SOCIETEPourquoi vous allez utiliser votre brique de jus de fruits aux toilettes

Vosges: Comment votre brique de lait va être transformée en papier toilette

SOCIETEUne société basée dans les Vosges recycle des briques alimentaires pour faire du papier toilette
Papier toilette en briques alimentaires recyclées Grazie Natural de Lucart.
Papier toilette en briques alimentaires recyclées Grazie Natural de Lucart. - Société Lucart
Gilles Varela

Gilles Varela

L'essentiel

  • L’entreprise Lucart à Laval-sur-Vologne fabrique depuis 2011 un papier toilette 100 % en briques alimentaires recyclées et c’est la seule en France.
  • Vendu essentiellement dans le circuit professionnel, aux collectivités, le papier est distribué au grand public via le réseau bio.
  • La société vosgienne n’utilise pas de produit de blanchiment et garde la couleur naturelle de la fibre cellulose, c’est-à-dire marron clair.

Oui, votre jus d’orange en brique pourrait vous « sauver les fesses ». Comment ? En participant à lutter contre le dérèglement climatique. Chaque année, selon WWF, 270.000 arbres sont abattus dans le monde pour fabriquer du papier toilette ou essuie-tout, de serviettes papier jetables à partir de fibres vierges. Dans le même temps, 3,5 milliards de briques alimentaires (jus de fruits, lait, soupe, crème…) sont commercialisées chaque année en France, soit environ 74.000 tonnes. Et les briques alimentaires, c’est en grande partie des fibres de cellulose, la matière première du papier…

C’est en partant de ce constat qu’une société vosgienne, du groupe italien Lucart, à Laval-sur-Vologne, a décidé depuis 2011 de fabriquer un papier toilette 100 % en briques alimentaires recyclées et c’est la seule en France. Et cela tombe bien, car côté consommation, les Français en utilisent 13 kg par an et par personne, les Allemands deux fois plus alors que la frontière n’est pas loin… Et pour aller au bout de la démarche écologique de son produit, la société vosgienne n’utilise pas non plus de produit de blanchiment. Résultat, la couleur du papier est donc celle de la cellulose, c’est-à-dire marron clair… ou disons Havane (ça passe mieux), alors que la tendance du marché vire sur le blanc. « Cela a pu interroger au début, mais cette couleur n’est plus un problème, au contraire, on a même trouvé des concurrents qui colorent leurs produits pour donner cette couleur car elle est gage d’origine écologique », assure le chef de produit de Lucart Romain Mathieu.

L’alu et le polyéthylène également recyclés

Vendu essentiellement dans le circuit professionnel, aux collectivités, le papier est distribué au grand public via le réseau bio sous sous de nom de Grazie natural. La grande distribution serait aussi intéressée… Côté douceur ou résistance, « c’est un produit plutôt similaire aux autres du marché », avec un prix un poil plus cher dans le réseau bio, « mais ça ne dépend pas de nous », sourit le chef de produit.

Des briques alimentaires pour du papier toilette, l’idée peut paraître un peu rude… Mais le process est bien connu. « On passe les briques dans une sorte de mixeur géant, appelé un pulpeur, détaille Romain Mathieu. On met de l’eau et on mixe avec une lame qui vient littéralement faire exploser les briques. L’eau pénètre à travers les fibres de cellulose qui gonflent et finissent par se détacher les différentes couches, comme le plastique et l’aluminium, liste le spécialiste. Ces derniers composants sont alors séparés de la cellulose, qui devient une sorte de pâte à papier. L’aluminium et le polyéthylène (les déchets) partent alors dans le circuit de recyclage. Aucun produit chimique n’est utilisé pour séparer les matériaux. » Une usine partenaire utilise une partie de ces « déchets » pour faire des distributeurs de papiers, d’essuie-main… La boucle est bouclée.

La chaîne de recyclage vosgienne, dédiée aux briques alimentaires, a été mise en service en 2011 sur le site de Laval-sur-Vologne et un investissement de plus de 5 millions d’euros. Au fil des années son taux d’utilisation n’a pas cessé d’augmenter et le site emploi aujourd’hui 300 personnes avec un chiffre d’affaires de 82 millions d’euros. Le site produit 60.000 tonnes par an de papier, dont 90 % sont issus issues du recyclage de vieux papier, de briques alimentaires. Et l’usine ne manque pas de matière première. Sur les 38.000 tonnes de briques qui sont récoltées et recyclées en France, le site de Laval-sur-Vologne en traite 15.000. Les 23.000 tonnes restantes étant utilisées par la concurrence ou recyclées à l’étranger, ce qui fait du site vosgien le plus gros recycleur de ce produit en France.

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