L’association française Earthwake finalise un démonstrateur qui va permettre de fabriquer chaque jour 100 à 150 litres de diesel à partir de 200 kilogrammes de déchets en plastique. Une façon d’éviter que ceux-ci ne se retrouvent dans l’océan tout en fournissant de l'électricité aux citoyens des pays émergents. Face au danger mortel qu’est le plastique pour l’environnement et la biodiversité, Novethic vous propose chaque semaine de découvrir une nouvelle facette de ce matériau omniprésent.

La majorité des plastiques sont fabriqués à partir de pétrole, alors pourquoi ne pas faire le chemin inverse et fabriquer du carburant à partir de déchets plastiques ? C’est ce que propose de faire un chercheur niçois, Christopher Costes. Avec le soutien de l’association Earthwake, cofondée par l’acteur Samuel Le Bihan, il a mis au point une machine qui permet de transformer les déchets plastiques (sacs, emballages, barquettes…) en diesel. 
Baptisée "Chrysalis", elle a été présentée au grand public en septembre dernier. Elle permet pour l’instant de transformer 50 kilogrammes de déchets plastiques en 50 litres de carburant en un peu plus d’une heure. Comment ? Grâce à la pyrolyse du plastique qui donne 65 % de gazole (pour les générateurs électriques, tracteurs, moteurs de bateaux…) 18 % d’essence (pour le chauffage, lampe…), 10 % de gaz (réutilisé dans le système pour le chauffage) et 7 % de résidus carbonés (pour les mines de crayon, colorants…). Un démonstrateur à plus grande échelle devrait voir le jour fin juin. Son coût final est estimé à 50 000 euros.
Logique de transition
"Notre objectif était de trouver une solution pour les pays émergents qui ne disposent pas de système organisé de collecte des déchets plastiques et qui sont encore très dépendants du diesel comme source d’électricité à travers les générateurs, explique François Danel, directeur d’Earthwake. La machine Chrysalis est d’inspiration low tech : elle se présente sous la forme d’un container, facilement transportable et réparable. C’est très simple à utiliser."
Mais est-ce bien responsable d’investir dans une solution qui produit du diesel alors que plusieurs pays sont en train de tourner le dos à ce carburant très polluant ? "Pour moi, il n’y a pas photo, répond sans hésiter François Danel. Nous nous intégrons dans une logique de transition pendant dix ou quinze ans dans des pays qui n’ont pas encore accès à l’électricité et qui sont inondés par les déchets plastiques. Le diesel que nous produisons n’a pas vocation à alimenter nos véhicules, soyons clairs là-dessus."
Donner un prix au déchet
L’association a déjà noué un partenariat avec une startup africaine qui a mis au point une application incitant à collecter des déchets plastiques en échange de crédits téléphoniques. "L’idée est de donner un prix aux déchets plastiques afin de pousser à leur collecte et générer des ressources localement, poursuit François Danel. Pour le porteur de projet, les gains se feront ensuite sur la génération d’électricité grâce au diesel produit." 
Les premiers pilotes seront testés en fin d’année en Afrique. Ils seront soutenus par des entreprises de la filière plastique. D’ici 2020, Eartwake ambitionne  de recycler 15 000 tonnes de déchets plastiques et de créer 4 000 emplois dans trois pays d’Afrique de l’Ouest. Ailleurs dans le monde, des projets similaires existent déjà.
Une start-up norvégienne, Quantafuel, soutenue par le géant pétrolier Vitol Group, s’est elle aussi spécialisée dans la transformation de déchets plastiques en carburant. Sur une tonne de déchets, elle recycle 900 kilogrammes en carburant. L’entreprise estime que sa production pourrait être multipliée par 100 dans les dix prochaines années, soit entre 30 000 et 40 000 barils par jour. Selon une étude de Transparency Market Research, le secteur du "plastic to oil" atteindra 1,7 milliard d’euros de chiffre d’affaires en 2024 contre 470 millions d’euros en 2014.
Concepcion Alvarez, @conce1 

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