Pour remplacer les pailles en plastique, deux Normands créent des pailles… en paille

Les tiges en plastiques seront proscrites dans deux ans. Deux amis veulent les remplacer par des pailles céréalières.

 L’agriculteur Mike Sallard (ici à côté de son père Gilles) à l’origine de cette innovation de pailles… en paille bio !
L’agriculteur Mike Sallard (ici à côté de son père Gilles) à l’origine de cette innovation de pailles… en paille bio ! LP/Bertrand Fizel

    Alors que les pailles en plastiques seront interdites en 2021, deux amis ont eu l'idée géniale de remettre au goût du jour des pailles… en paille! Le premier, Mike Sallard, 26 ans, est agriculteur bio à Courgeoût (Orne) : « C'est en voyant sur Internet la vidéo d'une tortue en souffrance à cause d'une paille dans la cavité nasale que j'ai pris conscience qu'il fallait faire quelque chose ».

    Son compère, Jeff Lubrano, est quant à lui designer à Paris. « Je me disais moi aussi que je devrais apporter ma petite contribution au mieux-être environnemental. Et j'ai découvert qu'en France, on consomme plus de 9 millions de pailles par an ! Pour quelques secondes de plaisir, on est prêt à utiliser un produit en plastique qui va mettre des centaines d'années à se dégrader. »

    Encore fallait-il trouver une alternative crédible au plastique… « On n'a rien eu besoin d'inventer. La solution nous est apparue comme une évidence : il y a un siècle, avant l'apparition de la paille en carton, on utilisait déjà des tiges de céréales pour boire. Il nous suffisait donc de revenir aux sources : fabriquer une paille en paille ! », poursuit-il. Ensemble, ils ont d'abord cherché la céréale la mieux adaptée.

    « Très vite, c'est le seigle qui s'est imposé. On taille dans la tige des pailles de deux formats différents : 21 cm pour les boissons froides et 15 cm pour les boissons chaudes. Ensuite, il y a un processus de préparation de la paille pour la laver, la sécher. Il faut qu'elle reste bien blanche et qu'elle ne pourrisse pas, tout en étant absolument bio. Ça, c'est notre petit secret maison. », explique Mike Sallard.

    Moins de 8 euros la boîte de 100 pailles

    Pour l'instant, le jeune agriculteur n'a planté que 1,5 ha de seigle destinés exclusivement à cet usage. « Cela devrait nous permettre de produire 500 000 pailles. On veut faire les choses progressivement. Et voir comment ça se passe à la fois au niveau de la production et de la commercialisation ».

    Pourtant, tous les feux semblent déjà au vert : « L'engouement est incroyable ! On reçoit tous les jours des appels de grands distributeurs, de bars mais aussi de plusieurs restaurants étoilés à Paris et en province qui sont déjà prêts à nous acheter le produit ! », se réjouit Jeff Lubrano.

    Pas question pour autant de s'enflammer : « Le marché est certes énorme. On espère convaincre les différentes enseignes de fast-food. Mais notre démarche est avant tout vertueuse. On préférerait que personne n'utilise plus de paille du tout. Mais s'il doit encore y en avoir, autant qu'elles soient biodégradables et si possible made in France. Et pour l'heure, nous sommes les seuls dans ce cas. Et nous allons même pousser la démarche plus loin. Le terrain sera travaillé par des chevaux percherons pour limiter notre empreinte carbone. Et tous les déchets céréaliers vont être intégralement réutilisés en matériaux de rembourrage ! ».

    Avant de se retrouver dans vos verres cet été, cette paille vertueuse s'est déjà trouvé un nom : La Perche, « en référence à la région où nous cultivons la céréale, mais aussi comme un clin d'œil à la perche que l'on peut tend à l'environnement en apportant chacun notre petite pierre à l'édifice. » Reste enfin la question du prix : une boîte de 100 pailles devrait coûter un peu moins de 8 euros.