C’est l’une des (nombreuses) priorités du gouvernement : en finir avec les passoires thermiques d’ici dix ans. Mais en attendant, ce sont encore 3,3 millions de foyers français qui souffrent d’un mauvais isolement et consacrent une grande partie de leurs ressources aux dépenses énergétiques. Près d’un tiers des Français renoncerait ainsi à se chauffer pour ne pas faire flamber leur facture énergétique. 2,7 millions de foyers seraient également vulnérables sur le plan du transport à cause de l’étalement urbain et de la dépendance à la voiture.

La France est loin derrière le podium de tête des meilleurs élèves européens en matière de précarité énergétique. Selon le dernier baromètre réalisé par OpenExp (1) publié le 20 février, l’Hexagone est classé 10e pour la précarité énergétique liée aux logements et 11e pour la vulnérabilité énergétique liée aux transports. En cause, une mauvaise isolation thermique qui entraîne des hivers trop froids et des étés trop chauds dans le premier cas, et un étalement urbain qui a accru la dépendance à la voiture dans le second.
“Les Européens attendent de l’Union européenne des solutions pour les aider à réduire leurs consommations et donc le montant de leurs factures d’énergie, et à vivre mieux dans des logements correctement isolés. La route sera longue puisque, même dans notre pays, les réglementations et les outils structurants qui permettraient d’accompagner avec efficacité les ménages tout au long d’un projet de rénovation énergétique se font toujours cruellement attendre” déplore Sandrine BURESI, co-présidente du CLER-Réseau pour la transition énergétique et membre de l’Initiative Rénovons.
Infographie precarite energetique logements et transports mars 2019
30 % des Français se restreignent en chauffage
La précarité énergétique est un fléau tout au long de l’année, aussi bien en hiver qu’en été, qui tend à empirer avec la crise climatique et la multiplication des épisodes météorologiques extrêmes, touchant principalement les plus pauvres. La part des dépenses des ménages à faible revenu consacrée à l’énergie a augmenté de 33 % entre 2000 et 2014 en Europe.
Selon l’Observatoire de la précarité énergétique, qui a publié ses dernières données en novembre dernier, la France compte 3,3 millions de foyers touchés par la précarité énergétique, en raison de leurs ressources ou de leurs conditions d’habitat. 30 % de l’ensemble des Français ont restreint le chauffage chez eux pour ne pas avoir de factures trop élevées et 15 % ont déclaré avoir souffert du froid dans leur logement au cours du dernier hiver.
Le taux de précarité énergétique s’établit aujourd’hui à 11,6 % contre 14,5 % en 2013. L’objectif du gouvernement est d’arriver à 9,5 % en 2028. Une baisse qui semble modeste au regard des annonces. Le plan rénovation énergétique des bâtiments présenté en avril dernier vise en effet la fin des passoires thermiques dans 10 ans avec 14 milliards d’euros dédiés.
L’étalement urbain a renforcé la dépendance à la voiture
Il existe un autre type de vulnérabilité énergétique liée aux transports. On en parle peu, mais elle est bien réelle alors que 40 % des dépenses énergétiques des Français correspondent à l’achat de carburant. La dernière étude sur le sujet a été publiée en 2015 par le Commissariat général au Développement durable (CGDD). Celui-ci estimait alors que 2,7 millions de ménages français étaient concernés. “La France a encouragé l’étalement urbain entraînant une augmentation de la dépendance à l’égard de la voiture et par là-même du poids de l’énergie liée au transport dans les dépenses des citoyens, notent les auteurs du baromètre OpenExp. En d’autres termes, ceux qui vivent dans des logements moins chers en dehors du centre-ville ont souvent moins accès à des transports en commun fréquents.” 
L’Iddri avait publié une étude sur le sujet en 2012 dans laquelle elle concluait sur le fait que “la périurbanisation constituait au final une soupape à la crise du logement et aux hausses de prix” tout en impliquant “une croissance des situations de vulnérabilité”. Les dernières estimations considèrent que 700 000 ménages français se trouvent dans les deux situations de vulnérabilité énergétique liées à la fois au logement et aux transports.
Fin janvier, une proposition de loi a été déposée au Sénat pour ériger l’accès à l’énergie en droit fondamental. Le texte propose d’interdire les coupures d’énergie pour les ménages en situation de précarité énergétique, de supprimer la contribution au service public de l’électricité ainsi que la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) pour les ménages précaires, et d’appliquer un taux de TVA réduit à 5,5 % sur les tarifs de l’énergie.  
Concepcion Alvarez, @conce1

(1) Voir le baromètre européen OpenExp sur la précarité énergétique.
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