« Une épaisse fumée de goudron et de houille prenait à la gorge, tandis qu'un bruit de ferraille rugissant sous le marteau nous assourdissait. » C’est ainsi que le journaliste Émile Goudeau décrit, début 1889, le chantier qui allait donner naissance à la tour Eiffel. Cent trente-quatre ans plus tard, elle est devenue, incontestablement, l’un des symboles de Paris. Personne n’imagine aujourd’hui la capitale sans elle et pourtant, les débuts de la «Grande dame de fer » ne furent pas une sinécure.

Janvier 1887, Gustave Eiffel (entrepreneur), Maurice Koechlin et Emile Nouguier (ingénieurs), ainsi que Stephen Sauvestre  (architecte) commencent le chantier titanesque de leur tour de métal qui doit voir le jour pour l’exposition universelle de 1889. 18 038 pièces, 2 500 000 rivets, 60 tonnes de peinture, 7 300 tonnes de fer et 2 ans, 2 mois et 5 jours… auront été nécessaire pour ériger cette icône. Dès l’annonce de ce chantier, artistes et intellectuels se sont unis pour en éviter la construction. Parmi eux, Emile Zola, Charles Garnier, Guy de Maupassant ou Victorien Sardou qui ont publié, le 14 février 1887, une lettre dans le journal « Le Temps », où ils s’en prennent à « l’inutile et monstrueuse tour Eiffel » qu’ils accusent de vouloir écraser « de sa masse barbare » les autres monuments de la capitale.

La tour Eiffel, monument indissociable de la ville Lumière

Loin de ces polémiques, la tour Eiffel est aujourd'hui devenue indissociable de la ville Lumière et copiée partout dans le monde. On compte en effet pas moins d’une trentaine de répliques, ou d’inspirations, allant de Blackpool (Angleterre), à Las Vegas, en passant par le Texas, Prague, l’Oural ou encore Shanghai. Au-delà de la prouesse architecturale, elle inspire artistes comme sportifs et devient spectatrice de bon nombre d’exploits. Course à pieds, à moto ou à vélo dans ses escaliers, homme-oiseau, saut en parachute depuis ces étages, tentative aérienne pour passer dessous en avion… tous rivalisent d’imagination afin d’être à la hauteur.

Côté artistique, elle est tour à tour modèle pour les peintres Robert Delaunay, Marc Chagall, Paul Signac, Nicolas de Staël…  et figurante pour le cinéma. « Funny Face » avec Audrey Hepburn, Roger Moore en 007 dans « Dangereusement vôtre » (« A View to a Kill »), « Zazie dans le métro » de Louis Malle, «  Mars attacks! » de Tim Burton… autant de réalisateurs et d’histoires avec pour décor la tour Eiffel.

Mais cette « grande dame » sait également servir des causes. Elle n’hésitera à pas à s’éteindre lors d’éléments tragiques ou pour sensibiliser à biodiversité et à se parer de rose en soutien à la lutte contre le cancer du sein ou bien en vert au lendemain des accords de Paris. Bref, depuis le 31 mars 1889, ce « squelette de beffroi » pour Paul Verlaine, nous en met plein la vue et brille de mille feux chaque soir pour le bonheur des grands, comme des plus petits.