En résumé :

• Six mois de prison avec sursis. C’est la peine prononcée jeudi 7 mars par le tribunal correctionnel de Lyon contre le cardinal Philippe Barbarin pour la non-dénonciation d’abus sexuels commis par le père Bernard Preynat.

• En l’absence de l’archevêque de Lyon, la présidente du tribunal Brigitte Vernay l’a « déclaré coupable de non-dénonciation de mauvais traitements » envers un mineur entre 2014 et 2015. Le cardinal Barbarin est ainsi le troisième évêque condamné en France pour des faits similaires, après deux autres en 2001 et en 2018. Ses avocats ont annoncé qu’ils allaient faire appel.

• L’archevêque de Lyon s’est exprimé à 13 heures depuis la maison diocésaine de Lyon pour annoncer qu’il remettra sa décision au pape François.

La justice condamne le cardinal Barbarin

Cardinal Barbarin, un ténor controversé

Affaire Barbarin, « Le juge s’impose comme le garant de la morale commune »

En direct :

► 16 h 05 : « Je pense que c’était la meilleure chose qu’il puisse faire »

Réaction d’un prêtre du diocèse de Lyon qui a tenu à garder l’anonymat : « Nous, les prêtres du diocèse, sommes partagés sur la façon dont le cardinal a traité cette affaire. Certains lui ont clairement signifié qu’ils n’étaient pas d’accord avec lui et à chaque fois, il semblait prêt à tout entendre.

En tout cas, cela n’a pas fait naître de tensions entre nous, prêtres. Ce qui est lourd, c’est que ce sujet de la pédophilie revient sans arrêt. Certains paroissiens trouvent aussi qu’on en parle trop.

J’avoue que je pensais qu’il serait relaxé. En tout cas, pour sa démission, je pense que c’était la meilleure chose qu’il puisse faire. Sa crédibilité au sein du diocèse, pour les laïcs comme pour les consacrés, est trop entamée.

► 14 h 50 : « C’est un vrai chef, qui assume et prend ses responsabilités »

Réaction d’Etienne Piquet-Gauthier, directeur de la Fondation Saint-Irénée et proche du cardinal Barbarin :

« Je ne m’attendais pas à cette condamnation, lourde même si cela reste du sursis. Au niveau médiatique, les choses étaient faites : il ne pouvait pas repartir blanchi. Pourtant, juridiquement, il y a des choses à redire : quand on lit dans le jugement qu’il a fait cela pour protéger l’institution, c’est tout simplement faux. Les avocats font leur travail en faisant appel, mais on va repartir pour des années et ce n’est bon pour personne.

En ce qui concerne sa démission, en revanche, je ne suis pas surpris. Il l’avait déjà présentée en 2016, au début de l’affaire, mais le pape l’avait laissé en poste. C’est un vrai chef, qui assume et prend ses responsabilités. Là-dessus, il est irréprochable. »

► 14 h 09 : La réaction de François Devaux, président de la Parole libérée

« Le sentiment qui domine, c’est la reconnaissance de la légitimité de ce que nous disons depuis le début. C’est d’autant plus important que l’on n’a pas voulu nous écouter, ni en France et ni au Vatican, avec le pape. Est-ce que l’Église va nous entendre davantage désormais ? Je ne peux pas le dire. La problématique ne se résume pas au cardinal Barbarin… »

► 13 h 43 : les cinq autres mis en cause relaxés

Contrairement au cardinal Barbarin, cinq ex-membres du diocèse de Lyon poursuivis avec lui pour non-dénonciation d’agressions sexuelles n’ont pas été condamnés jeudi par le tribunal, soit par absence de faute, soit au titre de la prescription des faits.

- Régine Maire, ancienne bénévole

Chargée notamment d’écouter les victimes de prêtres, elle avait recueilli les confidences d'un premier plaignant en 2011, Laurent Duverger, et l'orientait vers un responsable du diocèse. Trois ans plus tard, elle en recevait une deuxième, Alexandre Hezez. Après cet échange, dans un courriel au cardinal Barbarin, elle s'en «remettait à son autorité» tout en le pressant «respectueusement» d'en tirer les conséquences.

Le tribunal a estimé que les faits de non-dénonciation n'étaient «pas constitués» concernant Régine Maire et qu'il pouvait «lui être fait crédit qu'elle pensait de bonne foi», par son action, contribuer à informer les responsables de l'institution religieuse.

- Thierry Brac de la Perrière, évêque de Nevers

Evêque auxiliaire de Lyon en 2011, c’est vers lui que Régine Maire oriente Laurent Duverger. Il lui assure alors que Bernard Preynat n'est «plus en contact avec des enfants» mais n'informe ni les autorités judiciaires ni son supérieur le cardinal Barbarin.

