Le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, en meeting à Lille le 30 octobre 2018

Le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, en meeting à Lille le 30 octobre 2018.

afp.com/Philippe HUGUEN

Les images avaient frappé les esprits du public, tant une violence inattendue se dégageait du choc frontal entre Jean-Luc Mélenchon et d'autres représentants de La France Insoumise (LFI), et les enquêteurs chargés de mener, le 16 octobre 2018, des perquisitions dans les enquêtes sur le financement éventuel de LFI par le Parlement européen et les comptes de campagne pour l'élection présidentielle. Des magistrats du parquet de Paris, notamment le chef de la section financière et son adjoint, avaient été pris à partie. Ils ont ensuite déposé plainte, ainsi que neuf membres du service de police judiciaire chargé de l'enquête, l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières (OCLCIFF).

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Les députés Jean-Luc Mélenchon, Alexis Corbière, Adrien Quatennens et une poignée d'autres, sont donc convoqués la semaine prochaine pour être entendus sur ces faits par le parquet de Bobigny. Les "figures" du mouvement sont attendues lundi pour Adrien Quatennens, Jean-Luc Mélenchon mardi, et mercredi Alexis Corbière, mais la brigade de répression des atteintes contre les personnes (BRDP), chargée de mener les auditions, leur a laissé à chacun une convocation à un autre moment dans la semaine, histoire de permettre à chacun d'accorder ce rendez-vous policier avec son emploi du temps.

C'est le parquet de Paris qui avait ouvert la procédure pour "actes d'intimidation contre l'autorité judiciaire" et "violences sur personnes dépositaires de l'autorité publique", mais le dossier avait immédiatement été transféré à Bobigny, compte tenu du risque de partialité. De premières convocations lancées pour lundi 25 février avaient été finalement reportées. Des non-élus membres de la garde rapprochée du chef, tel le conseiller d'Etat Bernard Pignerol, ont déjà été entendus ces derniers jours.

"Vous êtes la police républicaine ou une bande?"

Sur les vidéos des perquisitions, on voyait des élus bousculer les magistrats et s'en prendre de manière virulente à un gendarme en faction devant la porte d'un local. Des soutiens de la France insoumise avaient défoncé une porte. Fait rare, Jean-Luc Mélenchon avait même filmé l'intervention policière menée à son domicile parisien avant de rejoindre le siège de son mouvement, lui aussi perquisitionné comme plus de dix autres lieux distincts, domiciles privés ou sièges d'associations ou de sociétés.

Sous l'oeil des caméras, le chef de La France Insoumise s'en prenait aux méthodes d'enquête, classiques, avec des mots forts : "Allez faire votre métier de policiers républicains, vous n'êtes pas des Benalla. La République, c'est moi, c'est moi le parlementaire. Vous n'avez pas honte ? Vous êtes la police républicaine ou une bande ? Vous savez à qui vous parlez ? Vous savez qui je suis ? Je ne représente rien pour vous ?" Ses soutiens dénonçaient un "coup de force politique, policier et judiciaire contre Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise" et une "attaque sur la base d'éléments fantaisistes".

"Nous ne sommes pas des bandits"

Libération avait reconstitué le dialogue tenu à l'intérieur du QG avec le procureur:

- "Je ne mérite pas ça, je n'ai pas volé de cigarettes. Je ne suis pas un bandit. Vous avez réveillé des innocents sans tenir compte du fait qu'ils ont des familles, des voisins, nous ne sommes pas des bandits", avait-il clamé à l'attention du magistrat.

- "Nous sommes dans le cadre d'une opération de police judiciaire et nous vous demandons de ne pas vous y opposer. Et en ce moment, vous le faites par la force", avait opposé le parquetier.

- "On est chez nous, on ne s'oppose pas à l'opération de police, ou bien il faut que ça passe sans nous, des fois que vous ameniez des choses pour les déposer. Et vous n'avez même pas la courtoisie de nous prévenir alors que Benalla, lui, est prévenu la veille".

- "Nous sommes dans un cadre légal".

La procureure générale de Paris, Catherine Champrenault, dans une rare prise de parole, avait ensuite dénoncé un "coup de force", et une "entrave à l'action de la justice".

Les faits incriminés sont punis par le code pénal de trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende pour les violences et deux ans et 30 000 euros d'amende pour les actes d'intimidation. Mais cette dernière peine peut être portée à dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende lorsque la justice considère que les actes répréhensibles avaient pour objectif d'empêcher les magistrats et les fonctionnaires d'accomplir un acte lié à leur fonction...

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