Street art de l’impossible : le graffiti en braille de The Blind

Ce Nantais déjanté de 35 ans s'est mis en tête de graffer pour les aveugles. Absurde, génial, ou les deux ?

Par Olivier Granoux

Publié le 02 février 2019 à 13h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 01h03

Du street art en braille. L’idée ne manque ni d’audace, ni d’originalité ; et l’artiste The Blind la met en pratique depuis plus de 15 ans. « L’idée m’est venue par provocation. Le challenge semble au départ impossible : faire du graffiti, un art visuel pour les non voyants. C’était drôle, absurde, j’ai foncé ».

Ce graffeur nantais de 35 ans, qui voit très bien avec ses lunettes, prolonge donc sa passion pour l’écriture en collant dans la rue des moulages ronds en plâtre, points en relief de messages à l’humour provocant : « Ne pas toucher », « A perte de vue », « broyer du noir », ou « Pas vu pas pris » sur le Palais de justice de Nantes…

Pour l’ex-étudiant des Beaux Arts, son travail questionne aussi l’interaction obligatoire du passant avec l’œuvre, il faut la toucher pour en comprendre le sens. Elle impose aussi un lien entre voyant et non voyant pour pouvoir la décrypter.

“L’art te touche ? ”, Palais de Tokyo, Paris.

“L’art te touche ? ”, Palais de Tokyo, Paris. © The Blind

Pour sa première exposition solo à Paris, The Blind décline sur toiles et photos son concept d’art pour tous. Toutes les œuvres sont à toucher et à lire– un alphabet est fourni, rendant le braille ludique et complice au plus grand nombre. « Je veux casser les codes : avoir de l’interactivité avec l’œuvre, on peut ressentir, être surpris par la matière ».

Au-delà des slogans parodiques, le Nantais joue aussi sur les fonds : on découvre ainsi une sensuelle toile en plumes, d’autres qui font du bruit ; des photos en noir et blanc, souvenirs de voyage ou portraits intimes.

 

  © The Blind

Une première expo parisienne, comme une belle revanche pour ce dislexique pendant des années, qui sait ce que le handicap veut dire. Et même s’il ne se sent pas particulièrement une âme d’ambassadeur de la cécité, il aime se frotter au quotidien de jeunes aveugles « Je suis intervenu plusieurs fois en institut, c’est génial. Les enfants touchent le plâtre mouillé, ils s’en mettent partout, c’est très drôle. C’est fort de réaliser qu’ils voient le monde seulement à travers la lecture ou le son. C’est d’ailleurs une alliance sur laquelle je travaille »

A VOIR (et à toucher ) : Dans l’antre de, jusqu’au 9 fév. à la Art&Craft galerie, 32, Bd du général Jean Simon, 13e. Entrée libre.

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