C’est l’un des 17 objectifs de développement durable des Nations-Unis pour 2030 mais il semble plus que jamais hors d’atteinte au vu des derniers chiffres publiés par l'ONU. Plus de deux milliards d’êtres humains n’ont toujours pas accès à l’eau potable et quatre milliards et demi à des services d’assainissement. Cela a des conséquences sur la santé de la population mondiale, mais aussi sur l’accroissement de la pauvreté et des inégalités. Et l'économie dans son ensemble. 

Boire un verre d’eau, se laver les dents ou utiliser des toilettes : ces gestes qui nous paraissent anodins constituent pour des centaines de millions de personnes à travers le monde un parcours du combattant. Selon le dernier rapport mondial des Nations-Unies sur les ressources en eau (1), plus de deux milliards d’êtres humains n’ont pas accès à un système d’eau potable dit "sécurisé" tels qu’un puits, de l’eau livrée (en citerne ou en bouteille) ou de l’eau de pluie (trois personnes sur dix). 4,5 milliards d’humains ne disposent pas de services d’assainissement permettant une évacuation et un traitement des excréments (six personnes sur dix). Et près de 900 millions de personnes défèquent en plein air.
"L’accès à l’eau est un droit humain vital pour la dignité de chaque être humain. Pourtant, des milliards de personnes en sont toujours privées", déplore ainsi Audrey Azoulay, la directrice générale de l’UNESCO. 
Une eau jusqu’à 20 fois plus chère
L’ODD n°6 de l’ONU, qui prévoit de fournir de l’eau et des toilettes partout dans le monde et à tout le monde d’ici 2030, semble donc loin d’être atteint. Plusieurs centaines d’années seront encore nécessaires avant que la Roumanie n’ait un système d’assainissement des eaux usées décent sur l’ensemble de son territoire. Pour le Vanuatu, il faudra attendre l’année 3469 pour un assainissement de base. Quant à la population nicaraguayenne, elle n’aura pas d’accès, dans son ensemble, à l’eau potable avant 2180, précisait une étude publiée l’été dernier.
L’assainissement et la qualité de l’eau sont pourtant les moyens les plus efficaces de promouvoir la santé tout en réduisant la pauvreté et les inégalités. 2,6 millions de personnes meurent encore dans le monde du fait des maladies véhiculées par l’eau. Les pays les moins avancés sont les plus touchés. En Afrique subsaharienne, seulement un quart de la population a accès à une source sûre d’eau potable et les installations sanitaires de base – non partagées avec d’autres foyers – sont réservés à moins d’un tiers de la population. 
Le manque d’eau est aussi un facteur d’inégalités. Dans les bidonvilles, les citadins qui doivent s’approvisionner auprès de vendeurs ambulants et de camions citernes paient leur eau jusqu’à 20 fois plus chère que dans le centre-ville. Dans les campagnes africaines, les femmes et les jeunes filles consacrent plus de 30 minutes par jour à aller chercher de l’eau, délaissant les salles de classe et la possibilité d’avoir un travail rémunéré.
Trois fois plus d’investissement nécessaire
Selon les estimations onusiennes, la demande mondiale en eau croît chaque année de 1 % et devrait augmenter de 20 à 30 % d’ici 2050 par rapport au niveau actuel. Plus de deux milliards de personnes vivent déjà dans des pays soumis à un niveau de stress hydrique élevé. Or si ces pressions et les dégradations de l’environnement naturel autour des sources se poursuivent, 45 % du PIB mondial et 40 % de la production céréalière mondiale seront en danger d’ici 2050.
C’est pourtant ce qui se profile. Le changement climatique risque de compliquer l’accès à l’eau potable en raison des sécheresses et des inondations qui peuvent endommager les infrastructures. Avec les pesticides, les nitrates, et les résidus de médicaments, les sources de pollutions de l’eau se multiplient…et l’eau est de plus en plus au cœur des conflits. En 20 ans, ceux ci ont été multipliés par plus de 3, provoquant des millions de réfugiés. Rien qu’en 2017, ils ont poussé 68,5 millions de personnes sur les routes. Et c’est sans compter sur la moyenne de 25,3 millions de personnes forcées de migrer chaque année en raison de catastrophes naturelles. 
Pour atteindre l’objectif de développement durable consacré à l’eau, l’ONU a calculé que les investissements devraient atteindre 114 milliards de dollars par an, soit trois fois plus que ce qui est dépensé actuellement. Un effort financier qui serait cependant rentable: pour chaque dollar investi dans les infrastructures sanitaires et liées à l’eau, l’effet multiplicateur est estimé à 2 pour l’eau potable et à 5,5 pour l’assainissement.
Concepcion Alvarez, @conce1
(1) Voir le rapport ici

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