De la Silicon Valley à thecamp, la start-up américaine Bovlabs, spécialisée en énergie verte, développe un système intelligent permettant à d’importantes infrastructures de stocker et redistribuer leur propre énergie. L’expérience est menée à la gare TGV d’Aix-en-Provence.

Il y a encore un an, jamais Jaikrishnan Radhakrishna Pillai – tout le monde l’appelle « JK » – n’aurait imaginé poser ses valises dans le Sud de la France. Et encore moins dans la métropole Aix-Marseille Provence. Et pourtant… depuis quelques mois, tout en développant sa start-up, il apprend la langue française avec sa fille « bien plus rapide que moi », plaisante-t-il. « JK » est Indien. Il a longtemps vécu dans son pays natal avant d’aller s’installer à Londres.

Avec une longue expérience dans le domaine du numérique « 17 ans » sourit-il, ce chef d’entreprise a toujours voué une « passion pour l’énergie verte ». Et c’est ce qui a donné naissance à Bovlabs au cœur de Silicon Valley, (San Francisco), puis à Zurich en 2017. L’ambition était de créer un marché pour l’échange d’énergies vertes entre individus, basé sur les micro-réseaux intelligents et la blockchain. « Nous avons lancé notre premier projet au Texas, avec un opérateur de réseaux intelligents, pour la revente d’énergie électriques dans les supermarchés et les hôpitaux », nous raconte Jaikrishnan. Grâce à la solution développée par Bovlabs, « nous avons pu créer une place de marché pour que ces supermarchés revendent leur énergie, avec des coûts réduits par rapport aux solutions actuelles, notamment dans le cadre des transactions ».

, Comment la gare d’Aix TGV ambitionne de devenir autonome en énergie ?, Made in Marseille
Jaikrishnan Radhakrishna Pillai, patron de la start-up BovLabs, spécialiste en énergie verte. Photo N.K.

Un écosystème territorial propice au développement international

Très vite la start-up essaime dans le monde entier : à Kerala en Inde, au cœur de la Silicon Valley, à San-Francisco et à Zug en Suisse où le co-fondateur Martin Lesner est d’ailleurs établi. Reste que le patron est en quête de croissance. Et sa rencontre avec l’Agence de développement économique métropolitaine arrive à point nommée. « Nous avions assisté à une conférence de Provence Promotion à la Silicon Valley et nous avons entendu parler d’un projet en cours sur le périmètre d’Euroméditerranée à Marseille, qui intégrait dans sa démarche cette solution innovante en matière d’énergie durable ». C’est le projet Smartseille !

En 2018, par l’entremise de Provence Promotion et d’Euroméditerranée, voilà « JK » Pillai. Il découvre l’écosystème provençal et participe à un colloque sur la smart city à Marseille. La technologie de Bovlabs séduit à l’international, et pour accélérer le développement de sa start-up, « JK » est courtisé par « Boston ou encore l’Australie ». C’est finalement la proposition de l’accélérateur Le Village by CAAP à thecamp « qui a fait la différence. J’ai trouvé une belle énergie et un réseau, le fait de pouvoir entrer en contact avec de grandes entreprises était important, car ce n’est pas simple de rentrer dans le secteur de l’énergie pour une start-up, notamment parce qu’on a affaire à de grandes groupes des acteurs implantés depuis longtemps. »

Les véhicules garés sur le parking pourront alimenter la gare

Le programme d’accélération fonctionne. Bovlabs découvre le projet Solarcamp développé au sein du « campus du futur » et à la gare ferroviaire d’Aix TGV, par un consortium de partenaires comme Vinci Energies, Accenture, Gares & Connexions (SNCF), Nissan et thecamp. « Nous avons eu l’opportunité de travailler avec Gares & Connexions pour développer un projet de véhicules qui permet de stocker l’énergie et la redistribuer dans un réseau intelligent en conjonction avec le chargement/déchargement ». C’est à la suite du black-out à la gare Saint-Lazare, deuxième gare la plus fréquentée de France, en juin 2018, que la SNCF a décidé de chercher une nouvelle stratégie pour éviter que ce genre de pannes ne se reproduisent.

C’est la gare SNCF d’Aix TVG qui sert de lieu d’expérimentation. L’ambition est d’en faire une gare autonome du point de vue énergétique, sous trois ans, en produisant de l’électricité à partir de panneaux photovoltaïques et d’hydrogène. Les panneaux photovoltaïques sont installés depuis plus d’un an déjà à l’entrée de la gare, dans le cadre de cette phase test qui vient de s’achever. « Nous travaillons maintenant avec Nissan pour la deuxième étape, qui concerne le stationnement et les parkings, explique l’entrepreneur. Les véhicules garés sur le parking serviront demain à stocker l’énergie qui alimentera la gare. Il y a 5000 places. 26% des voitures passent la nuit sur le parking et 80% restent plus de 5 heures. À partir d’une application mobile qui servira d’interface avec le réseau, le voyageur qui laisse son véhicule devra renseigner la date de retour et la charge dont il a besoin. »

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« Les véhicules garés sur le parking serviront demain à stocker l’énergie qui alimentera la gare ». Photo DR

En contrepartie, il pourra gagner le prix de son stationnement, grâce à des jetons digitaux (tokens), louer une voiture à Paris ou tout autre service. « La station peut devenir un modèle d’auto-consommation », assure « JK ». Cette innovation peut également permettre à la gare TGV de revendre son énergie aux boutiques implantées sur son site, et ainsi réduire la facture, pour entrer dans l’ère d’une « gare développement durable ».

Bovlabs en discussion avec l’aéroport Aix-Marseille Provence

BovLabs est actuellement en discussion avec l’aéroport Aix-Marseille Provence pour répliquer ce projet. Pour la start-up, ce territoire représente un point d’entrée sur l’Europe. « Pour moi, c’est important cette visibilité, c’est un vecteur d’opportunités. Et puis j’ai trouvé des personnes qualifiées, à thecamp, à la Cisam [Cité des savoirs et de l’innovation ndlr]. Le premier financement pour Bovlabs est français. Et pour une start-up en démarrage c’est aussi moins cher que d’aller à Paris », assure le patron, très enthousiaste.

C’est pourquoi la société a décidé de s’enraciner définitivement à Aix-en-Provence, et d’installer le siège social de la maison-mère à thecamp. Elle compte répondre aux appels d’offres régionales pour les photovoltaïques et les systèmes des bornes de charges intelligents. Si « JK » se dit prêt à « payer des taxes en France s’il a plus d’opportunités », il indique aussi que l’Inde, son pays natal, possède un important potentiel dans le domaine des cleantech et l’énergie verte. « Je suis aussi prêt à faciliter le business dans d’autres pays avec d’autres partenaires ». Dans l’optique de poursuivre son aventure à l’international, Bovlabs est en quête de nouvelles collaborations, avec les opérateurs de réseaux micro-intelligents, de systèmes de charges et les constructeurs automobiles. La start-up emploie sept personnes et prévoit cinq nouveaux recrutements en 2019, essentiellement au sein de thecamp.

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