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Cancer du col de l’utérus: un test à faire chez soi pourrait améliorer le dépistage

Le test HPV par autoprélèvement pourrait bientôt s’inviter dans le dépistage du cancer du col de l’utérus. VOISIN/PHANIE/phanie

Une grande étude conclut à l’intérêt des autotests pour augmenter la participation au dépistage du cancer du col de l’utérus chez les femmes de plus de 30 ans.

Le test HPV par autoprélèvement pourrait bientôt s’inviter dans le dépistage du cancer du col de l’utérus. Une méta-analyse parue dans le British Medical Journal et incluant plus de 80 études montre que ces tests issus de prélèvements effectués par les femmes elles-mêmes sont extrêmement sensibles et efficaces pour prédire le risque de ce cancer.

Ils seraient même quasiment aussi fiables que ceux effectués par un médecin et, surtout, leur utilisation permet d’augmenter le taux de participation au dépistage en touchant des femmes qui n’ont pas recours au frottis. Une publication qui tombe à point nommé alors que le dépistage du cancer du col de l’utérus a été généralisé fin janvier 2019 aux 17 millions de femmes âgées de 25 à 65 ans dans le pays.

Actuellement, le dépistage repose sur la recommandation d’un frottis tous les trois ans entre 25 et 65 ans

Actuellement, le dépistage repose sur la recommandation d’un frottis tous les trois ans entre 25 et 65 ans. Ce prélèvement réalisé au niveau du col de l’utérus permet d’analyser les cellules et de repérer d’éventuelles anomalies.

Mais depuis quelques années, l’attention se porte de plus en plus sur les tests HPV. Ils permettent, par un prélèvement identique à celui du frottis, de détecter la présence de virus HPV (papillomavirus humain), à haut risque de cancer, en particulier les sous-types HPV 16 ou 18 retrouvés chez environ 12% à 15% des femmes. L’infection peut disparaître spontanément mais le virus peut aussi provoquer des lésions susceptibles d’évoluer en tumeur maligne.

Quand un frottis est anormal, ce test HPV est déjà pratiqué et remboursé en France pour faciliter le diagnostic. Mais plusieurs pays basculent vers son utilisation en dépistage primaire à la place du frottis, à l’instar des Pays-Bas, par exemple, pour la simple et bonne raison qu’il est beaucoup plus sensible: plus de 95 % contre environ 60% à 70% pour le frottis.

Autrement dit, si un test HPV est négatif, le risque de cancer est considéré comme proche de zéro pendant les cinq ans à venir alors qu’un frottis normal attestant de cellules a priori saines, n’écarte pas totalement la possibilité d’une tumeur. En outre, la version «autoprélèvement» de ce test intéresse au plus haut point les autorités de santé en raison de son utilité chez les femmes échappant au dépistage. Cette fois, ce n’est pas le médecin qui pratique le prélèvement mais la femme elle-même au niveau vaginal à l’aide d’un simple écouvillon envoyé à un laboratoire.

Nouvelle étude

La méta-analyse parue dans le British Medical Journal confirme que la réalisation de ce test aboutit à des taux de diagnostic de lésions précancéreuses équivalents à ceux obtenus quand il est effectué par un médecin. Mais surtout, un envoi directement à domicile chez des femmes n’ayant pas recours au frottis permet de doubler le nombre de personnes dépistées par rapport au fait de leur adresser une invitation et une relance pour consulter un gynécologue. Or, en France, environ 40 % des femmes entre 25 et 65 ans n’effectuent pas régulièrement un frottis. Autant dire que la marge de progression est importante.

« Ce test offre une très bonne opportunité de ramener des femmes dans le circuit du dépistage »

Dr Ken Haguenoer

Cette méta-analyse inclut notamment les travaux du Dr Ken Haguenoer, du Centre de coordination des dépistages des cancers au CHU de Tours et responsable du programme Apache en France. Ce dernier a permis d’évaluer les tests par autoprélèvement au cours de ces sept dernières années chez des centaines de femmes à travers trois études, Apache I, II et III.

