C'est une belle - et impressionnante - histoire médicale ! Une greffe de moelle osseuse a été réalisée sur un fœtus dans le ventre de sa mère, une procédure très rare en raison de ses risques. L'opération, qui a eu lieu grâce à une collaboration entre l’hôpital Necker et l’hôpital Trousseau, AP-HP (Paris), est un succès. Plus de 3 ans plus tard, le petit garçon semble en parfaite santé, selon ces travaux publiés dans Blood Advances.
Une maladie génétique qui rend vulnérable à toute infection, jusque dans le ventre de sa mère
En 2015, les médecins de l'hôpital Necker et de l’hôpital Trousseau se trouvent devant une situation particulièrement compliquée. Une femme est enceinte de son troisième enfant, un garçon, qui a été diagnostiqué porteur d'une mutation génétique grave. La maladie qui en résulte est le "déficit immunitaire combiné sévère lié au chromosome X" – raison pour laquelle elle a épargné les deux grandes sœurs, qui possèdent deux chromosomes X dont au moins un sain issu du père, tandis que le fœtus masculin ne possède que l'exemplaire atteint de sa mère. Les conséquences sont connues : la moelle osseuse du fœtus ne contient pas de cellules immunitaires, le rendant vulnérable à toute infection. En principe, le fœtus est protégé des germes jusqu'à la naissance, où il pourra subir une greffe de moelle osseuse selon une procédure standard bien maîtrisée. Mais cela ne se passe pas comme prévu : à la fin du premier trimestre de grossesse, la mère contracte soudain la toxoplasmose.
C'est une belle - et impressionnante - histoire médicale ! Une greffe de moelle osseuse a été réalisée sur un fœtus dans le ventre de sa mère, une procédure très rare en raison de ses risques. L'opération, qui a eu lieu grâce à une collaboration entre l’hôpital Necker et l’hôpital Trousseau, AP-HP (Paris), est un succès. Plus de 3 ans plus tard, le petit garçon semble en parfaite santé, selon ces travaux publiés dans Blood Advances.
Une maladie génétique qui rend vulnérable à toute infection, jusque dans le ventre de sa mère
En 2015, les médecins de l'hôpital Necker et de l’hôpital Trousseau se trouvent devant une situation particulièrement compliquée. Une femme est enceinte de son troisième enfant, un garçon, qui a été diagnostiqué porteur d'une mutation génétique grave. La maladie qui en résulte est le "déficit immunitaire combiné sévère lié au chromosome X" – raison pour laquelle elle a épargné les deux grandes sœurs, qui possèdent deux chromosomes X dont au moins un sain issu du père, tandis que le fœtus masculin ne possède que l'exemplaire atteint de sa mère. Les conséquences sont connues : la moelle osseuse du fœtus ne contient pas de cellules immunitaires, le rendant vulnérable à toute infection. En principe, le fœtus est protégé des germes jusqu'à la naissance, où il pourra subir une greffe de moelle osseuse selon une procédure standard bien maîtrisée. Mais cela ne se passe pas comme prévu : à la fin du premier trimestre de grossesse, la mère contracte soudain la toxoplasmose.
"La situation était très inquiétante, car le fœtus était atteint de la forme la plus grave de déficit immunitaire", et était donc extrêmement vulnérable à l'infection par le parasite responsable de la toxoplasmose, relate à Sciences et Avenir le Dr Alessandra Magnani, première autrice de la publication et membre de l'équipe médicale ayant réalisé l'opération*. Il fallait agir vite. "C'est à ce moment que nous avons proposé d'anticiper la greffe de moelle prévue à la naissance, pour fournir au fœtus les moyens de se défendre face au toxoplasme". Mais si cette procédure de greffe in utero (littéralement "dans l'utérus") n'est pas neuve, puisqu'elle a été décrite pour la première fois vers la fin des années 1990, elle reste extrêmement rare… Et donc peu maîtrisée. "Le peu d'études publiées ayant réalisé l'opération avec un donneur non parfaitement compatible ont rapporté des résultats mitigés. La greffe après la naissance reste donc toujours préférée, dans la mesure où elle a montré un fort taux de succès", explique le Dr Magnani. Sans compter que la greffe de moelle osseuse in utero n'étant quasiment pas pratiquée, la procédure elle-même ainsi que les risques qui en découlent sont mal connus. Mais à situation d'urgence, mesures exceptionnelles : l'équipe médicale demande, et obtient rapidement, l'accord des autorités de santé de réaliser une opération aussi risquée, dans l'espoir de protéger le fœtus.
Les cellules souches de la sœur ont été injectées dans la veine ombilicale du fœtus en danger
Par chance, la sœur de 4 ans est donneuse compatible avec le futur petit garçon. On lui prélève alors ses cellules souches hématopoïétiques. Ces dernières sont en effet responsables de la production des cellules sanguines, dont les cellules immunitaires, depuis leur siège de la moelle osseuse. Les cellules sont triées puis préparées selon un protocole très précis permettant d'obtenir un greffon. Sous forme liquide, ce greffon est alors injecté à l'aide d'une seringue dans la veine du cordon ombilical, le chirurgien étant guidé par un dispositif d'échographie. "Les cellules souches hématopoïétiques n'ont pas besoin d'être injectées directement dans la moelle osseuse", explique le Dr Magnani, "elles y vont d'elles-mêmes, grâce à des récepteurs spécifiques", des molécules qu'elles ont à leur surface et qui leur donnent le signal adéquat lorsqu'elles sont arrivées à destination.
Une réussite spectaculaire
"Le résultat de l'opération a été spectaculaire", s'enthousiasme le Dr Magnani. Car non seulement la grossesse se termine sans encombre, mais le bébé nait au terme et en pleine santé. Une réussite d'autant plus belle que trois ans et demi plus tard, le petit garçon mène une vie parfaitement normale, guéri, son nouveau système immunitaire parfaitement intégré lui ayant même permis d'être normalement vacciné (la vaccination est contre-indiquée pour les personnes au système immunitaire déprimé). "Il n'a pas de médicaments, ni passé plus de temps qu'un bébé sain à l'hôpital", se réjouit le Dr Magnani. Or, la procédure de greffe à la naissance nécessite au contraire une longue hospitalisation sous haute protection vis-à-vis des germes, ce qui a bien sûr un impact important sur l'enfant et sa famille.
Pourquoi la greffe in utero ne peut pas devenir la procédure standard
Dans ce cas, et puisque l'opération a été un tel succès, il serait tentant de penser qu'il faut toujours privilégier la greffe in utero à la post-natale. Mais c'est loin d'être aussi simple. "Sur un seul cas et avec aussi peu de recul, il est encore trop tôt pour comparer l'efficacité de cette méthode aux risques mal connus, mais qui impliquent probablement le risque de perdre le fœtus, à celle de la greffe post natale très bien maîtrisée et aux forts taux de succès", explique le Dr Magnani. Pour autant, cette greffe in utero réussie "est la preuve que c'est réalisable et potentiellement très efficace, dans les cas complexes comme celui-ci comportant un risque important de maladie infectieuse et avec un donneur compatible", conclut-elle.
*Les autres membres de l'équipe médicale ayant réalisé l'opération sont les Pr Marina Cavazzana et Pr Stéphane Blanche à l’Hôpital Necker et Pr Jean-Marie Jouannic à l’Hôpital Trousseau.