Européennes : ces partis qui font campagne sans argent
A trois mois du scrutin européen, plusieurs partis peinent toujours à décrocher un prêt bancaire. Et s’alarment.
Les sondages ont beau lui être favorables, aucune banque n’a accepté d’accorder un prêt au Rassemblement national pour financer sa campagne européenne. Les partenaires financiers habituels de Nicolas Dupont-Aignan (Debout pour la France) refusent de lui prêter depuis qu’il s’est rallié à Marine Le Pen au second tour de la présidentielle. La France insoumise comme le Républicain François-Xavier Bellamy démarchent encore les agences bancaires à trois mois du scrutin, et l’UDI voit ce qui était hier une formalité se transformer pour la première fois en casse-tête.
Aux yeux des banques, les candidats ne sont que des emprunteurs comme les autres. Plutôt pires que d’autres. Plus d’une a été échaudée par le rejet des comptes de la campagne présidentielle de 2012 de Nicolas Sarkozy, qui avait laissé les Républicains avec une dette de 55 millions d’euros. A ce mauvais souvenir s’ajoute un précédent récent : la saisie par la justice d’une partie des subventions publiques du RN dans l’affaire des assistants parlementaires présumés fictifs du Parlement européen.
La loi de 2017 pour la confiance dans la vie politique a par ailleurs durci les règles du jeu. Il est désormais interdit d’emprunter auprès d’un Etat étranger ou d’une banque extra-européenne. Exit donc le prêt russe auquel le FN avait recouru en 2014. Les dons et prêts des personnes physiques sont contrôlés et restreints et, au nom de de la transparence, les comptes de campagne seront rendus publics par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.
Un "vrai sujet de démocratie" pour l'UDI
Résultat : "Il y a une vraie réticence à financer", constate Thomas Ménagé, directeur de campagne de Nicolas Dupont-Aignan, qui évoque "une inquiétude des banques sur les garanties financières" mais aussi "des questions d’image : elles préfèrent ne pas prendre de risque". "C’est très compliqué, confirme-t-on à l’UDI. On a l’impression d’un ‘non’ de principe, que les banques ne veulent juste pas s’engager dans ce qu’elles voient comme un nid à problèmes".
Pourtant, ceux qui franchiront la barre des 3% des voix le 26 mai verront leurs dépenses de campagne remboursées par l’Etat, dans la limite de 4,5 millions d’euros. Mais cela ne suffit pas. Bien que DLF soit crédité pour l’heure de 6% des suffrages et bénéficie d’un peu plus de 500.000 euros de subventions publiques chaque année, "nous avons contacté plusieurs banques et n’avons eu aucune réponse positive", déplore Ménagé, qui a entrepris de solliciter systématiquement tous les groupes bancaires. En attendant, outre l’appel aux dons, Dupont-Aignan va demander aux 79 candidats de sa liste de mettre la main à la poche.
A l’UDI, on tombe des nues devant les premiers refus. "Nous n’avions pas imaginé une seconde qu’il y aurait une difficulté", confie un proche de la tête de liste Jean-Christophe Lagarde. Certes, celui-ci n’est pas sûr d’atteindre les 3% fatidiques, mais "nous sommes excédentaires et nous n’avons aucune dette, souligne ce proche. On peut comprendre qu’il y ait des difficultés à prêter à des petits partis sans ressources, mais l’UDI a plus de 50 parlementaires et la garantie des subventions publiques (un peu plus de 4 millions d’euros par an, NDLR)", s’étonne-t-il, en évoquant "un vrai sujet de démocratie".
De la méfiance entre les banques et les partis
La tête de liste du PCF Ian Brossat financera sa campagne avec les seuls prêts de ses militants. Encore en discussion avec deux banques, la France insoumise se veut optimiste. "Il n’y a pas beaucoup de banques qui prêtent, donc ce n’est pas évident, reconnait la mandataire financière de LFI, mais il n’y a pas d’inquiétude particulière". Même sérénité du côté des Républicains : le parti va prêter 2 millions d’euros à sa tête de liste François-Xavier Bellamy, qui "va les compléter par un emprunt personnel", selon le trésorier Daniel Fasquelle.
En cas de blocage, les partis en lice peuvent se tourner vers le nouveau médiateur du crédit nommé le 4 août dernier. Jean-Raphaël Alventosa joue pour l’heure un rôle de conseil. "Les banques et les partis, c’est comme un couple qui ne s’entend pas bien : je leur dis 'parlez-vous', dit-il. Il y a beaucoup de méfiance de part et d’autre". Il remettra un rapport après les Européennes. En attendant, "quand je sens que ça pourrait mal se passer, j’interviens, mais pour l’instant je reste positif". Ni la République en marche ni le Modem ne connaissent en revanche ces affres financiers. Forts de plus de 26 millions d‘euros d’aide publique par an à eux deux, ils n’auront même pas besoin d’emprunter pour faire campagne.
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