Menace de grève de l’IVG : une femme dépose plainte contre le syndicat des gynécologues

Gwendoline Cros a eu recours à l’IVG il y a dix ans. Ce mercredi, elle défendra ce droit des femmes après sa plainte contre le Syngof, le syndicat qui a menacé de faire la grève de l’avortement.

 « Cela ne viendrait à l’esprit d’aucun médecin de faire la grève de la chimio ou la grève de l’opération de la prostate, mais de l’IVG, si ! » s’indigne Gwendoline.
« Cela ne viendrait à l’esprit d’aucun médecin de faire la grève de la chimio ou la grève de l’opération de la prostate, mais de l’IVG, si ! » s’indigne Gwendoline. LP/Sarah Alcalay

    Des médecins qui envisagent de faire la grève de l'IVG? La menace lui a fait l'effet d'un « coup de poing dans l'estomac ». Alors Gwendoline Cros a voulu organiser le match retour. Le Parisien le révèle, cette habitante de Lille (Nord), 37 ans, a déposé une plainte devant l'Ordre des médecins et participera ce mercredi matin à une réunion de conciliation avec Bertrand de Rochambeau, en Seine-et-Marne, là où exerce le président du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (Syngof). De nombreuses militantes, pancartes indignées en main, ont prévu de l'accompagner, bien décidées à donner de la voix.

    Gwendoline a repris des études de sage-femme. Elle est maman et blogueuse. Mais c'est bien ici la femme, estimant que le 12 mars son droit a été - une nouvelle fois - bafoué, qui agit. Ce jour-là, le puissant syndicat, déjà connu pour ses prises de position controversées sur l'avortement, publie une newsletter à destination de plus de 1500 gynécos. Pour faire pression sur le gouvernement et obtenir une meilleure assurance en cas d'erreurs médicales, le Syngof y brandit l'ultimatum « d'arrêter les IVG si la ministre de la Santé refuse de [les] recevoir ».

    « Il était impossible de les laisser se servir de l'IVG comme d'une monnaie d'échange. Cette emprise du pouvoir médical sur notre corps est insupportable », tranche la trentenaire, qui a fait valoir dans ses deux plaintes (visant l'ancien et le nouveau président du syndicat) les articles 3 et 31 du Code de santé publique, qui rappellent que « tout médecin doit s'abstenir, de tout acte de nature à déconsidérer sa profession ».

    « Il faut des sanctions exemplaires »

    En France, 218 000 avortements sont pratiqués chaque année. Gwendoline sait mieux que quiconque que l'on n'y va pas « la fleur au fusil », dit-elle. Avant de mettre au monde sa fille et ses deux fils, elle a eu recours il y a une dizaine d'années à l'IVG : « Pas par plaisir, mais parce que je n'étais pas, à cette époque, capable d'élever un enfant. Il fallait le faire. »

    Sur son intervention chirurgicale, elle n'a rien à redire. « J'ai été très bien prise en charge, en toute légalité, et cela, grâce aux femmes qui, avant nous, se sont battues. Mais aujourd'hui, on s'attaque insidieusement à ce droit acquis. Il y a déjà la clause de conscience (NDLR : qui permet à un professionnel de santé de refuser de pratiquer un avortement) et maintenant la menace de grève. Cela ne viendrait à l'esprit d'aucun médecin de faire la grève de la chimio ou la grève de l'opération de la prostate, mais de l'IVG, si! » lance-t-elle, de la colère dans la voix.

    Ce mercredi matin, six jours après que le Conseil national de l'Ordre a annoncé à son tour poursuivre les responsables du syndicat, elle arrivera de Lille pour rencontrer son président au siège départemental de La Rochette (Seine-et-Marne). Contacté, Bertrand De Rochambeau n'a pas souhaité faire de commentaire. Déjà, Gwendoline sait que de conciliation, la rencontre n'aura que le nom. « Il faut des sanctions exemplaires contre ceux qui prennent l'IVG en otage. J'irai, pour toutes les femmes, au bout de ma démarche. » Ce mardi, chez elle, elle a peaufiné ses affiches et pancartes. Parmi elles, « Merci Simone », ou encore « Mon IVG, mon droit ».