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Les Editoriaux

Pourquoi l'Etat doit rapidement montrer l'exemple sur son train de vie

Comment peut-on encore justifier le train de vie de nos palais de la République à l'heure où le gouvernement cherche partout des économies. Certes, cela ne résoudra pas la question de la dette de l’Etat, ni n’enrichira les Français, mais il faut des symboles et réformer le faste de l'intendance publique serait un excellent signal.

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Le faste des palais de la République ne peut plus durer. C'est une question de cohérence : l'Etat doit aussi montrer l'exemple. 

Le faste des palais de la République ne peut plus durer. C'est une question de cohérence : l'Etat doit aussi montrer l'exemple. 

BOULAT ALEXANDRA/SIPA

Dans l'ambiance un peu révolutionnaire qui plane, on peut légitimement s'interroger sur les signes extérieurs de richesse de la République et en particulier des ministères et des grandes institutions républicaines.

Certes, l'apparat est une des traditions françaises qui révèle l'ambiguïté de notre désir d’égalitarisme et de luxe. Mais cet apparat qui règne dans les ministères, à l’Elysée et à Matignon, sans parler du Sénat, de l’Assemblée Nationale et du Conseil Economique Social et Environnemental (dont l'auteur de ces lignes était membre) est devenu totalement inacceptable. Comment peut-on justifier que le CESE dont les assemblées plénières n'ont lieu que deux fois par semaine dispose d'un bureau de Poste, d'une salle de sport, d'une infirmerie avec un médecin de permanence, de trois restaurants dont un bar et de son propre kiosque à journaux !

Il faut être conscient que ce ne sont pas les économies liées à un nouveau train de vie modeste qui résoudront la question de la dette de l’Etat et qui enrichiront les Français, mais il faut des symboles. Tous les pays qui ont procédé à des réformes structurelles ont donné l'exemple en changeant ostensiblement le mode de vie des gouvernants et le train de vie de l’Etat.

Rappelons tout d'abord que le protocole et le faste d'aujourd'hui résultent d'un héritage séculaire et que ce ne sont pas les élus qui "s'en mettent plein les poches", même s'ils profitent - qui ne le ferait pas - de tout ce qui est à leur disposition. Il faut aussi être fier de notre capacité à recevoir luxueusement les chefs d'Etat du monde entier; Il ne s'agit pas de tout décrier et il est important qu'à l'occasion de certaines réceptions notre vaisselle, nos vins, nos cristaux, notre décor, soient promus dans le monde entier : l'art de recevoir à la française ... les ors de la République.

En revanche, l'ordinaire dans l'univers politique est déplacé sur beaucoup de plans comme les visiteurs peuvent le constater. Ainsi est-il extrêmement flatteur pour le citoyen d'être l'hôte d'une table ministérielle. Dans un univers feutré vous recevez un accueil digne des plus grands hôtels 5 étoiles ou palaces, les huissiers en habit avec leur longue chaîne dorée vous traitent avec une affabilité respectueuse et la calme certitude de ceux qui savent que les ministres passent mais qu’eux demeurent. On est aux petits soins pour vous, le décor est celui de nos plus beaux hôtels particuliers. Si vous êtes invité à déjeuner, les maîtres d’hôtel s'affairent pour vous offrir un apéritif. Ensuite, on vous annonce que vous passez à table, c'est alors qu’arrive la puissance invitante. Le service est rapide et irréprochable, la chair exquise, les vins prestigieux, le ballet des maîtres d'hôtel impressionnant, ils guettent vos moindres désirs. Le timing est parfait. Le ministre vous semble alors appartenir à une aristocratie républicaine digne des familles royales.

Un luxe qui déconnecte de la réalité

Les invités n'ont jamais ou presque bénéficié d'un tel luxe, y compris à Bercy qui taxe si bien les signes extérieurs de richesse. Même les plus belles tables des PDG du CAC 40 n'arrivent pas à la cheville de ce niveau de faste et de service. Il y a aussi les réceptions à chaque occasion, les buffets pléthoriques que ce soit à l’issue d’une manifestation ou pour des remises de décoration... Il ne s’agit pas de réclamer une ascèse monastique mais des comportements nouveaux dans la sobriété.

Les cabinets au sens large, les assemblées (sauf le CESE) disposent d'un parc de véhicules et de chauffeurs à disposition, sans parler des collectivités locales et du train de vie préfectoral. On peut comprendre alors la révolte des gilets jaunes, contre les élites, qui a commencé par le rejet de la taxe carbone. Qui parmi ceux qui nous dirigent a récemment fait le plein d’essence lui-même ? Qui parmi eux s'intéresse au coût d'un déplacement quel qu'il soit ?

Il est évident que ce décorum au bout d'un certain temps apparaît à ceux qui en bénéficient comme parfaitement normal, ils se déconnectent insensiblement du quotidien des Français. Cette pompe stupéfie aussi le chef d'entreprise "normal". Même si celui-ci fréquente les bons restaurants, il a plutôt l’habitude la plupart du temps de déjeuner avec des plateaux repas, même avec ses clients et il fait lui-même le plein de sa voiture, même si elle celle-ci est à la charge de l’entreprise.

En Allemagne, les élus circulent dans les transports en commun comme d'ailleurs dans presque tous les pays d'Europe, un mode de vie professionnel simple, pas d'huissiers : de simples réceptionnistes vous annoncent au ministre et c'est lui qui vient vous chercher dans une salle d'attente basique.

Au Sénat, en France, on peut se réjouir pour tous ceux qui en bénéficient, que l'on favorise à ce point le pouvoir d'achat de chacun : personne, quelle que soit la fonction exercée, ne gagne moins de 5.000 euros par mois.

Il faudra réduire considérablement le personnel affecté à ce train de vie, partout, aussi difficile que ce soit et l'accepter.

Alors qu'attend-on ? Dans nos entreprises, nous avons des "cost killers" qui débarquent et listent tout ce qui peut être réduit et économisé. Commencer par cette réforme de l'intendance publique serait un excellent signal immédiat, avant ou pendant le débriefing du grand débat.

Une sobriété de bon aloi est indispensable, signe que le pouvoir a compris le message.

Allez ! On commence par Bercy ? Chiche !

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