«Aucune des raisons invoquées (pour justifier son silence) apparaît sérieuse et recevable», estiment les juges. Notamment, celle de son départ quelques mois plus tard vers un autre diocèse, qui trahit «le signe plutôt de son indifférence aux victimes potentielles de Bernard Preynat et du souhait d'emporter un secret».

Toutefois, aucune condamnation n'a été prononcée en raison de la prescription des faits, dont le délai était de trois ans en 2016 quand l'affaire a démarré.

- Pierre Durieux, ancien directeur de cabinet du cardinal Barbarin

En juillet 2014, il avait reçu un courriel d’Alexandre Hezez qui souhaitait alors contacter l'archevêque de Lyon.

Le tribunal a relevé que Pierre Durieux avait communiqué l'information «aussitôt» et avait favorisé une prise de rendez-vous avec le cardinal en novembre 2014. «En tout état de cause, rien n'établit dans ce dossier qu'il s'associait à l'inertie reprochée», ajoutent les juges qui l'ont relaxé.

- Xavier Grillon, vicaire épiscopal

Dans le Roannais où officiait le père Preynat, il avait été interpellé par Alexandre Hezez en mars 2015 et l’avait rencontré deux mois plus tard.

Son absence de dénonciation des faits à la police ou à la justice ne relève pas d'une faute pour le tribunal «en raison de ce très court calendrier», d'autant plus que cette victime «l'informait qu'il était déterminé à agir lui-même» : Alexandre Hezez déposera plainte le 5 juin suivant.

- Maurice Gardes, archevêque d’Auch

Archidiacre dans le Roannais jusqu’en 2004, il «n'ignorait pas la rumeur qui circulait au sujet de Bernard Preynat» mais n'ayant reçu aucune plainte de victime ou d'information directe, le tribunal a prononcé sa relaxe.

► 13 h 30 : Extrait du texte de la condamnation du cardinal Barbarin

► 13 h 20 : Réactions de la Conférence des évêques de France

Le texte du communiqué de la CEF en réaction à l’annonce du cardinal Barbarin :

« La Conférence des évêques de France prend acte de la décision de justice rendue aujourd’hui à l‘encontre du Cardinal Barbarin pour non dénonciation. Elle ne commentera pas cette décision. La CEF rappelle que, comme tout citoyen français, le Cardinal Barbarin a le droit d’utiliser les voies de recours à sa disposition. C’est ce qu’il a fait et nous attendons l’issue de cette nouvelle procédure.

Quant à sa décision de présenter sa démission au Pape François, elle relève de sa conscience personnelle. Elle aussi n’appelle pas de commentaire de la part de la CEF. Il appartiendra au Pape de lui donner la suite qu’il jugera opportune.

La CEF réaffirme sa volonté de lutter avec détermination contre toutes les agressions sexuelles commises par des clercs sur des mineurs.

Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille et Président de la CEF, a eu l’occasion d’assurer le Cardinal Barbarin de sa prière pour lui et le diocèse de Lyon. »

► 13 h 10 : « J’ai décidé d’aller voir le Saint-Père pour lui remettre ma démission », a annoncé le cardinal Barbarin depuis la maison diocésaine de Lyon.

► 12 h 52 : L’évêque de Grenoble-Vienne : « La justice a tranché »

Réaction de l’évêque de Grenoble-Vienne Guy de Kérimel après la condamnation du cardinal Barbarin :

« Je ne suis qu’à moitié surpris par cette décision. Cette condamnation arrive dans un contexte particulier, très lourd, pour l’Église. La justice a tranché et je n’ai pas de raison de remettre en cause le verdict. » (Source : Le Dauphiné)

► 12 h 22 : « Le cardinal n’était qu’un responsable indirect, même s’il a commis beaucoup de maladresses »

La réaction à la condamnation du cardinal Barbarin deFrançois Lagnau, paroissien engagé à Saint-Irénée, à Lyon (63 ans) :

« C’est un jugement sévère, même si je ne parlerais pas d’injustice ni d’acharnement. Le cardinal n’était qu’un responsable indirect, même s’il a quand même commis beaucoup de maladresses. J’ai beaucoup d’estime pour lui, mais s’il démissionne, cela pourrait être une occasion de renouveau pour le diocèse. Tout le diocèse est quand même très marqué par cette affaire, qui a beaucoup clivé nos communautés. » (Propos recueillis par Mélinée Le Priol)

► 12 h 10 : Pour Francois Devaux, la démission du cardinal Barbarin « est une évidence », mais il ne demande rien

Selon François Devaux, plaignant et cofondateur de l’association la Parole libérée, la condamnation du cardinal est « une grande victoire pour la protection de l’enfance qui envoie un signal très fort à beaucoup de victimes et leur permet de comprendre qu’elles sont entendues, écoutées et reconnues ». Pour lui, la démission de l’archevêque de Lyon « est une évidence », même s’il ne la demande pas.