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Le 16e arrondissement de Paris réclame le démontage de son centre pour SDF

Le conseil d’arrondissement, réuni lundi, dénonce le projet de la maire de Paris Anne Hidalgo, qui veut maintenir le centre cinq ans de plus que prévu.

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Publié le 19 mars 2019 à 00h25, modifié le 19 mars 2019 à 09h25

Temps de Lecture 4 min.

Le centre d'accueil d'urgence La Promesse de l'aube, dans le 16e arrondissement de Paris, le 13 mars.

Les élus du 16arrondissement de Paris sont en colère. Cible de leur mécontentement : Anne Hidalgo, la maire de Paris, qui souhaite maintenir jusqu’en 2024 le centre d’hébergement d’urgence ouvert en 2016 pour les sans-abri à la lisière du bois de Boulogne. Installé sur une route coupée à la circulation, il devait en principe être démonté d’ici à la fin 2019, et remplacé par de la végétation. Or, jeudi dernier, les élus, majoritairement de droite, ont découvert que la mairie centrale souhaitait repousser l’échéance de cinq ans. Et que la végétalisation promise initialement par la ministre de l’environnement Ségolène Royal n’était plus évoquée. Tollé immédiat.

Réuni lundi 18 mars au soir, le conseil d’arrondissement a longuement débattu du sujet et adopté à une écrasante majorité un vœu proposé par Danièle Giazzi, la maire (Les Républicains) de l’arrondissement, et son prédécesseur Claude Goasguen. Il demande que l’Etat et la mairie « respectent leurs engagements » en faisant procéder « d’ici à la fin de l’année 2019 au démontage du centre provisoire », situé allée des Fortifications. Les élus réclament en outre que la Mairie de Paris « réalise le projet d’aménagement de l’allée qu’elle s’était engagée à mettre en œuvre. »

Pas de « leçon de solidarité » à recevoir

La droite aux manettes dans le 16arrondissement sait bien qu’en exigeant le démantèlement d’un lieu d’accueil des personnes sans domicile fixe (SDF), elle sera accusée de vouloir chasser les pauvres hors de l’arrondissement le plus riche de la capitale. Pure caricature, assurent les élus du 16e. « Nous n’avons de leçon de solidarité et de main tendue à recevoir de quiconque, s’est exclamée lors du conseil Danièle Giazzi. Ces procès d’intention commencent à être pénibles. »

Les élus affirment être prêts à accueillir des centres de ce type. Le vœu adopté lundi soir incite d’ailleurs l’Etat et l’Hôtel-de-Ville à « rechercher sans tarder » un autre point de chute, « pérenne » cette fois-ci, pour le centre géré actuellement par l’association Aurore. Y compris dans l’arrondissement.

« Passage en force » ?

Pour le conseil d’arrondissement, la question posée n’est pas sociale, mais politique et juridique. Lors de la création du centre, ses promoteurs avaient promis qu’il déménagerait au bout de trois ans, et qu’un projet paysager serait développé à l’issue de ce délai. Saisi par les riverains, le tribunal administratif a toutefois annulé en décembre 2018 le permis de construire initial, jugé illégal pour pas moins de quatre raisons. Depuis, les associations de riverains attendaient tranquillement que le centre soit démonté comme prévu au cours de l’année.

Or c’est un tout autre scénario qui se profile. L’association Aurore, qui gère le centre, a déposé le 22 février une nouvelle demande de permis de construire. S’agissant d’un site classé comme le bois de Boulogne, cette demande doit être examinée jeudi 21 mars par la Commission de la nature, des paysages et des sites, présidée par le préfet. Dans le même temps, la mairie a pris un arrêté pour préparer le déclassement de la route sur laquelle est installé le centre, et qui ne sera plus affectée à la circulation – une façon de corriger une des irrégularités pointées par la justice administrative.

« L’Etat et la Mairie de Paris entendent en fait non seulement engager une procédure de régularisation de la situation devenue illicite, mais également prolonger cette occupation jusqu’en 2024, donc bien au-delà des engagements initiaux », peste-t-on à la mairie du 16e, où l’on dénonce un « passage en force ».

Bois « sanctuarisés »

« Il y a des engagements pris par la Mairie de Paris, par le préfet, par la ministre de l’environnement, on ne peut pas jouer avec ça ! », affirme Danièle Giazzi. Un point de vue partagé par les macronistes de droite comme de gauche. « Le 16e se doit comme les autres arrondissements d’accueillir des centres d’hébergements d’urgence, a souligné lors du conseil Pierre Auriacombe, élu (Agir) de l’arrondissement. Mais le bois de Boulogne comme celui de Vincennes doivent être sanctuarisés » : à ses yeux, ce n’est pas ici, dans le périmètre d’un site classé, qu’il faut installer des centres pour SDF.

« Je suis très critique vis-à-vis de la Mairie de Paris, a ajouté Thomas Lauret, de La République en marche (LRM). Quand on s’engage, qu’on dit que dans trois ans, il y aura végétalisation, on doit respecter sa parole. »

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Le socialiste Pierre-Alain Weill a bien tenté de défendre le maintien du centre, appelé « La promesse de l’aube » en hommage à Romain Gary : « Ce centre est utile, il fonctionne bien, il héberge notamment des enfants scolarisés dans le quartier, a-t-il plaidé. Le temps raisonnable, c’est cinq ans. Ce serait folie de le démonter avant. » Des arguments auxquels les autres élus sont restés sourds.

Riverains remontés

Les riverains, qui avaient finalement accepté la création du centre, sont également très remontés. Christophe Blanchard-Dignac, l’ancien patron de la Française des jeux, qui préside la coordination de vingt-six associations pour la sauvegarde du bois de Boulogne, a écrit ce lundi au préfet, en sa qualité de président de la commission des sites. Son courrier explique qu’en décembre, à l’instant même où le permis a été annulé sans aucune possibilité de régularisation, la « renaturation » prévue par Ségolène Royal en 2016 est devenue immédiatement obligatoire.

Dans un tel dossier, faut-il privilégier une lecture stricte du droit ou l’accueil de personnes en grande difficulté ? Peut-on concilier les deux ? Le sujet sera également au menu du prochain conseil de Paris, début avril.

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