Comment la publicité veut coloniser le ciel et l’espace

Le ciel deviendra-t-il un jour un vaste espace publicitaire ? En tout cas, des entreprises planchent d'ores déjà sur des panneaux publicitaires volants et des satellites "événementiels" capables d'afficher des messages commerciaux depuis l'espace.

Par FabienSoyez

  • 4 min

Comment la publicité veut coloniser le ciel et l’espace

La publicité est partout : sur des affiches (papier ou numérique), dans les magazines, à la télé, sur Internet, dans votre smartphone, et même bientôt dans vos voitures connectées et autonomes. À quand la prochaine étape, le ciel ? Verrons-nous un jour des panneaux publicitaires géants flotter dans les nuages… voire dans l’espace ? Ce scénario semble très « science-fictionnesque », rappelant des oeuvres comme Blade Runner ou Retour vers le Futur, mais il est en fait tout à fait réaliste.

Car tandis que les mondes virtuels et terrestres commencent à être saturés par la pub, des startups travaillent très sérieusement sur la « suite », sur un nouvel espace, un nouveau terrain de jeu à investir – avec des projets « d’affichage orbital », de « satellites événementiels », ou encore de drones publicitaires.

Drones, ballons et « nuages » publicitaires

Commençons d’abord par le ciel atmosphérique, ou troposphère. Parmi les entreprises qui planchent sur des publicités volantes, le suisse Aerotain achève actuellement la conception d’un ballon de 3 mètres, gonflé à l’hélium (donc moins dangereux qu’un dirigeable rempli d’hydrogène, ou qu’un quadcoptère) et surmonté de petites hélices, le Skye Aero. Ce drone customisable (on peut lui donner des airs de gros oeil flippant, de vaisseau spatial, de robot…) devrait pouvoir être utilisé pour filmer une foule, pour prendre des selfies, mais aussi pour distribuer des goodies… et diffuser des publicités dans les airs, mais au plus près des passants – puisque le Skye Aero devrait pouvoir se mouvoir très facilement, en « flottant » du haut vers le bas, et de gauche à droite.

De son côté, Cloudvertise conçoit des « nuages publicitaires » en mousse remplis d’hélium, et le projet Drone Aviary, de l’entreprise de « design prospectif » Superflux, imagine déjà un drone publicitaire volant et sphérique, tout droit sorti de Minority Report, le « Madison« .

Des « satellites événementiels »

Tandis qu’Aerotain et Cloudvertise se focalisent sur le ciel directement visible, d’autres voient plus loin, et espèrent carrément envoyer leurs pubs… au-delà de la stratosphère. Alors que la start-up japonaise ALE projette d’envoyer dans l’espace de petits satellites pour déclencher sur commande, d’ici 2020, des pluies d’étoiles filantes, l’entreprise russe StartRocket planche sur « l’affichage orbital ». Son idée : déployer un essaim de satellites en orbite qui pourront « s’illuminer » dans le ciel, au plus près des étoiles – formant des sortes de « constellations sponsorisées » aux couleurs de Mcdo ou Coca Cola, par exemple.

Les petits satellites cubiques de StarRocket, qui devraient se trouver dans l’orbite basse (entre 400 et 2000 kilomètres d’altitude), pourront, promet StarRocket, afficher dans le ciel des publicités, des logos lumineux, des invitations à des événements, et même des messages d’urgence. Une version spatiale des messages aériens diffusés par avion, en somme – sauf qu’ici, les pubs pourront être visibles depuis n’importe où sur Terre.

Collisions

Face à ce « nouveau type de média » imaginé par StarRocket, les astronomes s’inquiètent. Comme tous drones qui se respectent, les pubs volantes d’Aérotrain et compagnie risquent déjà de perturber l’espace aérien. Mais les satellites événementiels pourraient semer un véritable désordre dans l’espace, en entrant en collision avec d’autres engins, notamment. Tandis que le PDG de StarRocket admet que « le suivi des satellites et le contrôle de leurs mouvements représenteront de sérieux défis », John Crassidis, professeur de génie mécanique et aérospatial à l’université de Buffalo, indique que l’augmentation du nombre de satellites devrait clairement « accroître les risques de collision ». Car l’orbite terrestre, où StarRocket aimerait envoyer ses satellites, abrite actuellement des stations spatiales (comme l’ISS), ainsi que des centaines et des centaines d’autres satellites (de télécoms, de télédétection…) en service. En outre, John Crassidis redoute que ces engins publicitaires « deviennent, à terme, des débris spatiaux », polluant un peu plus l’espace et perturbant les opérations des scientifiques de la Nasa et de l’ESA (Agence spatiale européenne).

Pollution lumineuse

Enfin, les astronomes, mais aussi les spécialistes de l’environnement, craignent la pollution lumineuse qui serait engendrée par de telles pubs spatiales – et qui perturberait les animaux nocturnes, tout en rendant impossible l’observation d’un ciel totalement « vierge ». C’est pourquoi, d’ailleurs, Vlad Sitnikov prévoit de ne rendre ses pubs lumineuses visibles que pendant 6 minutes, dans des zones peuplées. Il devrait aussi, promet-il, être possible de désactiver momentanément ses satellites, afin de ne pas « occulter quelque chose de grand ».

Mais pour le fondateur de StarRocket, qui ne dit pas comment ses satellites devraient être lancés d’ici 2020 (par une fusée, sûrement, mais laquelle ?), la publicité dans l’espace ne fait que suivre le cours logique des choses. Et les critiques visant son projet seraient en fait « similaires » à celles qui ont touché la publicité quand elle s’est invitée à la télévision, il y a 60 ans. Pour l’instant, aucune loi ne s’y oppose (sauf une loi américaine datant d’octobre 2000), mais reste enfin à savoir si ce genre de projet, techniquement faisable, sera autorisé par la communauté internationale et ses régulateurs.

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