Ces études ont prouvé l’excellente sensibilité du test dans des conditions de transport sûres et peu coûteuses et sa très bonne acceptabilité par les femmes dès lors que le test est envoyé à domicile. Les résultats ont également montré que 90 % des femmes ayant eu un résultat HPV positif ont donné suite en allant effectuer un frottis pour vérifier la présence de cellules anormales.

«Ce test offre une très bonne opportunité de ramener des femmes dans le circuit du dépistage alors qu’elles en étaient exclues en raison d’un isolement géographique, d’une réticence pour l’examen gynécologique ou autre. Par contre, il ne peut s’agir d’une solution unique en ce sens où il ne remplacera jamais la visite chez un médecin qui permet d’échanger et d’aborder de nombreuses questions de santé», estime Ken Haguenoer. Une nouvelle étude Apache IV coordonnée cette fois par Julie Boyard dans ce même centre débutera cette année autour des aspects socio-économiques. «L’objectif est cette fois de définir les conditions dans lesquelles le test sera le mieux utilisé et à moindre coût pour la collectivité afin d’éclairer les décideurs publics dans le cadre des décisions à venir.»


Le test du papillomavirus humain est inutile avant 30 ans

L’autotest de recherche du papillomavirus humain (HPV) est performant, oui, mais à partir de 30 ans. Non pas que l’autoprélèvement ne soit pas possible avant cet âge, mais le test n’aurait aucune validité, aucune valeur prédictive sur le risque de cancer.

« Effectuer un test HPV dans les années qui suivent le début de l’activité sexuelle exposerait à un résultat quasiment sûr d’être positif, alertant sur un risque possible de cancer »

Pr Jean Gondry, président de la Société française de coloscopie et de pathologie cervico-vaginale

En effet, plus de 80 % des femmes sont infectées par au moins une des cinquante souches de virus HPV au cours des deux premières années d’activité sexuelle compte tenu de la fréquence de ce virus dans la population générale. Et même avec un préservatif puisque le virus est présent sur des zones non couvertes par celui-ci. Il y a donc comme un phénomène d’infestation incluant les souches à haut risque ciblées par le test HPV chez presque toutes les jeunes femmes.

Autrement dit, «effectuer un test HPV dans les années qui suivent le début de l’activité sexuelle exposerait à un résultat quasiment sûr d’être positif, alertant sur un risque possible de cancer», clarifie le Pr Jean Gondry, président de la Société française de coloscopie et de pathologie cervico-vaginale (SFCPCV). Or, le système immunitaire est immédiatement mis à contribution et élimine rapidement et complètement l’immense majorité de ces virus dans les deux années, voire les mois qui suivent. En particulier si la femme a été vaccinée quelques années plus tôt contre les souches de virus HPV à haut risque (mais la couverture pour ce vaccin est de moins de 15 % en France).

Le résultat positif du test une année ne le serait donc probablement plus l’année suivante. C’est d’ailleurs pour cette raison que le dépistage par frottis est proposé seulement à partir de 25 ans alors que quelques cancers se développent avant cet âge. Cette infestation par le virus entraîne de nombreuses lésions de la muqueuse utérine et aboutirait à une grande quantité de frottis anormaux alors que ces lésions régressent le plus souvent spontanément.

Néanmoins, dans environ 10 % des cas, des virus ne sont pas éliminés et persistent de façon durable chez la femme. C’est là que le risque de développer un cancer devient réel et ce sont ces virus qu’il faut pouvoir dépister avec le test HPV. Pour cela, l’âge de 30 ans a été retenu dans le cadre du programme de dépistage organisé. «Quand une femme ne répondra pas à une invitation à effectuer un frottis à deux reprises, un test par autoprélèvement lui sera adressé, mais seulement à partir de 30 ans», confirme Jean Gondry.

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