux très important, ce qui peut paraître surprenant car la France est un pays progressiste de mille manières.

Ce qui est troublant avec cette phrase "Juif, peuple élu", c'est que les antisémites y croient bien plus que les Juifs eux-mêmes. Elle est généralement très mal interprétée, et n'a en réalité rien à voir avec une forme de prétention ou de supériorité, et s'applique plus à un devoir à rendre, qu'à un droit. 

Extrait musical : Noa - Babel

Pour en savoir plus

- Tenou'a - Atelier de pensée(s) juive(s)

- Delphine Horvilleur

Entre-Temps est une revue numérique d'histoire actuelle, collective, collaborative et gratuite, attachée à la chaire de Patrick Boucheron au Collège de France.

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