En Belgique, la couverture sexiste d'un magazine scandalise des avocates

Publié le Vendredi 22 Février 2019
Louise  Col
Par Louise Col Journaliste
Le palais de justice de Bruxelles
Le palais de justice de Bruxelles
Une publication d'une association d'avocat·es belges a fait bondir. On y voit une femme seins nus au pied d'une statue.
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On ne peut pas mettre des femmes à moitié nues partout. Il va falloir sans remettre et avoir un peu plus d'imagination.

Dans ce cas précis, c'est un magazine de la Conférence du jeune Barreau, association d'avocat·es bruxellois·es, en Belgique qui fait parler d'elle. Le trimestriel a sorti son numéro de février à avril avec en couverture une femme, posant lascivement, seins nus, adossée aux pieds d'une statue du grand escalier du Palais de justice de Bruxelles.

Cela a fait réagir l'avocate Caroline Dumoulin, qui dénonce le mauvais choix de cette couverture dans un messge publié sur Facebook :

"Quand on essaye de couvrir le mauvais goût en usant du prétexte de la libération de la femme... Je suis triste de ce choix. Même si on me rétorquera que c'est une façon d'attirer l'attention, que c'est humoristique, sarcastique, ironique, que c'est un parallèle avec la statue ou toute autre raison, je remarque que c'est encore et toujours la femme qui est mise à nu dans tous les sens du terme. Pourquoi, sous prétexte de libération, devons nous exposer une femme nue aux yeux de tous."

Dans une profession qui, tout comme en France, reste encore très sexiste, elle poursuit : "Est-ce que personne n'a lu les postes de consoeurs harcelées à tout bout de champ ! Est-ce que personne n'a entendu les plaintes de consoeurs qui ne supportent plus d'être traitées comme des bouts de viande dans leur propre milieu professionnel ?"

Avant de conclure : "Je suis atterrée de ce choix, atterrée que personne ne se soit posé la question du ressenti des consoeurs, atterrée qu'aucune autre idée ne soit venue à l'esprit, pour illustrer la libération de femme, que d'en exposer une à moitié nue."

Une justification bancale

Interrogée par la Libre Belgique, la présidente de l'association Anne-Claire Dombret s'explique ainsi : "La publication de cette couverture a procédé d'un choix artistique de la rédactrice en chef du périodique"

Dans un édito à l'intérieur de la publication Audrey Despontin, secrétaire du CJB, justifie cette couverture : "On a l'habitude de dire [...] que la parole des femmes s'est libérée. C'est heureux évidemment et les femmes de la Commission administrative du Jeune Barreau ne se privent au demeurant pas d'en faire usage, que ce soit au travers des présentes lignes ou du choix de la couverture de ce périodique."

La secrétaire ajoute ensuite : "Alors, pourquoi devrions-nous entraver le chemin de celles qui, par choix et non par crainte, fixent leurs propres limites et tracent les contours de la blague, de la tentative – importune ou non- de séduction, de l'humiliation, du harcèlement ?"

"Prendre la parole à leur place, les victimiser malgré elles, ne reviendrait-il pas à réduire les femmes, une fois de plus, au silence ?"

Une association de juristes féministes belges, Fem&L.A.W, démonte pourtant ce choix de photo en expliquant sur un ton ironique : "Nul ne pourrait en effet, de bonne foi, percevoir la moindre différence entre la demi-nudité de Lycurgue, roi de Sparte et législateur légendaire apparemment plongé dans de profondes réflexions, et celle de la jeune femme voluptueuse qui pose à ses pieds sur votre photo de couverture [...] On n'identifie pas davantage, sur cette photographie, la moindre position de subordination entre la jeune vestale dénudée et le patriarche mythique."